Retraites : cheminots, enseignants, policiers... Édouard Philippe ne convainc pas

Le Premier ministre, Édouard Philippe, a détaillé la réforme des retraites lors d'un discours ce 11 décembre. Mais il n'a pas convaincu toutes les professions.
Le Premier ministre, Édouard Philippe, a détaillé la réforme des retraites lors d'un discours ce 11 décembre. Mais il n'a pas convaincu toutes les professions.

Le discours tant attendu d’Édouard Philippe au sujet de la réforme des retraites n’a pas vraiment convaincu. Les syndicats ne comptent pas arrêter la mobilisation.

Le Premier ministre Édouard Philippe a dévoilé, ce 11 décembre, les contours de la future réforme des retraites. Pendant une heure, il a donné les détails des derniers arbitrages sur ce sujet très controversé.

Et il n’a visiblement pas vraiment convaincu. “On n’avait pas d’espoir, donc ces annonces étaient malheureusement attendues”, nous décrit Yves Lefebvre, secrétaire général du syndicat Unité SGP Police FO, “la ligne rouge avait déjà été franchie et elle l’est encore”. Selon lui, le discours du Premier ministre était “long, approximatif” et il n’a pas levé le voile sur tout. “Et quand c’est flou, c’est qu’il y a un loup !”, redoute-t-il.

Les enseignants, pas rassurés

Du côté des enseignants, on n’est pas beaucoup plus rassuré. “Ces annonces ne lèvent pas les inquiétudes, elles les aggravent”, entame Frédérique Rollet, secrétaire générale de SNES-FSU. Pour tenter d'apaiser la colère du corps enseignant, qui redoutent de perdre gros avec le calcul des retraites sur l’ensemble de la carrière et non plus les six derniers mois, le Premier ministre a promis une revalorisation des salaires. “Pour qui ? Comment ?” s’interroge Frédérique Rollet, qui rappelle que la perte de pension, avec la réforme, est estimée entre 300 et 800 euros pour sa profession. “Nous, on pense que ça va aboutir à une diminution des retraites pour tout le monde”.

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Les étudiants en colère

À l’Unef, l’un des principaux syndicat étudiant, le discours du Premier ministre n’a pas calmé la colère. “Ces annonces ne répondent pas au problème… elles nous convainquent de descendre encore plus dans la rue”, décrit Mélanie Luce, la présidente. “En fait, on nous annonce une clause du grand-père non-assumée”, estime-t-elle. “La première génération concernée, celle de 1975, ne le sera que partiellement, mais ensuite plus on est jeune, plus on est touché par cette réforme”, décrit la présidente de l’Unef, qui regrette aussi la présentation d’un âge pivot “pas vraiment assumé”.

Elle balaie l’argument d’Édouard Philippe précisant que chaque heure travaillée sera comptée, même pour les étudiants qui ont un emploi à temps partiel. “Ceux dont le travail était déjà pris en compte sont les grands perdants. Car ils cotisent déjà des annuités, mais comme jusqu’ici la retraite était calculée sur les 25 meilleures années, ces bas salaires n’étaient pas pris en compte. Avec la réforme, ils seront perdants”, argue-t-elle. Les revendication de l’Unef sont simples : le retrait total de cette réforme.

Une détermination intacte chez Sud Rail

Chez Sud Rail, la détermination est intacte. “Contrairement à ce que dit Édouard Philippe, le gouvernement cherche le rapport de force”, estime Fabien Villedieu, délégué syndical. “Il a mis un genou à terre grâce à la mobilisation. S’il a reculé une fois, c’est qu’il peut reculer encore”, poursuit-il. D’ailleurs, selon lui, si le gouvernement a lâché du lest sur les régimes spéciaux, c’est parce que les concernés se mobilisent plus.

Les femmes vraiment avantagées ?

L’argument avancé par le Premier ministre selon lequel la réforme permettrait une meilleure égalité entre les hommes et les femmes ne fait pas l’unanimité. Les primes - annoncées par le gouvernement afin de contrebalancer la perte engendrée par la prise en compte de toute la carrière et non des six derniers mois - “seront défavorables aux femmes, car elles font plus de temps partiel et moins d’heures supplémentaires”, décrit Frédérique Rollet.

Fabien Villedieu ne croit pas, lui non plus, que cette réforme sera particulièrement favorable aux femmes. Il évoque par exemple la question des reversions, dont bénéficient en grande majorité les femmes, à partir de 55 ans. Selon lui, après la réforme, elles ne pourront la toucher qu’à 62 ans.

Quelques avancées

Pour Yves Lefebvre, “certaines annonces ne sont pas inintéressantes”, comme la “gouvernance du régime des retraites” ou “l’indexation des pensions sur les salaires”, mais ce sont “les deux seuls points positifs”.

De son côté, Jacky Coulon, secrétaire général de l’Union Syndical des Magistrats, est satisfait que la réforme prenne en compte le calcul des primes et indemnités. Mais il redoute que cette “contrepartie” ne soit pas suffisante pour offrir des pensions égales à celles déjà existantes, puisque en parallèle, le calcul des retraites se fera sur l’ensemble de la carrière et non plus les six derniers mois.

La mobilisation continue

Si Fabien Villedieu, délégué syndical Sud Rail, reconnaît que le gouvernement a reculé sur certains points, il ne s’estime pas pour autant satisfait. D’ailleurs, la mobilisation ne risque pas de s’arrêter de si tôt. “On est combatifs, on est chauds bouillants”, prévient-il.

“On va durcir le mouvement”, assure de son côté le secrétaire général d’Unité SGP Police FO, qui demande par ailleurs à être reçu par le Premier ministre. L’Unef souhaite également “massifier la mobilisation”. Le syndicat étudiant a répondu à l’appel intersyndical pour la manifestation de ce jeudi. Le SNES-FSU, des enseignants du second degré, appelle à deux nouvelles journées de mobilisation, ce jeudi 12 décembre et le mardi 17 décembre, ainsi qu’à une reconduction de la grève.

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