Samuel Benchetrit sort une comédie burlesque et poétique avec Vanessa Paradis

Gustave Kerven et Vanessa Paradis dans
Gustave Kerven et Vanessa Paradis dans

Samuel Benchetrit, auteur de comédies burlesques et poétiques qui portent souvent un regard corrosif sur la société française, sort ce mercredi 29 septembre un nouveau film dans cette lignée, Cette musique ne joue pour personne. Présenté en juillet dernier au festival de Cannes, ce film mené par Vanessa Paradis, Ramzy Bedia, François Damiens, JoeyStarr, Gustave Kervern et Bouli Lanners suit des gangsters de la petite semaine bouleversés par une série de rencontres amoureuses.

Avec Quentin Dupieux (Mandibules) et le duo Benoît Delépine et Gustave Kervern (Effacez l'historique), Samuel Benchetrit fait partie d'une troupe informelle de réalisateurs de comédies fascinés par les marginaux. Dans un paysage cinématographique français qui n'apprécie par le mélange des genres, ils ont su s'imposer en réalisant, hors du système, des comédies, genre le plus fédérateur qui soit en France.

Comédie du désespoir

"J'aime la comédie, parce qu'elle est cash", résume Samuel Benchetrit. Influencé par la comédie italienne, belge et finoise, il dit avoir "un humour de la dérision et des gens dans la merde": "Le cinéma anglais a connu ça aussi à une époque, mais le français beaucoup moins. On le retrouve un peu chez Pierre Salvadori, qui a fait Les Apprentis avec François Cluzet et Guillaume Depardieu. C'est une comédie de gens qui ont de l'humour même dans les situations les plus désespérées." Cette comédie du désespoir est sûrement le genre comique la plus à-propos par les temps qui courent.

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Cette musique ne joue pour personne propose ainsi une vision décalée de dockers à moitié malfrats dans la région de Dunkerque, où a été tourné le film. "L'idée, c'est de montrer ces garçons qui évoluent dans un univers de violence et de s'intéresser à complètement autre chose: à leur cœur au moment où ils vivent chacun des histoires amoureuses. J'ai voulu faire un film d'amour avec ces gars-là."

"Les gangsters me font penser aux artistes"

Samuel Benchetrit renoue dans ce film avec une figure qu'il adore, celle du gangster à la petite semaine, déjà employée dans J'ai toujours rêvé d'être un gangster (2008). "J'aime ce genre de personnages, parce qu'ils me font penser aux artistes. Comme eux, ils ont une autre vie, une vie à la marge. Je me sens proche d'eux. Je n'ai pas de fascination pour les gens qui volent ou tuent, mais j'ai une fascination pour ces gens qui vivent en dehors de la société."

Ses films jusqu'à présent n'ont jamais rencontré de grands succès publics ou critiques, mais ils ne laissent personne indifférent. Si Cette musique ne joue pour personne est son film le plus consensuel depuis presque deux décennies, son précédent, Chien (2018), sur un homme qui accepte de se faire traiter comme un chien par ses proches, a décontenancé le public, qui l'a majoritairement rejeté sans en percevoir la dimension satirique.

"C'est un conte dystopique", précise Samuel Benchetrit. "Je voulais faire un film sur quelqu'un qui était proche du Christ, un personnage qui est dans la non-résistance, mais les gens ne l'ont pas très bien compris. Ou alors je l'ai mal expliqué. Je savais que Chien serait peu vu. On m'en parle souvent maintenant. J'ai beaucoup d'affection pour ce film. J'aimais l'idée de ce punching-ball magnifique et tendre."https://www.youtube.com/embed/eezvU_YqG8E?rel=0

Quelques années auparavant, Samuel Benchetrit a sorti une autre comédie rejetée par la presse et le public: Chez Gino (2011), avec José Garcia et Anna Mouglalis. "Je me suis complètement planté avec ce film, mais j'ai de la tendresse pour lui. Il est très bancal. Il est malade. J'avais deux films à faire: d'un côté un film d'auteur très décalé, un peu fou, et de l'autre un film de gags avec José Garcia."

"Il y avait aussi une opposition entre les producteurs et moi", ajoute-t-il. "Ils voulaient faire un million d'entrées et moi un film d'auteur. J'étais sur deux choses à la fois, ce qui n'est jamais bon. Je n'étais pas capable de faire le film que les producteurs voulaient faire. J'ai essayé de le faire par moment, mais le résultat est assez bizarre. Une scène peut être assez réussie et puis celle d'après est complètement ratée. C'est un drôle de film."

"Ca les gênait de rire de Marie Trintignant"

Sa comédie qui a le mieux marché, et qui reste la plus connue, est sa première, Janis et John (2003). Elle reste attachée au destin tragique de Marie Trintignant, qui en était l'héroïne avec François Cluzet et Sergi Lopez en petits escrocs. "Marie est morte un mois avant la sortie du film", rappelle Samuel Benchetrit. "Ça ne gênait pas les gens d'acheter Paris Match, car ils pouvaient le lire chez eux, mais ça les gênait d'aller dans une salle et de rire de quelqu'un qui venait de connaître un tel drame."

https://www.youtube.com/embed/AoPBOHv2O54?rel=0"Je n'ai jamais revu ce film - je ne revois jamais mes films", poursuit-il. "J'ai revu des bouts un jour. Mes enfants le regardaient. Je crois que c'était amusant. Je me souviens que je me disais que ça allait être un grand film - et ce n'est pas le cas. C'est un film amusant. C'est bien pour un premier film."

Ces derniers temps, Samuel Benchetrit dirige au Théâtre Edouard VII son épouse Vanessa Paradis dans sa pièce Maman. Un triomphe: "On entend la salle rire. Je suis heureux de les entendre rire."

Article original publié sur BFMTV.com