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Retraites: le gouvernement évite de peu la censure, mais n'échappe pas à la crise politique

La première ministre Élisabeth Borne à l'Assemblée nationale à l'occasion des votes des motions de censure par les députés, le 20 mars 2023. - BERTRAND GUAY / AFP
La première ministre Élisabeth Borne à l'Assemblée nationale à l'occasion des votes des motions de censure par les députés, le 20 mars 2023. - BERTRAND GUAY / AFP

À neuf voix près, la motion de censure transpartisane contre l'utilisation du 49.3 par le gouvernement a été rejetée par l'Assemblée nationale. Résultat, la réforme des retraites est adoptée, et le gouvernement évite le renversement mais n'échappe pas pour autant à la crise politique.

C'est d'abord le constat de l'opposition, qui dénonce l'illégitimité du gouvernement d'Élisabeth Borne après que 278 députés ont voté la motion de censure.

"Il n'aura donc manqué que neuf voix à cette motion de censure pour faire tomber ce gouvernement et sa réforme" a commenté Mathilde Panot, présidente du groupe La France insoumise à l'Assemblée quelques minutes après le résultat du vote.

"Neuf voix avec un gouvernement qui est d'ores et déjà mort aux yeux des Français, qui n'a plus aucune légitimité et une Première ministre qui n'a ni légitimité ni pouvoir pour continuer son action et qui doit évidemment démissionner en emportant sa réforme avec elle" a-t-elle continué, estimant que "le pays continue à s'enfoncer dans une crise politique que Macron a lui même créée".

"9 voix ne peuvent pas cacher la misère démocratique sous le tapis"

Même son de cloche du côté de la cheffe des députés du Rassemblement national Marine Le Pen.

"Politiquement, le président ne peut pas faire comme s'il ne s'était rien passé, il doit tenir compte de ce résultat et très certainement remplacer madame Borne, s'il ne le fait pas (...), la gifle sera double pour le peuple français" a-t-elle commenté.

Du côté des Républicains, dont 19 députés ont voté la motion de censure contrairement aux consignes des chefs du parti, Aurélien Pradié a aussi dénoncé "le problème de légitimité du président" qui "ne peut pas rester spectateur de cette situation" et évoqué une crise politique qui dure "depuis plusieurs semaines".

"Ce sont simplement neuf voix qui maintiennent le gouvernement, et ça ne peut pas cacher toute la misère démocratique sous le tapis, on voit bien à quel point derrière il y a des plaies intenses et qu'au fond cette crise politique que nous connaissons depuis plusieurs semaines (...) c'est la conséquence de semaines, de mois, d'années, durant lesquels le peuple français s'est senti méprisé", a-t-il déclaré au micro de BFMTV.

"Une crise politique profonde"

Hormi l'opposition, le sociologue et directeur d'études à l'Ecole des Hautes Etudes en sciences sociales (EHESS) Michel Wieviorka parle ausi d'une "crise politique profonde" et une "crise institutionnelle".

"Même si le gouvernement retire sa réforme, et que le pays s'apaise, on n'aura rien réglé du tout" a-t-il jugé, estimant que "les politiques" devraient penser "au-delà de ce moment précis qui est un moment de grande crise et crispation".

"Qui peut croire qu'un autre gouvernement que celui de madame Borne apaisera le pays et nous amènera vers des lendemains qui chantent?" a fini par questionner le sociologue.

Une future prise de parole de Macron?

Alain Duhamel, éditorialiste politique sur BFMTV, a de son côté évoqué non pas "une crise institutionnelle", mais "une vraie crise politique" et même "une impasse politique", "sans véritable précédent".

"Tout texte présenté par le gouvernement va se heurter à une obstruction systématique" a-t-il commenté, estimant qu'une dissolution de l'Assemblée ne serait pas "une solution durable".

Selon lui, la Première ministre "apparaît en sursis" et c'est au président de la république de faire preuve "d'initiative".

"La prochaine étape politique, c'est forcément une initiative d'Emmanuel Macron qui ne peut pas être simplement une prise de parole".

Pour le moment, Emmanuel Macron a seulement prévu de réunir Elisabeth Borne et plusieurs ministres mardi matin et de rencontrer les parlementaires de la majorité à l'Elysée dans la soirée.

Article original publié sur BFMTV.com