Le Royaume-Uni se prépare au "pire jour" des émeutes xénophobes, des avocats dans le viseur de l'extrême droite

La police britannique se prépare au "pire jour de trouble" depuis le début des émeutes xénophobes fin juillet au Royaume-Uni, résume la presse outre-Manche. Pas moins de 6.000 agents seront mobilisés dans plusieurs villes du pays ce mercredi 7 août, alors qu'au moins une trentaine de manifestations sont prévues, principalement en Angleterre et à Belfast.

Ces manifestations pourraient en particulier viser des cabinets d'avocats spécialisés en droits des étrangers. Une liste avec les noms de dizaines d'entre eux circulait en début de semaine sur les réseaux sociaux, expliquent la BBC et le Guardian. Ces deux médias affirment que la police a recommandé aux avocats de télétravailler et d'éviter de se rendre à leurs bureaux ce mercredi.

Plus de 400 personnes interpellées en une semaine

Jusque-là, les militants d'extrême droite ont ciblé des mosquées, des hôtels hébergeant des demandeurs d'asile ou des commerçants identifiés comme musulmans ou non-blancs. Car le racisme, la xénophobie et l'islamophobie sont le moteur de ces dizaines de manifestations qui secouent le Royaume-Uni depuis le mardi 30 juillet.

Les émeutes ont éclaté après une attaque au couteau à Southport, où trois enfants ont été tués, un drame qui a donné lieu à une flambée de rumeurs et de désinformation sur les réseaux sociaux sur la religion et l'origine du suspect, désigné à tort comme musulman.

Le ministère de l'Intérieur a mis en place un dispositif de protection pour les mosquées qui pourraient faire l'objet d'actes de haine. Toute mosquée peut se signaler auprès des autorités pour en bénéficier, mais les moyens de police ne seraient pas suffisants, selon le Conseil musulman.

En une semaine, plus de 400 personnes ont été interpellées et au moins 120 policiers ont été blessés. Des chiffres impressionnants pour le Royaume-Uni, qui n'avait pas connu une telle phase de violences depuis 2011 et la mort d'un jeune homme métis, Mark Duggan, tué par la police au nord de Londres.

Ce mercredi, une trentaine de villes seront donc en alerte, de Sunderland à Portsmmouth en passant par Birmingham, Middlesborough ou Newcastle. À Liverpool, les patrouilles de police seront renforcées tandis qu'à Londres, les autorités promettent d'utiliser "tous les pouvoirs, toutes les tactiques et tous les outils" pour protéger la capitale d"'une des pires vagues de troubles violents de la dernière décennie".

"Nous sommes au courant d'événements prévus par des groupes qui sèment la haine et la division", a déclaré dans un communiqué le commissaire adjoint Andy Valentine, responsable des opérations de maintien de l'ordre à Londres.

Le rôle des réseaux sociaux pointé du doigt

Ce mardi, de nombreux suspects ont défilé devant la justice, le parquet précisant qu'une centaine d'inculpations ont déjà eu lieu. À l'issue d'une nouvelle réunion de crise, la deuxième en deux jours, le Premier ministre britannique Keir Starmer a affirmé qu'il s'attendait à ce que des peines "lourdes" soient prononcées contre les émeutiers d'ici à la fin de la semaine.

"Ce qui enverrait un message très puissant à quiconque est impliqué, que ce soit directement ou en ligne", que son cas serait traité "en une semaine" et que "personne ne devrait participer à ces désordres", a-t-il souligné, promettant la "sécurité" à la population.

La mention par Keir Starmer de la haine "en ligne" n'est pas un hasard: les réseaux sociaux sont pointés du doigt par de nombreux responsables britanniques.

Au lendemain de l'attaque de Southport, c'est le groupuscule d'extrême droite English Defence League (EDL) qui a mené une campagne de dénigrement en ligne, forçant les autorités à finalement révéler l'identité du suspect arrêté: Axel Rudakubana, né au Pays de Galles de parents originaires du Rwanda.

Principal protagoniste, le fondateur de l'EDL, Tommy Robinson a largement utilisé X pour lancer des appels aux manifestations, tout en alimentant ses 900.000 abonnés de fausses informations. Cruelle ironie de l'histoire, il avait été définitivement banni de Twitter en 2018 avant d'être réintégré en novembre dernier par un certain... Elon Musk.

Le gouvernement a d'ailleurs qualifié d'"injustifiables" et d'"irresponsables" des commentaires d'Elon Musk sur les émeutes au Royaume-Uni, où il juge "une guerre civile inévitable". "Si vous possédez une grande plateforme de réseaux sociaux, cela vous donne aussi une responsabilité", a déclaré la secrétaire d'Etat chargée de la Justice Heidi Alexander. "C'est profondément irresponsable (...) tout le monde devrait appeler au calme."

Article original publié sur BFMTV.com