« Rosalie » à Cannes, femme à barbe et femme à tout prix

Benoît Magimel face à Nadia Tereszkiewicz dans « Rosalie » de Stéphanie Di Giusto, présenté à Cannes
Benoît Magimel face à Nadia Tereszkiewicz dans « Rosalie » de Stéphanie Di Giusto, présenté à Cannes

CANNES - Femme à barbe mais pas phénomène de foire. Le film Rosalie, de Stéphanie Di Giusto, présenté au Festival de Cannes ce jeudi 18 mai, raconte tout en pudeur le destin de Clémentine Delait, une vraie « femme à barbe » du début du XXe siècle, sous les traits de Nadia Tereszkiewicz qui, s’il le fallait encore, confirme son statut d’espoir du cinéma français.

Rosalie n’est pas une femme comme les autres. Touchée par l’hirsutisme depuis sa naissance, son visage et son corps sont recouverts de poils, qu’elle rase méthodiquement chaque jour. Mais lorsqu’elle s’émancipe de son père et épouse Abel (Benoît Magimel), tenancier de café acculé par les dettes, la jeune femme n’a plus envie de cacher sa différence. En 2023, Rosalie aurait pu être l’une de ces femmes qu’on admire pour oser faire voler en éclat les diktats d’une supposée féminité. Sauf que Rosalie vit à la fin des années 1870 à une époque où les rares femmes qui lui ressemblent finissent phénomène de foire.

Rosalie et sa « féminité singulière »

Stéphanie Di Giusto filme avec beaucoup de douceur - et sans le sensationnalisme qu’on craignait - le visage et le corps hirsutes de Nadia Tereszkiewicz, qui commençait ses journées de tournage à 5h du matin pour que chaque poil soit « collé un à un sur sa peau comme un rituel solennel. Je ne voulais pas tricher et poser un simple ’postiche’ à l’actrice qui avait besoin d’y croire elle aussi », se souvient la réalisatrice française. Personnalité solaire qui détonne avec les habitants de ce morne village, Rosalie est « une femme qui s’affranchit en affrontant le regard des autres et qui affirme sa féminité singulière », ajoute-t-elle à l’AFP.

Aux côtés de Benjamin Biolay, de sa fille Anna et de la chanteuse Juliette Armanet en personnages secondaires, Benoît Magimel joue avec justesse un mari qui ne supporte pas de poser son regard sur celle qu’il vient pourtant d’épouser. Jusqu’à se laisser peu à peu séduire par cette femme fascinante. « C’était très important pour moi de parler d’amour, dit aussi Stéphanie Di Giusto. Je crois que les films répondent à une époque et je trouve que l’amour devient le vrai combat de notre époque. Dans un monde qui se déshumanise, on a besoin d’amour ».

Cette fresque intime sur l’acceptation de soi et de la différence ne pouvait que nous toucher, d’autant plus lorsqu’on sait qu’elle est inspirée de la vraie vie d’une des premières femmes à barbe de France, Clémentine Delait (1865-1939). « Ce visage féminin avec une barbe me fascinait. J’avais des photos, un regard, un mystère à explorer. Je savais qu’elle avait refusé de devenir un banal phénomène de foire mais avait au contraire voulu être ’dans la vie’, avoir une vie de femme », poursuit la cinéaste au Festival de Cannes.

@lehuffpostfr On a vu « Rosalie » avec Nadia Tereszkiewicz #cannes2023 #filmtok #femmes ♬ Epic Music(863502) - Draganov89

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