Septième ciel au bain rituel

Un conte fantastique de l’Israélien Eshkol Nevo dans une ville collet monté

Faire rire est une tâche ardue, si ardue que la plupart des romans israéliens y renoncent purement et simplement. Il est tellement plus facile de construire un héros qui souffre et gémit - la vie regorge de raisons de pleurer, on n’a que l’embarras du choix. Il est beaucoup plus compliqué de créer un personnage qui nous fasse sourire et encore plus difficile, voire rare, de nous faire rire aux éclats. Combien de larmoiements ai-je pu rencontrer dans la littérature israélienne ! Des soupirs de douleur, de chagrin, de deuil, des gémissements de tristesse de bourgeois comme d’exclus. En revanche, que les soupirs de plaisir sont rares ! Ceux qui accompagnent un éclat de rire ou l’amour fait dans les règles de l’art. Voilà, ce sont précisément ces soupirs-là, de rire et de plaisir, que l’on peut entendre dans Jours de miel, le roman d’Eshkol Nevo. Ils s’élèvent d’entre les pages et font monter le rouge aux joues du lecteur, or il y a peu de choses que j’aime autant qu’un livre qui me fait rougir.

Club d’échecs.Le récit se déroule à Safed, dans le nord d’Israël, ville sainte pour les juifs. Comme la plupart des lieux saints, l’austère Safed, refermée sur elle-même et conservatrice, sanctifie l’âme et renonce aux plaisirs de la chair. Un philanthrope juif américain décide de donner de l’argent pour faire construire un énième mikvé dans la ville. Le mikvé est un bain rituel dans lequel les Juifs religieux s’immergent pour se purifier. Ainsi les femmes, par exemple, doivent-elles s’y plonger après la fin de leurs menstruations.

Bien entendu, le maire de Safed, Danino, se réjouit de la donation, mais il se demande où diable faire construire un nouveau mikvé dans sa ville déjà saturé. Cela reviendrait un peu à construire une église de plus dans l’enceinte du Vatican - c’est déjà assez encombré. Le seul quartier qui n’en ait pas encore est surnommé «la Sibérie», en raison de l’origine de ses résidents. (...)

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