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Soumission

On ne sait pas très bien qui a décidé de contraindre quelque 150 lycéens à s’agenouiller les mains sur la tête pendant une interpellation à Mantes-la-Jolie, devenue le temps d’une vidéo Mantes-la-Grimaçante. Ce qui est sûr, c’est que cette brimade d’un autre âge est une initiative funeste et choquante. Certes, les policiers n’étaient pas assez nombreux, dit-on, pour opérer dans des conditions normales. Certes, la scène diffusée sur les réseaux sociaux a été précédée d’incidents violents. Mais les symboles ont une force autonome, qui excède de loin toutes les explications qu’on peut fournir après coup. D’autant qu’une partie de ces jeunes gens ont été pris dans la nasse et n’avaient commis aucune infraction.

Une silhouette de policier botté et casqué devant un groupe humilié et contraint à une soumission silencieuse : chacun sait que ces images émanent en général de pays soumis à dictature. Nous n’y sommes pas, évidemment. Les lycéens arrêtés ont été ensuite relâchés ou bien placés en garde à vue selon la procédure classique, sans être plus avant maltraités. Mais l’image demeure. C’est un miracle qu’elle n’ait pas provoqué un de ces embrasements dont le milieu lycéen est coutumier. Le mouvement des gilets jaunes, on l’a compris sur le tard au sommet de l’Etat, est né aussi d’un sentiment d’humiliation, celui-là même qui est à l’origine de tant d’explosions sociales dans l’histoire. Les protestataires, jusqu’à présent, se sont contentés de retourner le symbole en s’agenouillant volontairement, les mains sur la tête, devant les policiers ou les CRS lors des manifestations de samedi dernier. Méritoire retenue, somme toute, qui montre que la masse des gilets jaunes ne cherche pas l’affrontement pour l’affrontement. Autrement dit, après la singulière bévue de Mantes, le gouvernement s’en tire pour l’instant à bon compte.



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