Qu'est-ce que l'article 38 du Sénat, que la droite pourrait utiliser pour accélérer les débats sur les retraites?
La réforme des retraites aura-t-elle le temps d'être adoptée au Sénat? C'est l'un des enjeux majeurs de l'examen du texte dans la chambre haute, qui a débuté ce jeudi et doit se terminer le dimanche 12 mars. La droite, majoritaire au Palais du Luxembourg, pousse en ce sens, refusant que se reproduise le scénario de l'Assemblée nationale, où seuls les deux premiers articles du projet de loi ont pu être votés.
Avant même le coup d'envoi des échanges en séance publique, la majorité sénatoriale a adressé des messages à ses opposants, au cas où ils seraient tentés de reprendre la stratégie des insoumis qui ont fait patiner l'adoption du projet de loi à l'Assemblée nationale. "S'il devait y avoir une obstruction, on utilisera tout simplement tous les moyens constitutionnels et ceux de notre règlement", a prévenu Gérard Larcher, président du Sénat et issu du parti Les Républicains (LR), dans les colonnes du Figaro.
L'article 38 permet d'accélérer les débats
Même son de cloche pour Bruno Retailleau. Dans Le Parisien, le patron des sénateurs (LR), a estimé qu'il faudrait "bloquer le blocage" si les "oppositions étaient tentées par l'obstruction".
Pour l'instant, malgré des motions de rejet et une motion référendaire de la gauche, on en est loin. Au total, quelque 4700 amendements ont été déposés - la plupart par la gauche - sur ce texte au Sénat. À titre de comparaison, on en comptait environ 20.000 à l'Assemblée nationale avant l'ouverture des débats.
Néanmoins, si ceux-ci venaient à s'éterniser, la droite pourrait dégainer l'article 38 du règlement intérieur du Sénat, introduit en 2015 et jamais utilisé depuis. S'il ne fait pas partie de la Constitution comme les articles 49.3 et 47.1, cette disposition permet également d'accélérer les débats.
Elle stipule que "lorsqu'au moins deux orateurs d'avis contraires" sont intervenus dans la discussion générale d'un texte, sur un amendement, un article ou même l'ensemble du projet de loi, le président du Sénat, un président de groupe ou encore le président de la commission concernée par le texte, peut proposer la clôture, entraînant ainsi un vote à main levée des sénateurs.
"Problème constitutionnel"
Son utilisation serait "vraiment un couperet terrible", a dénoncé Patrick Kanner sur Public Sénat ce vendredi. Pour le président du groupe de sénateurs socialistes, le recours à cet article poserait "un problème constitutionnel".
"On considère un pour et un contre", a-t-il exposé, avant de souligner que cela s'applique "quelle que soit la diversité potentielle des pours et des contres." Et de questionner:
"Qui est-ce qui parle pour le contre? C'est un socialiste? C'est un vert? C'est un radical?"
De son côté Bruno Retailleau a tenu à rappeler auprès de France Info que "le règlement" du Sénat "a été approuvé par le Conseil constitutionnel. Tout en considérant que "l'obstruction est un dévoiement".