Poussé par les sondages, Salvini réunit ses partisans à Rome
par Crispian Balmer
ROME (Reuters) - Matteo Salvini, ministre italien de l'Intérieur et chef de la Ligue, a réuni plusieurs dizaines de milliers de ses partisans samedi dans le centre de Rome, réussissant une démonstration de force qui matérialise la poussée de son parti d'extrême droite dans les sondages.
En plein conflit avec Bruxelles sur le projet budgétaire du gouvernement qu'il a formé avec le Mouvement 5 Etoiles, il a annoncé sous les vivats qu'il honorerait ses promesses d'accroître les dépenses publiques, prévenant qu'une politique d'austérité ne ferait qu'attiser les violences liées au mouvement des "Gilets jaunes" en France.
"Ceux qui sèment la pauvreté récoltent des manifestations", a-t-il lancé de la tribune installée sur la Piazza del Popolo (la place du Peuple).
"Si vous mettez en cause notre droit et notre tâche consistant à rétablir dignité, fierté, sécurité, retraites et emploi pour des millions d'Italiens, alors je vous le dis: nous ne ferons pas demi-tour", a-t-il poursuivi à l'adresse de ses partenaires européens.
Ce n'est pas la première fois que Salvini, qui a multiplié les polémiques avec la France depuis l'arrivée au pouvoir de la coalition italienne, début juin, notamment sur le dossier des migrants, fait allusion au mouvement des "Gilets jaunes" comme argument dans le débat en cours avec Bruxelles.
"Nous prenons soin de plusieurs millions d'Italiens oubliés pour que ce qui se passe en France ne se produise pas en Italie", a-t-il ainsi expliqué vendredi soir pour expliquer pourquoi le budget 2019 allait au-delà des engagements pris par les précédents gouvernements italiens en matière de déficit et de dette publics.
L'Union européenne, a-t-il dit samedi sur la place du Peuple, devrait se concentrer sur le soutien de la croissance économique plutôt que d'être obsédé par "les chiffres après la virgule", allusion à la bataille entre Bruxelles et Rome sur l'ampleur du déficit public de l'année prochaine, que le gouvernement italien a fixé pour l'heure à 2,4% du PIB.
"Quelqu'un a trahi le rêve européen, mais nous allons réinjecter du sang et des forces dans les veines d'une nouvelle communauté européenne", a-t-il poursuivi.
Salvini, qui a pris en charge la Ligue en 2013 quand le mouvement alors très régional ne pesait que 3% dans les urnes, l'a porté à 17% des voix lors des élections législatives du mois de mars dernier, une percée validant sa stratégie de le muer en un parti anti-immigration.
Depuis son arrivée au pouvoir, la Ligue a encore progressé et pèse aujourd'hui autour de 34% des intentions de vote, devant le M5S de Luigi Di Maio. Une progression qu'elle pourra mesurer le printemps prochain à l'occasion des élections européennes.
(Henri-Pierre André pour le service français)