"Savait-elle dire 'on n'a pas le droit de me toucher'?": Genetet évoque le cas Haenel pour défendre l'éducation à la sexualité
Une affaire qui donne des arguments pour déployer les cours d'éducation affective à l'école. Au lendemain du procès du réalisateur Christophe Ruggia, accusé d'agressions sexuelles sur l'actrice Adèle Haenel, et contre quila procureure a requis cinq ans de prison dont deux ferme, la ministre de l'Éducation nationale juge que l'éducation à la sexualité pour les élèves aurait pu changer la donne.
"Quand la jeune Adèle a été agressée sexuellement, est-ce qu'elle savait dire 'là, on n'a pas le droit de me toucher'?", se demande Anne Genetet ce mercredi 11 décembre sur Sud radio.
"Il faut apprendre" qu'une "telle partie du corps ne doit pas être touchée, qu'il m'appartient", avance encore la locataire de la rue de Grenelle.
"Sexualiser une enfant de 12 ans"
Ce procès arrive cinq ans après les accusations d'agressions sexuelles de la comédienne Adèle Haenel à l'encontre de Christophe Ruggia. Le réalisateur avait reçu chez lui la comédienne, alors âgée de 12 à 14 ans entre 2002 et 2004 ,"à 120 reprises" les samedis après-midi, d'après l'avocat de l'actrice devant le tribunal.
"Mains sous le t-shirt", "sous la culotte", "sous le pantalon", "baisers appuyés dans le cou", le réalisateur qui a fait tourner la comédienne dans son premier film Les diables, a fait "le choix d'agresser sexuellement" "une enfant", a jugé la procureure dans son réquisitoire.
"Et moi je me tends, mon corps se crispe, je me recroqueville dans un coin du canapé", a rapporté de son côté l'actrice devant le tribunal de Paris. "S'il considère que je résiste trop, il me regarde... 'quoi, bah quoi?' et il continue".
"Il n'arrêtait pas de me sexualiser, ça me dégoûte, comme si un enfant de 12 ans avait déjà eu un regard pornographique!", a-t-elle encore expliqué, en citant les propos du réalisateur qui parlait de sa "sensualité débordante" pendant le tournage.
"Qui s'est soucié de l'enfant?"
Cinq ans de prison, dont deux ferme, ont été requis contre Christophe Ruggia. Le réalisateur, qui plaide l'innocence, s'est péniblement défendu face aux témoignages souvent accablants de ses propres proches.
"Tout le monde me demande de pleurer sur son sort. Mais qui s'est soucié de l'enfant? Agresser des enfants, ça ne se fait pas. Ça a des conséquences. Personne n'a aidé cette enfant", a encore regretté Adèle Haenel, lors du procès.
Autant d'arguments qui plaident pour le développement de l'éducation affective, sexuelle et relationnelle dans les établissements scolaires. Si c'est déjà le cas sur le papier depuis 2001, moins de 15% des élèves bénéficient en réalité des trois séances annuelles prévues dans les programmes.
Le programme sur l'éducation à la sexualité "pas acceptable"
La ministre de l'Éducation nationale devait présenter mi-décembre un nouveau programme en la matière qui devait faciliter son large déploiement, dans les tuyaux depuis le passage de Pap Ndiaye au ministère.
Avant même le dévoilement de sa version définitive, son contenu a suscité la fronde des milieux conservateurs et des critiques au sein même du gouvernement, à commencer par Alexandre Portier, le ministre délégué chargé de la Réussite scolaire.
Le numéro deux du ministère, dépendant hiérarchiquement d'Anne Genetet, a jugé ce programme "en l'état pas acceptable". Plusieurs collectifs conservateurs dont le Syndicat de la Famille, nouveau nom de La Manif pour tous, ont dénoncé un projet "scandaleux", "sous influence woke et imprégnée d'idéologie".
Le rôle "essentiel" de l'école
De leur côté, plusieurs organisations comme le Planning Familial ont dénoncé cette fronde et insisté sur le rôle "essentiel" de l'éducation à la sexualité à lécole pour lutter contre les violences sexuelles.
160.000 enfants sont victimes chaque année d'agressions sexuelles d'après les chiffres de la CIVISE (commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants).