Publicité

"Je repasse le bac", épisode 7: comment j'ai survécu à la philo

Une journaliste de BFMTV a décidé de repasser le bac et n'a pas échappé à l'épreuve de philosophie - BFMTV
Une journaliste de BFMTV a décidé de repasser le bac et n'a pas échappé à l'épreuve de philosophie - BFMTV

Ça y est, c'est fait. Cela faisait des mois que je m'y préparais, que je décortiquais concepts et notions, que je fichais, apprenais, révisais et répétais. Je m'étais même échauffée, en conditions réelles, au cours d'un bac blanc organisé à la rédaction de BFMTV. La messe est dite. J'ai donc rendu jeudi 17 juin à midi ma copie de de philo comme les quelque 726.000 candidats aux baccalauréats général et technologique.

Pas le droit à l'échec

Pour eux, l'épreuve était, disons, sans pression. En raison de l'année scolaire perturbée par le contexte sanitaire, des aménagements ont en effet été accordés. En clair, si la moyenne du contrôle continu s'avère supérieure à la note de l'épreuve finale, c'est la première qui sera conservée. Certains lycéens ont ainsi quitté l'épreuve au bout d'une heure, avouant avoir peu noirci de pages. Mais pour les candidats libres et individuels, pas le droit à l'échec.

Et je sais de quoi je parle. Lorsque j'ai passé le bac pour la première fois, en 2003, l'épreuve de philosophie a été un ratage absolu. J'étais alors en filière littéraire (qui a disparu avec la réforme du bac), coefficient 7, et j'ai écopé d'un 6/20. Une note déjà bien généreuse au regard de la nullité - le mot n'est pas trop fort - de la copie rendue. Des bonnes notes dans les autres matières m'avaient tout de même permis de décrocher le bac, sans quoi je n'aurais pas été bachelière cette année-là.

Je partais donc de loin et avec l'angoisse de répéter le même scénario d'il y a 18 ans. Clairement, j'avais toujours une affaire à régler avec la philo: j'ai rêvé, ou plutôt cauchemardé, régulièrement, pendant plus de dix ans, que je repassais le bac. Je n'irai pas non plus jusqu'à dire que c'est pour solder mes comptes avec la philo que je me suis relancée dans cette aventure - la mise en place de la réforme du lycée cette année pour les élèves de terminale étant la motivation première - mais j'avais de toute évidence une revanche à prendre.

Greta Thunberg et Retour vers le futur

J'ai choisi le sujet "Sommes-nous responsables de l'avenir?" après avoir tergiversé pendant près de 30 minutes avec "L'inconscient échappe-t-il à toute forme de connaissance?" Une hésitation qui m'a donnée des sueurs froides alors que l'horloge tournait et que j'étais incapable de me décider. Au final, j'ai tenu les quatre heures et j'ai rendu deux copies doubles. Je n'irai pas jusqu'à dire que j'ai gagné la bataille mais je pense avoir fait un peu mieux qu'en 2003.

J'ai réussi à construire un plan en trois parties répondant à une problématique axée sur les responsabilités individuelles, le temps et les conséquences du présent - je précise que ce n'est pas forcément ce qu'il fallait faire. Je ne suis pas certaine que ma réflexion soit complètement aboutie: clairement, pour moi, la dissertation de philosophie reste une technique et un art qui relèvent du mystère.

J'avoue que mon objectif était de placer les connaissances que je me suis difficilement implantées dans le crâne. Ce qui n'est pas forcément un gage de réussite mais je voulais éviter de reproduire le fiasco de 2003. J'ai cité Descartes, Épictète, Sartre, Augustin, Kant et Constant, mais aussi Greta Thunberg, Retour vers le futur, Minority report et Juste la fin du monde de Largarce (au programme des épreuves anticipées de français pour les élèves de première, épreuves que je repasse également, du coup autant rentabiliser).

Car en philo, tout est bon, nous expliquait le professeur de philosophie Gilles Vervisch. Pourvu que ça se justifie, évidemment. Un ancien bachelier nous racontait ainsi avoir cité une chanson de Mylène Farmer dans sa copie, sans savoir si cela lui avait apporté le point crucial sans lequel il n'aurait pas décroché son bac.

Verdict le 6 juillet

Après avoir échangé avec le professeur de philosophie Olivier Dhilly à la sortie de l'épreuve, je confirme que si ma dissertation n'est pas totalement aboutie, elle n'est pas non plus hors sujet. Dans la correction qu'il nous a livrée, Olivier Dhilly évoque le paradoxe de la question, puisque, en principe, l'être humain est responsable de ses actes présents ou passés. Être responsable de l'avenir signifierait donc "répondre de quelque chose que l'on ignore et qui n'est pas encore", explique-t-il. Ce que j'ai évoqué dans ma deuxième partie.

Olivier Dhilly, auteur de Philosophie - La boîte à outils, poursuit la réflexion autour d'un nouveau rapport à l'avenir, "d'une nouvelle éthique de responsabilité à l'égard des générations futures", ajoute l'enseignant. Ce que j'ai tenté d'aborder, plus ou moins finement, dans ma troisième partie avec l'évocation du changement climatique et de la militante écologiste Greta Thunberg.

Alea jacta est. Quoi qu'il en soit, je ressens une impression de soulagement, entre la satisfaction de l'alpiniste qui vient de gravir un sommet et la légèreté de celui ou celle débarrassé d'un poids. Verdict avec les résultats du bac le 6 juillet.

Pour lire les précédents épisodes de la série, c'est ici. Le premier: "J'ai décidé de repasser le bac, 18 ans après l'avoir eu". Le second: "comment concilier reprise d'études et vie professionnelle". L'épisode 3: "comment se préparer au grand oral". Le quatrième épisode: "l'oral et l'écrit de français". L'épisode 5: "comment j'ai découvert que j'avais beaucoup trop bossé". Et le sixième: "à quelques jours de l'épreuve, l'angoisse de la philo".

Article original publié sur BFMTV.com