Procès du 13-Novembre : une première journée marquée par les provocations de Salah Abdeslam

À deux reprises, Salah Abdeslam, seul membre encore en vie des commandos responsables des attaques du 13-Novembre, a provoqué la cour lors de ce premier jour de procès.

C'est l'accusé qui fait l'objet de toutes les attentions. En ce premier jour du procès des attentats du 13-Novembre, Salah Abdeslam s'est livré à une série de provocations, tentant d'instaurer un rapport de force avec le président de la cour d'assises spéciale qui le juge aux côtés de 13 autres accusés.

Dès le début de l'audience, Salah Abdeslam, qui venait de s'entretenir avec ses deux avocats, est invité par le président de la cour à décliner son identité, comme le veut l'usage. A cette question, le seul membre des commandos du 13-Novembre encore en vie a répondu en énonçant une profession de foi musulmane.

"Je tiens tout d'abord à témoigner qu'il n'y a pas de divinité à part Allah et que Mohamed est son messager", a-t-il déclaré après s'être levé et avoir enlevé son masque, dévoilant une barbe très fournie.

Abdeslam refuse de répondre aux questions

À cette déclaration, le président de la cour d'assises spéciale a coupé court. "On verra ça après", a rétorqué Jean-Louis Périès, poursuivant les questions habituelles posées aux accusés lors de l'ouverture d'un procès. Invité à énoncer l'état civil de ses parents, Salah Abdeslam a une nouvelle fois refusé de répondre, expliquant "le nom de mon père et ma mère n'ont rien à voir dans cette histoire".

Interrogé alors sur sa profession, Salah Abdeslam, polo noir et cheveux gominés en arrière, a dit "avoir délaissé toute profession pour être combattant de l'État islamique". "J'avais 'intérimaire' comme profession", a rétorqué le président de la cour d'assises, provoquant involontairement quelques rires dans la salle.

Incident d'audience

Au bref amusement a succédé rapidement la colère contre Salah Abdeslam, lorsque celui-ci s'est levé pour dénoncer avec véhémence ses conditions de détention. Cet incident de séance est intervenu après une suspension de l'audience. Elle avait été décidée quelques minutes plus tôt après le malaise de l'un des accusés du procès.

À la reprise, l'avocat de Farid Kharkhach a dénoncé le traitement de son client, fouillé à nu à deux reprises depuis le matin. Me Albéric de Gayardon expliquait que son client était psychologiquement affaibli quand Salah Abdeslam s'est levé, a enlevé son masque et pointé du doigt le président de la cour en hurlant.

"On est traités comme des chiens!", a-t-il crié, les yeux emplis de haine.

Alors que le président de la cour d'assises spéciale tentait de le couper, Salah Abdeslam a poursuivi: "Ici c’est très beau, il y a des écrans plats, de la clim, mais là-bas on est maltraités, on est traités comme des chiens." Les victimes dans la salle lui ont répondu: "Et nous? Il y a eu 130 morts! Salopard!"

Salah Abdeslam a continué: "Ça fait six ans que je suis traité comme un chien, je ne me suis jamais plaint parce que je sais qu'après on sera ressuscités et que vous devrez rendre des comptes", a-t-il encore dit. Le président a fini par l'interrompre, lui rappelant qu'"ici, on n'est pas dans un tribunal ecclésiastique, on est dans un tribunal démocratique".

"Une défense de rupture"

L'attitude de Salah Abdeslam au premier jour de ce procès fait penser à celle qu'il avait adoptée en février 2018 lors de son procès en Belgique pour la fusillade de Forest, quelques jours avant son interpellation. Devant la justice belge, il s'était simplement livré à un exercice de propagande, avant de refuser de comparaître. "Cet accusé-là a décidé de dire 'je ne reconnais pas l’autorité de votre juridiction', il fait une défense de rupture", a commenté sur BFMTV Me Antoine Vey, avocat qui a notamment défendu Abdelkader Merah.

Les victimes des attaques de Paris et de Saint-Denis disent qu'elles s'attendaient à ce type de provocation et n'attendent rien de la part de Salah Abdeslam. "Tout ce que pourra dire cet individu ne m'atteint pas, cette provocation me passe au-dessus, a confié sur notre antenne Patricia Correia, la mère d'une victime du Bataclan. Ce qui m'intéresse, c'est que la mémoire de tous ceux qui ont été arrachés à la vie (...) soit respectée et dure dans le temps. Lui, il peut dire ce qu'il veut, ça ne me touche pas du tout."

À l'ouverture du procès, qualifié de procès du siècle, le président de la cour s'est livré à un propos liminaire. "Historique et hors norme", ce sont les mots choisis par Jean-Louis Périès. "Ce qui importe, c'est aussi justement le respect de la norme, le respect des droits de chacun, à commencer par les droits de la défense", a fait valoir Jean-Louis Périès, appelant à garder comme "cap" "d'examiner les charges pesant à l'encontre de chacun et d'en tirer toutes les conséquences au plan pénal après avoir écouté chacun".

Article original publié sur BFMTV.com

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