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Présidentielle en Biélorussie: des milliers d'opposants dans la rue pour réclamer "la liberté"

La manifestation du 30 janvier 2020 à Minsk - Sergei GAPON / AFP
La manifestation du 30 janvier 2020 à Minsk - Sergei GAPON / AFP

A quelques jours seulement de l'élections présidentielle qui aura lieu le 9 août prochain, la situation est explosive en Biélorussie. En fonction depuis 1994 et la chute de l'URSS, le président Alexandre Loukachenko est de plus en plus discuté par une opposition galvanisée par l'arrivée de nouveaux visages.

Jeudi, ce sont des dizaines de milliers de partisans de sa grande opposante Svetlana Tikhanovskaïa, 63.000 selon l'organisation de défense des droits humains Vasnia, qui se sont retrouvés dans un parc de la capitale Minsk, en soutien à cette candidate inattendue pour le plus grand rassemblement d'opposants depuis au moins une décennie dans ce pays.

Le rassemblement s'est tenu malgré les pressions des autorités, qui accusent des opposants emprisonnés d'avoir voulu organiser des "émeutes" avec l'aide de paramilitaires russes.

Très forte mobilisation

Plus tôt dans cette même journée de jeudi, les autorités avaient accusé deux chefs de file de l'opposition incarcérés, Sergueï Tikhanovski, le mari de Svetlana Tikhanovskaïa, et Mikola Statkevitch, d'avoir cherché à organiser des "émeutes de masse" avant le scrutin du 9 août avec l'aide d'une société militaire privée considérée comme proche du Kremlin, Wagner.

Cette accusation est un nouveau rebondissement dans une campagne électorale mouvementée, marquée par une violente répression ayant visé manifestants et opposants.

Malgré cela, l'élection s'annonce épineuse pour le président Alexandre Loukachenko, au pouvoir depuis plus de 25 ans et qui fait face à une mobilisation inhabituellement forte de l'opposition.

Ingérence russe?

Mercredi déjà, les forces de l'ordre avaient arrêté 33 Russes présentés comme des "combattants" de Wagner cherchant à "déstabiliser" la Biélorussie. Ces allégations ont provoqué des échanges acerbes avec Moscou.

Alliés historiques, la Russie et la Biélorussie entretiennent des relations tendues depuis fin 2019, Alexandre Loukachenko ayant accusé la Russie de vouloir réduire son pays à l'état de vassal et de s'ingérer dans le scrutin du 9 août, ce que Moscou dément.

S'adressant à ses partisans, Svetlana Tikhanovskaïa a quant à elle accusé les autorités de "briser" la vie de son mari et des "autres prisonniers politiques" biélorusses, ajoutant que l'arrestation des paramilitaires russes était "effrayante".

"Personne ne croira que ces combattants nous ont été envoyés pour les élections. Qu'ils voulaient faire une révolution ici. Quelle révolution? Nous voulons la liberté", a-t-elle ajouté.

Un groupe de 200 hommes

Selon Andreï Ravkov, le secrétaire d'Etat du Conseil de sécurité bélarusse, les 33 hommes arrêtés mercredi appartiennent à un groupe de 200 personnes: "On cherche les autres, ils sont comme une aiguille dans une botte de foin".

La Russie a démenti toute entreprise de déstabilisation. "Il est évident que ça ne peut être le cas, la Russie et le Bélarus sont des alliés, les partenaires les plus proches", a réagi Dmitri Peskov, le porte-parole du Kremlin.

Dans un communiqué, la diplomatie russe a affirmé que ces hommes travaillaient pour une entreprise bélarusse et étaient en transit pour Istanbul. "Toute tentative de présenter ce qui s'est passé comme une ingérence extérieure dans les affaires de la république (bélarusse) est pour le moins ahurissante", peut-on y lire.

Wagner est régulièrement accusé de déployer des mercenaires à l'étranger - Ukraine, Syrie, Libye, République centrafricaine -, des interventions auxquelles la Russie ne veut pas être officiellement associée.

Les autorités biélorusses affirment que les suspects devaient déstabiliser le pays à l'occasion de la présidentielle, Alexandre Loukachenko, 65 ans, considérant que la Russie, son principal allié depuis 26 ans, soutient désormais ses adversaires.

Phénomène politique

Après avoir remplacé au pied levé son mari dans la course à la présidence, Svetlana Tikhanovskaïa est devenue contre toute attente un phénomène politique, dont les rassemblements attirent des foules jamais vues naguère dans le pays.

Elle s'est associée à Maria Kolesnikova, l'ex-directrice de campagne d'un autre opposant incarcéré, et à Veronika Tsepkalo, l'épouse d'un troisième détracteur du régime désormais en exil sur le territoire russe.

Cette dernière a annoncé jeudi l'interpellation de sa soeur et sa convocation par la police dans une enquête visant son mari, "des pressions politiques", selon elle.

Depuis son arrivée au pouvoir en 1994, jamais le président Loukachenko n'a semblé aussi contesté que pendant cette campagne électorale, galvanisée par l'arrivée de nouveaux visages.

S'il a par le passé accusé à de nombreuses reprises l'Occident de vouloir l'écarter, c'est la première fois qu'il s'en prend ainsi à la Russie et certains jugent que l'affaire est une mise en scène orchestrée par le pouvoir.

Article original publié sur BFMTV.com