Les sapins de Noël artificiels sont-ils vraiment plus écologiques ?

S'il peut être réutilisé plusieurs années de suite, le sapin de Noël en plastique ne représente pas pour autant une alternative durable satisfaisante par rapport aux sapins naturels à usage unique. Explications.

C'est l'une des traditions incontournables de Noël. Chaque année, à l'approche du 24 décembre, des centaines de milliers de familles à travers le monde installent un sapin dans leur salon et le décorent méticuleusement pour créer une ambiance chaleureuse, propice à raviver l'esprit des fêtes de fin d'année.

Une fois ces dernières passées, le beau sapin ayant accompli sa mission est toutefois évacué aussi vite qu'il était arrivé. A l'heure où l'impact environnemental de nos habitudes de consommation est devenu une question majeure, déraciner un arbre pour l'utiliser comme décoration d'intérieur pendant quelques semaines avant de s'en débarrasser peut ainsi s'apparenter à un gâchis.

Les sapins artificiels plus pérennes, donc plus écologiques ?

Ce constat posé, on pourrait instinctivement penser qu'opter pour un arbre en plastique, réutilisable plusieurs années de suite, plutôt que pour un véritable sapin périssable est un choix bénéfique sur le plan écologique. Selon une étude du cabinet Kantar, environ 16% des 6,9 millions de sapins de Noël vendus en France en 2018 étaient en effet artificiels.

Comme souvent, la réalité est cependant plus complexe que la théorie. S'ils peuvent effectivement être conservés sur une durée beaucoup plus longue, les sapins en plastique génèrent un coût environnemental sans commune mesure avec celui associé à la production et à l'exploitation de conifères naturels pour les fêtes de Noël.

VIDÉO - Quels sont les 15 pays les plus pollueurs au monde ?

Une étude édifiante

Dans une étude publiée en 2009, le cabinet de conseil en développement durable Ellipsos avait ainsi tenté de comparer les impacts carbone respectifs des sapins artificiels et naturels, en utilisant la méthode de l'analyse du cycle de vie (ACV), qui envisage ces impacts d'une manière globale, en tenant compte "de l’extraction des matières premières, de la transformation, du transport, de l’utilisation et de la gestion en fin de vie" des produits concernés.

Les résultats obtenus à l'époque par le cabinet canadien sont édifiants. Selon Ellipsos, les émissions totales de CO2 associées au cycle de vie complet d'un sapin de Noël naturel remplacé annuellement s'élèvent à 3,1 kg. Pour un sapin artificiel, ces émissions bondissent à 48,3 kg ! Même en les ramenant sur une base annuelle, en partant du principe que les sapins en plastique ont une durée de vie moyenne de six ans, on obtient des émissions équivalentes à 8,1 kg par an.

Les sapins en plastique plus performants écologiquement... à partir de 20 ans d'utilisation

"L’arbre naturel s'avère la meilleure option, particulièrement par rapport aux impacts sur les changements climatiques et l’épuisement des ressources, confirment les experts d'Ellipsos dans la conclusion de leur étude. Cela dit, l’arbre naturel n'est pas une solution parfaite puisqu’il présente plus d'impacts sur la qualité des écosystèmes que l'arbre artificiel."

Selon les auteurs de l'étude, pour tirer un bénéfice écologique de l'achat d'un sapin artificiel, il est impératif de le conserver très longtemps. "Les consommateurs qui préfèrent cette option peuvent le rendre plus performant que l'arbre naturel en prolongeant sa durée d’utilisation à 20 ans et plus", précisent même les analystes canadiens.

Des bilans carbone sans commune mesure

Ce bilan carbone particulièrement lourd découle notamment des matériaux utilisés dans la fabrication du sapin, issus de l'industrie pétrochimique, mais aussi des importantes distances parcourues par ces arbres artificiels entre leurs lieux de production (souvent en Asie) et leurs lieux d'utilisation, ainsi que des faibles possibilités de recyclage existantes pour de tels produits.

À l'inverse, les arbres de Noël naturels compensent en partie leur courte durée d'utilisation par la proximité avec les zones de production (on dénombre par exemple en France plus de 5000 hectares consacrés à la culture de sapins pour cette consommation spécifique), ainsi que par diverses solutions de recyclage (compostage, débitage, replantage), sans même parler de la fonction naturelle de "puits de carbone" de ces végétaux au cours de leur croissance.

Lutter contre l'impact négatif des cultures de sapins sur les écosystèmes

D'une manière générale, il semble que les problèmes posés par la monoculture intensive de sapins sont plus aisés à résoudre que ceux induits par l'importation massive d'arbres en plastique. Et ce d'autant plus que de nombreux professionnels du secteur ont pris acte de la nécessité de limiter l'impact négatif de ces cultures sur les écosystèmes, en premier lieu l'acidification des sols provoquée naturellement par les forêts de conifères.

"Une plantation de sapins de Noël reste en place au maximum 10 ans, la litière (branches mortes, aiguilles) responsable de l'acidification n'a donc pas le temps de se former, assure ainsi l'Association Française du Sapin de Noël naturel (AFSNN), citée par Futura. Enfin entre deux rotations de sapins de Noël, beaucoup de producteurs réalisent une interculture, céréales ou engrais verts qui fertilisent le sol."

Une tendance encourageante au recyclage des sapins naturels

Un autre facteur conduisant à penser que les sapins naturels sont en fin de compte plus écologiques que les arbres artificiels est la tendance actuelle à une démocratisation du recyclage des sapins après utilisation, avec des solutions de plus en plus pratiques et accessibles proposées aux consommateurs pour offrir une seconde vie à leur sapin de Noël.

Selon le cabinet Kantar, la part des sapins de Noël jetés après les fêtes a ainsi connu une réduction constante ces dernières années, passant de 18% en 2013 à 13% en 2018. Des chiffres encourageants qui montrent que, comme pour de nombreux autres produits, le consumérisme effréné et irraisonné n'est en aucun cas une fatalité.

VIDÉO - L’impact des déchets plastiques et de la pollution de l’eau sur notre santé