Qui est Hugo Hay, l'athlète olympique qui juge qu'"Emmanuel Macron est hors-sol" ?

Le discours sans concession du spécialiste du 5 000 m détonne dans le paysage souvent très policé du sport de haut niveau.

Hugo Hay n'a pas hésité à tacler le président de la République, qu'il juge "hors-sol". (Photo : Martin BERNETTI / AFP)

Pas question pour lui de museler ses convictions politiques. Qualifié pour la finale du 5 000 m des Jeux Olympiques (JO) de Paris, qui se déroulera ce samedi 10 juillet au Stade de France, l'athlète Hugo Hay ne s'est pas seulement fait remarquer, ces derniers jours, par ses performances sportives.

Mardi 6 août, le jeune homme âgé de 27 ans s'est en effet exprimé dans les colonnes du journal L'Humanité, fustigeant notamment la récupération politique des JO à laquelle se livre selon lui le président de la République. "Emmanuel Macron est hors-sol et j’ai l’impression que son entourage le laisse sur son piédestal, dénonce le fondeur. Je voudrais lui dire que ce ne sont pas ses Jeux, mais ceux des athlètes."

"Et surtout, qu’en bas, ça gronde, qu’il faut écouter les demandes de justice sociale, la colère du peuple qui se prive, a du mal à remplir son frigo, et se fait rembarrer quand il manifeste contre la réforme des retraites", ajoute Hugo Hay. Dans un contexte de crise sociale et politique, l'athlète refuse que ces JO constituent une diversion, un moyen pour le chef de l'Etat de fuir ses responsabilités.

"J’étais très énervé par son histoire de 'trêve politique', de balayer la question de nommer une Première ministre de gauche, et aussi quand il a dit que Netanyahou était le bienvenu à Paris", confirme le natif de Bressuire, dans les Deux-Sèvres. Si ces déclarations détonnent dans le microcosme souvent très aseptisé du sport de haut niveau, elles n'ont rien de surprenant dans le cas de Hugo Hay.

Issu d'une famille de passionnés de course au pied (son père est notamment un spécialiste du marathon), le Bressuirais a logiquement débuté l'athlétisme dès l'âge de 8 ans. Au sein du club local, le Sèvre Bocage AC, il démontre un talent précoce et s'installe parmi les meilleurs espoirs français du cross-country. Parallèlement, son parcours scolaire est brillant et Hugo Hay décroche en 2015 un bac ES avec mention "très bien".

Il choisit ensuite d'entamer une licence de journalisme, tout en poursuivant sa carrière d'athlète dans les catégories de jeunes. Vice-champion d'Europe espoirs de cross-country en 2017, il remporte la médaille de bronze lors de l'édition suivante. Au cours de cette même année 2018, il décroche son diplôme à l'Ecole supérieure de journalisme de Lille.

A partir de 2019, son passage dans la catégorie élite le pousse toutefois à se concentrer sur sa carrière sportive. Passé à la piste, il crève d'ailleurs immédiatement l'écran en décrochant le titre de champion de France du 5 000 m à Saint-Etienne. L'année 2020, marquée par le contexte très particulier de la pandémie de Covid-19, est moins aboutie pour le Bressuirais, mais ce dernier reprend son ascension dès 2021.

Sacré cette année-là champion de France du 5 000 m, mais aussi champion de France (en salle) du 3 000 m, il se qualifie fort logiquement pour ses premiers JO, l'aboutissement de toute une carrière. "C'est le Graal sportif", dira-t-il notamment en mars 2024 à propos de cet événement. A Tokyo, sa première expérience olympique se solde toutefois par un échec, avec une élimination lors des séries du 5 000 m.

Hugo Hay poursuit ensuite sa domination sur le plan national, avec un nouveau titre de champion de France du 5 000 m en 2022. Touché par un Covid long en fin d'année, il connaît toutefois un début de saison 2023 beaucoup plus compliqué, avant de renaître de ses cendres et de signer, lors d'un meeting en Belgique, la meilleure performance de sa carrière sur 5 000 m (et la troisième meilleure performance française de tous les temps sur cette distance).

Son chrono canon (13 min 2 s 62) lui permet ainsi d'atteindre les minima requis pour les prochains Championnats du monde, mais aussi et surtout ceux des JO de Paris. Qualifié depuis plus d'un an, Hugo Hay a donc eu tout le loisir de focaliser sa préparation sur ces Jeux Olympiques à domicile. Dans la discipline hyper concurrentielle qui est la sienne, le fondeur s'est fixé pour objectif de participer à la finale et d'entrer dans le top 10.

En décrochant ce mercredi son billet pour la finale du 5 000 m, le jeune homme a donc rempli une partie du contrat, mais il s'en est fallu de peu pour que sa série se termine très mal. A l'approche de l'arrivée, Hugo Hay a en effet été pris dans un accrochage dans le peloton de tête, qui a eu pour conséquence la chute du Britannique George Mills, fils de l'emblématique footballeur Danny Mills.

"Je ne sais pas ce qui s'est passé, a ensuite assuré le Français, cité par L'Equipe. Je n'ai rien senti du tout. J'étais étonné que George (Mills) vienne me voir après la course. Le dernier 400 m, c'était une vraie boucherie. J'ai senti comme d'habitude quand ça frotte. Je me suis retourné, il n'y avait plus personne. (...) On est coude contre coude, je pousse un peu mais il n'y a rien. On est à des vitesses très élevées et donc le moindre contact est impressionnant."

Considérant eux aussi que Hugo Hay n'avait pas commis de faute majeure, les juges ont validé sa qualification pour la finale de samedi. En attendant cette apothéose, le Bressuirais fait donc plutôt la une pour ses déclarations au sujet du président de la République. Ce discours très engagé politiquement ne surprendra d'ailleurs aucunement les personnes suivant le fondeur sur ses différents réseaux sociaux.

Depuis plusieurs années, Hugo Hay n'a en effet jamais cherché à cacher ses opinions politiques, solidement ancrées à gauche. "J’ai une petite communauté sur les réseaux sociaux, autant que ça serve à essayer de sensibiliser des gens sur l’écologie, la justice sociale, assume le spécialiste du 5 000 m, cité par Le Parisien. Ce n’est pas parce que je suis athlète de haut niveau que je dois fermer ma gueule."

S'il avait lui même évoqué sur X un "devoir de réserve" à l'approche des JO, Hugo Hay est cependant resté fidèle à ses convictions, comme le prouve cette interview au vitriol dans les colonnes de L'Humanité, mais aussi son soutien à la cause palestinienne, affiché discrètement dans le cadre des JO, par le biais... d'un pin's.