Sur les réseaux, des femmes noires témoignent du cyberharcèlement qu’elles subissent et demandent des changements
CYBERHARCÈLEMENT - « Il y avait une pétition pour que je meure parce que j’étais trop noire. » Depuis dimanche 18 août, les témoignages de femmes noires victimes de cyberharcèlement affluent sur X, sous le hashtag #AntiHSM (Anti Harcèlement Sexuel, Misogyne et Misogynoir). Un mouvement de libération de la parole qui a été lancé par un collectif de 14 femmes noires pour dénoncer la violence qu’elles subissent au quotidien sur les réseaux sociaux.
En deux jours seulement, le hashtag a recueilli plus de 10 000 tweets, souligne Perle Vita, militante afro féministe et cofondatrice du mouvement #AntiHSM sur X.
Parmi les milliers de témoignages de femmes, de très nombreuses captures d’écran d’insultes et de menaces mettent en lumière le cyberharcèlement. Et plus spécifiquement les attaques relevant de la « misogynoir », un terme qui désigne la double discrimination, sexiste et raciste, dont sont victimes les femmes noires.
C’était en 2015, Aïcha s’est donné la mort à cause du cyberharcèlement. Certaines peuvent témoigner, d’autres ne sont plus là pour le faire. La haine en ligne brise des vies. Mobilisons-nous, dénonçons ces pratiques et soutenons les victimes… #AntiHSM https://t.co/RAmSgRzwYF
— BAMAKOSOLDAT (@bvmakosoldat) August 19, 2024
Parce que j’ai défendu les femmes de ma communauté je me suis mangé un sondage de violeurs 🤡 #antiHSM pic.twitter.com/XaA1TPEFsm
— 𝕱𝖗𝖊́𝖉𝖊́𝖗𝖎𝖈𝖐𝖆🎀 (@frederickadolls) August 18, 2024
Si un jour j’ouvre ma gueule. Dites vous qu’ils m’ont harcelé juste parce que je suis allez à un concert toute seule, et ils ont dit que c’était parce que je voulais finir dans les loges de l’artiste et que j’étais une escorte.. j’étais au concert de Beyoncé #antiHSM
— S (@queenoftsouth) August 19, 2024
J’ai été aussi bien victime de ces mecs là ! Ils m’en menacer de faire fuiter des sxtape , car j’ai défendue mes copains victimes de harcèlement sur ce réseau. C’est juste degeulass d’avoir ce genre de comportement que Dieu vous pardonne! #antiHSM pic.twitter.com/3O77iLxEFE
— MISS PARKER 🇯🇲🇩🇪🇨🇩 (@bobsyourdaddyy) August 18, 2024
Ils insultent une femme depuis 3 jours parce qu'elle dit qu'elle a confiance en elle sans rabaisser qui que ce soit. Et ils viendront nous dire qu'ils ne font rien de mal, que ce sont juste des "petites vannes" #antiHSM https://t.co/iVLIXj3BfS
— getoswife | debyy (@itgirlkaya) August 20, 2024
Des campagnes de harcèlement organisées sur certains réseaux
Au-delà des messages préjudiciables, Perle Vita dénonce de véritables campagnes de cyberharcèlement organisées par des internautes, pourtant épargnés par la justice. C’est cette expérience, subie par une consœur de la militante, qui a conduit au lancement du hashtag. « Des images d’elle se sont retrouvées sur un groupe Telegram avec plus de 3 000 personnes. »
Un phénomène qu’elle décrit comme courant et qu’elle attribue à la montée du « masculinisme » sur les réseaux sociaux. Cette idéologie antiféministe se traduit notamment par le harcèlement systématique des femmes qui s’expriment sur la toile. « Cela peut commencer par un simple désaccord, puis les harceleurs se regroupent et menacent de mettre ta photo sur certains sites… Ils trouvent même des moyens de trouver ton adresse, ton numéro, ou des médias intimes. »
Le collectif souhaite aller plus loin que simplement libérer la parole des victimes et dénonce l’absence de régulation de certains réseaux sociaux. « Un hashtag, ça ne sauve pas des vies », martèle Perle Vita, qui demande plus de législations autour de la messagerie Telegram. « Les témoignages qu’on a reçus parlent de l’utilisation de hackeurs étrangers pour se procurer les photos intimes de certaines femmes, ou la création de deepfakes utilisant leurs images », s’insurge la militante.
" Ils payent des hackeurs étrangers pour avoir accès illégalement aux mémories snapchat et aux photos icloud de leurs victimes."
- Intervention d'une des co-fondatrice du mouvement ANTIHSM lors du space #AntiHSM x #NayNayFM— ANTIHSM (@ANTIHSM) August 19, 2024
Des plaintes pas prises au sérieux par les autorités
Selon Perle Vita, le problème est pourtant loin d’être pris au sérieux par les autorités, malgré les conséquences réelles sur la vie des victimes. La militante se dit « très choquée » par certains témoignages, dont celui d’une jeune femme ayant du « changer deux fois de lycée », ou d’une autre qui a « déménagé trois fois ».
Si Perle Vita se décrit comme « pessimiste », elle se félicite de l’ampleur du mouvement lancé par le hashtag. « On ne s’attendait pas à un tel retentissement », confie-t-elle, avant de lancer un « merci » à toutes celles qui ont eu le courage de parler. Car sortir du silence n’est pas sans risque, et peut même intensifier le harcèlement subi. Le hashtag vise donc à créer un espace « de solidarité, de force et de résilience » pour toutes les femmes victimes.
Communiqué officiel. #ANTIHSM. pic.twitter.com/UWHsnbh8RC
— ANTIHSM (@ANTIHSM) August 19, 2024
Avec l’aide de l’association StopFisha, luttant contre le cybersexisme, le mouvement souhaite aussi accompagner les victimes en les prenant en charge, en compilant des listes de commissariats « safe », ou en proposant des plaintes groupées. Un premier pas et une prise de conscience, avant des actions politiques concrètes, espère Perle Vita.
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