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C’est quoi, ce Tafta qu'Obama défend si ardemment durant sa tournée européenne ?

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(Photo : JOHN MACDOUGALL / AFP)

Ce lundi 25 avril s’ouvre le treizième cycle de négociations du traité de libre-échange transatlantique. Actuellement en visite en Allemagne, le président américain Barack Obama espère pouvoir conclure avant la fin de son mandat l’accord en cours de négociation entre l’Union européenne et les Etats-Unis. Mais cache ce mystérieux traité qui couvrirait près de la moitié de l'économie mondiale ?

Ce lundi 25 avril s'ouvre à New York un nouveau cycle de tractations, le 13ème, entre la Commission européenne et le Département du commerce américain. Le sujet du débat ? Il s’agit du prochain traité de libre-échange transatlantique aux multiples acronymes anglais (TAFTA - Trans Atlantic Free Trade agreement ; TTIP - Transatlantic Trade and Investment Partnership) ou francophones (PTCI - Partenariat transatlantique sur le commerce et l’investissement).

Les négociations se font à huis clos entre la Commission européenne et le Département du commerce américain. Pendant ce temps, les représentants nationaux sont tenus à l’écart de discussions se déroulant dans la plus stricte confidentialité entre une poignée de négociateurs, experts non-élus et lobbyistes invités. Initialement, ce cycle de négociations devait se terminer en 2015, mais plusieurs blocages politiques et citoyens l’ont repoussé à 2016, voire 2017. Et si Barack Obama, soutenu par la chancelière allemande Angela Merkel, souhaite accélérer le mouvement, la France, elle, traîne des pieds.

Pourquoi tant d'empressement ? L'enjeu majeur du Tafta est de taille : il faut contenir la Chine. Il ne reste plus grand-chose à négocier entre l'Europe et les Etats-Unis en matière de droits de douane, depuis les accords du Gatt (accord général sur les tarifs douaniers et le commerce) en 1994. Le principal enjeu - officiellement - est d'établir les normes qui deviendront les futurs standards mondiaux avant que la Chine ne le fasse. Ceci engendrera une harmonisation des législations et des règlementations par le bas, au détriment - c’est le risque - des choix collectifs des sociétés européennes.

Un texte jugé dangereux

Ce projet d’accord de libre-échange et d’investissement vise à libéraliser encore davantage les échanges commerciaux entre les États unis et l’Union européenne en démantelant les restes des droits de douane et en s’attaquant aux normes et régulations. Quels dangers risquons-nous ? Les normes françaises, plus strictes que celles américaines ou que les “normes internationales” (gaz de schiste, niveaux de pesticides, contamination bactérienne, additifs toxiques, OGM, hormones, etc.), pourraient être condamnées comme “barrières commerciales illégales”.

L’harmonisation attendue pourrait ainsi affecter, au-delà des biens marchands, le secteur des services et par extension les législations du travail jugées trop protectrices. Elle pourrait également s’étendre au champ de la protection des données personnelles et à des domaines comme l'énergie, l'eau et les services publics (le service des retraites, l’éducation, la santé…) que l’on pousserait alors à la privatisation. Autre point de débat : l’accord pourrait imposer une “obligation de neutralité économique”. Pour faire plus simple : au nom de la concurrence “libre et non faussée”, les services privés pourraient ainsi demander les mêmes subventions que les services publics.

Enfin, voici la mesure la plus controversée de ce traité : le mécanisme de règlement des différends investisseurs-Etats (RDIE), ou “Investor-State Dispute Settlement” (ISDS), aura pour objectif de régler les différends commerciaux découlant de la mise en place du TAFTA. Il pourra ainsi régler des litiges entre Etats et entreprises, obligeant les premiers, le cas échéant, à dédommager les seconds.

En plaçant les traités internationaux au-dessus des législations nationales, le commerce international pourrait simplement renier la souveraineté juridique des États. Un exemple ? La société américaine Lone Pine Resources réclame 250 millions de dollars d’indemnité au gouvernement canadien, car son moratoire sur la fracturation hydraulique pour l’exploitation des gaz de schiste contreviendrait à la liberté d’entreprendre garantie par l’ALENA (accord de libre-échange entre la Canada, les États-Unis et le Mexique).