Présidentielle américaine : avec Harris, l’argument de l’âge brandit par Trump se retourne contre lui

La campagne est passée d’un duel entre les deux plus vieux candidats de l’histoire à un duel entre un milliardaire quasi-octogénaire et une jeune sexagénaire.

La stratégie de Kamala Harris de s’attaquer à l’âge et la santé de Donald Trump est loin d’être un hasard dans cette fin de campagne électorale américaine.
SAUL LOEB / AFP La stratégie de Kamala Harris de s’attaquer à l’âge et la santé de Donald Trump est loin d’être un hasard dans cette fin de campagne électorale américaine.

ÉTATS-UNIS - Alors que l’Amérique s’apprêtait à choisir son président entre les deux candidats les plus âgés de l’histoire, Kamala Harris est venue bousculer le vieil ordre établi. La candidate démocrate qui a remplacé Joe Biden dans la course à la Maison Blanche fête d’ailleurs ce dimanche 20 octobre son soixantième anniversaire dans la dernière ligne droite de la campagne.

Présidentielle américaine : le renoncement de Joe Biden annoncé en direct par les chaînes télé américaines

Un anniversaire qui compte au moment où les questions d’âge et de santé occupent une place prédominante dans cette élection, allant jusqu’à pousser le président élu à jeter l’éponge à quelques mois du scrutin en raison des inquiétudes liées à son âge et ses facultés cognitives. Du jamais vu.

PUBLICITÉ

Sauf que ces derniers mois, la stratégie déployée par Donald Trump pour décrédibiliser Joe Biden et sa capacité à gouverner quatre ans de plus a désormais tendance à se retourner contre lui. C’est même une stratégie de dernière minute pour Kamala Harris.

« Instable et dérangé »

En faisant de cette question un axe important de la fin de campagne, c’est une curieuse inversion des rôles que donne à voir l’élection américaine. Qui bénéficie largement à la vice-présidente américaine. En même temps, Kamala Harris peut se le permettre. Atteignant tout juste les 60 ans, elle dispose d’un avantage certain comparé à Joe Biden. Et après avoir aidé à essuyer les plâtres après chaque nouvelle boulette du président en campagne, c’est elle qui attaque ouvertement Donald Trump sur ses capacités cognitives. Lui qui attaquait « Sleepy Joe » au moindre faux pas.

Dernier exemple en date ? Lors d’un meeting en Pennsylvanie mercredi 16 octobre. Elle a ainsi estimé que Donald Trump devenait « de plus en plus instable et dérangé » au moment où ce dernier enchaîne les sorties confuses et aléatoires.

Kamala Harris est plutôt légitime sur ce point : Donald Trump n’a que quatre ans de moins que Joe Biden. Et en cas de victoire le 5 novembre, il deviendra le plus vieux président américain à prêter serment, battant de quelques mois le record établi en janvier 2021 par… Joe Biden.

PUBLICITÉ

Pour les démocrates, tout argument est donc bon à prendre pour inverser les rôles et faire de Trump le vieil homme sénile qu’il disait voir en Joe Biden quelques mois plus tôt. Même Bill Clinton s’y met. Lors de la convention du parti démocrate cet été, l’ancien chef d’État américain de 1993 à 2001 a fait remarquer qu’il était « toujours plus jeune que Donald Trump ». Les deux hommes ayant 66 jours d’écart.

Kamala Harris peut aussi compter sur sa propre santé. Elle s’est d’ailleurs servie de son bilan de santé élogieux, rendu public par la Maison Blanche début octobre. Il affirme que la candidate, en « excellente santé », dispose de « la résistance physique et mentale nécessaire pour remplir les devoirs de la présidence » des États-Unis.

Des déclarations qui tranchent avec l’opacité entourant la santé de son rival. Kamala Harris a elle-même jugé que son aîné de 19 ans était « inapte à exercer ce mandat ». Il faut dire que les derniers détails sur la santé de Donald Trump s’appuyaient sur une lettre de son médecin personnel faisant état de résultats d’examens physiques dans la norme et de résultats de tests cognitifs « exceptionnels ». Sauf que ces résultats datent déjà de septembre 2023. Ce que le New York Times s’est permis de rappeler dans une récente enquête sur le manque de transparence entourant ses dossiers médicaux.

PUBLICITÉ

Épinglant avec acharnement chaque digression décousue de Donald Trump ces dernières semaines, Kamala Harris s’est encore illustrée lors d’une curieuse scène impliquant le comportement de Donald Trump lors d’une séance de questions-réponses avec des électeurs de Pennsylvanie à la mi-octobre.

Sur scène, le Républicain a interrompu la réunion (sans jamais la reprendre) pour écouter des chansons qu’il affectionne, offrant des images lunaires de lui, immobile durant de longues minutes. « J’espère qu’il va bien », s’était permis de commenter Kamala Harris avec ironie. « Trump semble perdu, confus et comme figé sur scène », avait préalablement commenté l’équipe de campagne de la démocrate.

Après avoir ouvertement milité pour le retrait de Biden, le New York Times soulignait dans un article paru en septembre que Donald Trump a lui aussi tendance à se perdre avec le poids des années. Enchaînant les confusions, les phrases inachevées et les explications hasardeuses, désormais parodiées et moquées par le camp démocrate.

Mais comme l’âge n’est pas considéré comme un sujet important par les électeurs de Donald Trump, il profite d’une forme physique suffisante pour enchaîner les meetings à travers le pays. Ce qui rappelle sa campagne de 2020 quand il avait utilisé cette stratégie pour court-circuiter les éventuelles critiques sur son âge. C’est ce que soulignait à l’époque le professeur de droit à l’Université d’Iowa Derek T. Muller dans une interview pour France Culture. « Donald Trump a mis en place une sorte de “mise en scène” pendant la campagne qui projette une image de santé physique. Même quand il a été malade du coronavirus, en quelques jours, il a fait des meetings constamment (...) comme si le virus ne l’affectait pas », expliquait-il

PUBLICITÉ

Quatre ans plus tard, un constat similaire peut d’ailleurs être dressé pour la campagne 2024, après les tentatives d’assassinat dont il a été victime. Au point d’avoir un rythme plus soutenu que celui de Kamala Harris. Un rythme effréné qui lui permet d’occuper l’espace. Au risque de la saturation... en théorie.

À voir également sur Le HuffPost :

Joe Biden raconte que Nancy Pelosi et les cadres démocrates ont précipité son éviction

Donald Trump propose de mobiliser l’armée pour faire face à la « gauche radicale » le jour de la présidentielle