Le procès Mazan relance le débat sur la définition pénale du viol et le consentement, selon Aurore Bergé

Aurore Bergé estime que « la question du consentement soit inscrite noir sur blanc dans le code pénal ».
ALAIN JOCARD / AFP Aurore Bergé estime que « la question du consentement soit inscrite noir sur blanc dans le code pénal ».

JUSTICE - Le procès des viols de Mazan, subis pendant dix ans par Gisèle Pelicot, droguée par son mari, démontre le besoin de définir « noir sur blanc » le consentement dans le Code pénal, a estimé Aurore Bergé ce jeudi 12 septembre sur RTL.

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La ministre démissionnaire chargée de l’Égalité femmes-hommes a notamment été interrogée sur les propos polémiques tenus mardi 10 septembre par Me Guillaume de Palma, l’un des avocats de la défense, qui avait déclaré que « sans l’intention de le commettre, il n’y a pas viol ». « Il y a viol et viol à partir du moment où il y a une intention coupable, à partir du moment où on arrive à rapporter la preuve du fait que la personne a commis des actes de viol avec conscience de commettre des actes de viol. Sinon il n’y a pas de viol », avait renchéri l’avocat face à la presse à la sortie du tribunal d’Avignon, où se tient depuis le 2 septembre le procès de Dominique Pelicot et des cinquante inconnus recrutés par ce dernier sur internet.

« Il faut qu’on change la loi »

« Cet avocat nous donne raison sur le fait qu’il faut qu’on change la loi et il faut que la question du consentement soit inscrite noir sur blanc dans le Code pénal, soit définie dans le Code pénal », a déclaré Aurore Bergé.

Gisèle Pelicot « avait bien du mal à pouvoir dire non puisqu’elle était droguée et qu’elle le dit elle-même, c’était une poupée de chiffon, c’était un objet sexuel livré à la disposition de dizaines et de dizaines d’hommes qui, pendant des années, lui ont fait subir les pires sévices », a-t-elle ajouté.

« Donc ce ne sont pas des actes sexuels qu’elle a subis. Ce sont des viols, ce sont des actes de torture, ce sont des actes de barbarie qu’elle a subis », a poursuivi la ministre démissionnaire chargée de l’Égalité femmes-hommes.

Pas de mention de consentement dans le droit français

Sa déclaration va dans le sens de ce que réclament de longue date les associations féministes, à savoir revoir la définition pénale du viol. À l’heure actuelle, le droit français définit le viol comme « tout acte de pénétration sexuelle » ou bucco-génital commis par « violence, contrainte, menace ou surprise », sans mentionner l’existence ou non du consentement. Cela va à rebours de certains autres pays européens, comme l’Espagne. En octobre 2022, le pays a adopté une loi - surnommée « Seul un oui est un oui » - qui introduit l’obligation d’un consentement sexuel explicite

En mars dernier, à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, Emmanuel Macron avait lui aussi exprimé son intention de faire évoluer la définition du viol en France en intégrant la notion de consentement. Si le chef de l’État a émis le souhait qu’une proposition de texte puisse voir le jour « d’ici la fin de l’année », cette perspective est devenue incertaine avec l’annonce surprise de la dissolution de l’Assemblée nationale début juin, les travaux en cours sur le sujet ayant été interrompus.

D’autant que ces appels au changement suscitent des réserves, notamment dans les rangs des avocats qui évoquent les difficultés d’appréciation de la notion de consentement. Dans un entretien accordé en 2023 au Point, les avocates Marie Dosé et Laure Heinich faisaient valoir que cette évolution desservirait les victimes en entraînant « de facto un renversement de la charge de la preuve, sur la victime ». De son côté, le ministre démissionnaire de la Justice Éric Dupond-Moretti avait appelé à la « prudence » face à une révision de la définition pénale du viol, mettant en garde contre un « glissement vers une contractualisation des rapports sexuels ».

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