Réforme des retraites : au Sénat, le « CDI seniors » signe une première défaite pour le gouvernement

Première défaite au Sénat pour le gouvernement sur les retraites, avec le « CDI seniors » (photo de Attal et Dussopt prise le 2 mars 2023)
Première défaite au Sénat pour le gouvernement sur les retraites, avec le « CDI seniors » (photo de Attal et Dussopt prise le 2 mars 2023)

POLITIQUE - Un premier revers au Sénat. La Haute assemblée, dominée par la droite, a adopté ce lundi 6 mars la création d’un nouveau type de contrat à durée indéterminée, contre l’avis du gouvernement et malgré l’opposition de la gauche. Ce CDI de « fin de carrière » a pour objectif de favoriser le recrutement de salariés âgés d’au moins 60 ans.

Les sénateurs ont adopté par 202 voix contre 123 un amendement en ce sens porté par les rapporteurs Les Républicains René-Paul Savary et Élisabeth Doineau (centriste) au projet de réforme des retraites, dont l’une des mesures principales, le recul de l’âge de départ, fait planer un risque sur l’emploi des travailleurs les plus âgés. La France est déjà en dessous de la moyenne européenne pour l’emploi des 55-64 ans (56 % contre 60,5 %).

Avec ce nouveau « CDI seniors », l’employeur serait exonéré de cotisations famille. Il pourrait mettre un terme au contrat en plaçant à la retraite le salarié qui remplit les conditions pour bénéficier d’une retraite à taux plein. Il ne serait donc pas tenu de le conserver jusqu’à ses 70 ans, ce qui représente aujourd’hui « un frein à l’embauche de seniors », selon les rapporteurs.

Le gouvernement s’inquiète du coût

« Les outils actuels d’emploi des seniors ne sont pas suffisants », a notamment affirmé René-Paul Savary au cours des débats. Le rapporteur a également précisé que l’amendement avait été rédigé « sur proposition de nombre de partenaires sociaux », à qui il reviendrait de définir les modalités d’application, branche par branche.

Le ministre du Travail Olivier Dussopt avait, de son côté, donné un avis « défavorable » à ce nouveau CDI en interrogeant son « ciblage ». « Je crains un effet d’aubaine qui mène notre branche famille dans le rouge », a de son côté déclaré le ministre des Comptes publics Gabriel Attal. « 100.000 CDI » sont signés chaque année pour des salariés de plus de 60 ans, a-t-il exposé. Si tous étaient signés avec le nouveau contrat, le coût est estimé à « 800 millions d’euros pour la branche famille ». Et pourrait même atteindre jusqu’à « 2,2 milliards d’euros » en cas d’effet d’aubaine.

En réponse, le chef de file des sénateurs Les Républicains Bruno Retailleau a « contesté formellement » le coût avancé, soulignant que cet amendement « révèle l’un des plus grands enjeux de cette réforme ». « À quoi servirait-il de reculer l’âge légal de départ à la retraite si on ne fait rien sur l’emploi des seniors ? », a-t-il interrogé dans l’hémicycle.

« C’est une commande directe du Medef », a pour sa part dénoncé le socialiste Yan Chantrel quand sa collègue Monique Lubin a renchéri : « On ne comprend pas pourquoi on est toujours obligé de faire des cadeaux aux entreprises pour qu’elles recrutent des gens. »

Il s’agit d’une première défaite de taille pour le gouvernement au Sénat, contraint de compter sur la chambre haute, à majorité de droite, pour faire adopter son texte. Avant cela, les choses se passaient plutôt bien pour l’exécutif. Un peu plus tôt, les sénateurs ont notamment approuvé la création d’un « index senior » dans les entreprises, sur la place des plus âgés, mais uniquement pour celles comptant plus de 300 salariés. Un dispositif porté par le gouvernement, mais rejeté par l’Assemblée nationale en première lecture.

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