Qu’imams les suivent

Le désengagement de l’Etat laisse les coudées franches aux pays étrangers. En première ligne : le Maroc, l’Algérie et la Turquie, qui envoient leurs propres cadres.

L’adage est connu. Qui paye commande. Il semble bel et bien se vérifier dans les mosquées de l’Hexagone. Ces derniers temps, les bailleurs de fonds étrangers qui financent la construction de nouveaux lieux de culte musulmans y imposent aussi leurs imams. Ainsi, à Blois et à Saint-Etienne, Rabat a envoyé ses propres cadres religieux dans des mosquées que le Maroc a très largement financées. A Cannes, à la mosquée de la Bocca, payée presqu’en totalité par un milliardaire saoudien, l’imam a été brutalement congédié en août, après un prêche jugé favorable à l’ancien président égyptien Mohamed Morsi, issu des Frères musulmans - guère en odeur de sainteté, c’est peu de le dire, dans la péninsule arabique. Nommer l’imam, c’est effectivement contrôler le discours religieux qui se tient dans le lieu de culte. C’est une question fondamentale pour l’avenir de l’islam de France. Un terrain de bataille pour les pays d’origine.

Diaspora. Sur les 1 800 imams en activité dans les mosquées françaises, à peine un tiers sont salariés. «La plupart sont des imams bénévoles qui viennent uniquement à la mosquée pour le prêche du vendredi», raconte Aldo Oumouden, porte-parole de la Grande Mosquée de Saint-Etienne. Peu de lieux de culte musulmans ont la capacité de salarier leur imam. Cela laisse le champ libre à l’Algérie, au Maroc et à la Turquie. A travers des accords signés avec Paris, ces trois Etats envoient des imams formés chez eux et rémunérés par leurs soins. Chacun bénéficie d’un contingent, négocié avec Paris : 150 imams pour la Turquie, 120 pour l’Algérie et 30 pour le Maroc. Pour l’avenir, de nouvelles stratégies se dessinent, essentiellement du côté de la Turquie et du Maroc, très préoccupés de garder la main sur leur diaspora.

Pour ces pays, l’objectif est de former eux-mêmes des jeunes musulmans, nés en France, (...)

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