Procès des enfants de l’ASE maltraités : les premiers témoignages effrayants des victimes

Deux victimes ont témoigné à la barre et raconté les sévices qu’ils ont subis. L’un des principaux prévenus, Bruno C. s’est aussi exprimé et a choqué.

JUSTICE - De premiers témoignages terrifiants. Deux premières victimes ont été entendues à la barre ce mercredi 16 octobre dans le cadre du procès des enfants de l’Aide sociale à l’enfance (ASE) maltraités. Un des principaux prévenus a également témoigné, provoquant le choc par son attitude désinvolte et irrespectueuse.

À Châteauroux, le procès des enfants de l’ASE placés illégalement et maltraités s’ouvre ce lundi

« Ce sont eux qui nous ont envoyés là-bas, c’était à eux de vérifier. C’est le premier fautif », a par exemple déclaré un jeune, particulièrement nerveux au moment de revenir sur une période de « violences ».

Il relate des épisodes réguliers de coups, d’insultes et d’humiliations, dont un étranglement si violent qu’il est devenu « bleu » et qu’il a vu des « étoiles ». « Tous les jours se ressemblaient », affirme-t-il encore. « Personne n’allait à l’école, on était tous forcés à travailler à la place ». Une situation de « maltraitance » également évoquée par une seconde victime à la barre.

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« J’avais prévenu plusieurs fois l’ASE que je ne voulais pas retourner là-bas, c’était horrible », détaille cet autre jeune. « Ils me tapaient quotidiennement » et « on nous menaçait de nous défoncer encore plus la “gueule” si on parlait ».

C’est l’hospitalisation d’un autre jeune, Mathias, en septembre 2017 pour « une chute à vélo », qui a entraîné l’éclatement de l’affaire. Après une semaine de coma, il a refusé de retourner chez son bourreau présumé, Julien M. Un signalement au parquet était alors effectué, mettant au jour des faits répétés commis entre 2010 et 2017.

L’un des principaux prévenus, Bruno C. a aussi témoigné ce mercredi. Sa prise de parole était particulièrement attendue. Il comparaît détenu et purge une peine pour des viols répétés sur sa fille. Lui a incriminé trois des mis en cause, Julien M. et ses parents, « réputés » violents, mais aussi l’ASE.

« Plusieurs fois, des gens de l’ASE nous ont dit “continuez, on a besoin de vous” », a répété, railleur, l’homme à l’épaisse barbe grise et aux cheveux touffus. Bruno C. a cofondé avec Julien M. la structure « Enfance et Bien-Être », à qui des dizaines de mineurs ont été confiés contre des sommes qui s’élèveraient à au moins 630 000 euros sur sept ans.

« J’avais déjà ma petite fille et besoin de personne d’autre »

Durant un interrogatoire de plusieurs heures, se vantant de ne plus « rien avoir à perdre », il a ironisé sur les déplacements réguliers « de chefs de service » parés de costumes à « 2 000 euros », qui les exhortaient à poursuivre leur activité. « Ils savaient tout. Pour eux, la réputation de Julien M. suffisait, c’était une institution cinq étoiles ».

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S’il a reconnu plusieurs faits de brutalité, dont des gifles, il a enchaîné les provocations, jusqu’à tomber dans l’ignominie lorsqu’on l’interrogeait sur ses déviances sexuelles, déclarant que certaines des filles placées « ne remplissaient pas ses critères » physiques. « J’avais déjà ma petite fille et besoin de personne d’autre ». Bruno C. aurait par ailleurs interdit certaines mineures de porter « des sous-vêtements » chez lui. Ce qu’il a nié, sourire aux lèvres.

Outre son attitude désinvolte, les déclarations de Bruno C. comme celles sur « ces gamines (qui) étaient de toute façon dans un système où tout était à fuir » et « qui devraient être suivies psychologiquement », ont accablé, parfois jusqu’aux larmes, des parties civiles déjà indignées par deux journées d’audience et une nouvelle matinée de terribles témoignages.

Dans ce procès, dix-huit personnes comparaissent jusqu’à vendredi, mais aucun responsable de l’ASE ne sera jugé.

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