Pourquoi les singes n’écriront pas l’œuvre de Shakespeare

C’est un théorème qui porte un joli nom : “paradoxe du singe savant”
– ou, pour les anglophones, infinite monkey theorem, “théorème du singe infini”.

Derrière cette formule se cache une expérience de pensée qui consiste à dire que, si on laissait un singe taper sur un ordinateur de manière aléatoire pendant une durée infinie, il finirait par écrire les œuvres complètes de Shakespeare. Par pur hasard.

Mais d’après le site de la BBC, une étude menée par deux chercheurs australiens et publiée dans la revue scientifique Franklin Open vient mettre à mal ce paradoxe.

Pour remettre en cause ce théorème d’après lequel une quantité infinie de temps peut rendre probable un événement hautement improbable, Stephen Woodcock et Jay Falletta se sont demandé ce qui se passerait si des limites généreuses mais finies étaient imposées aux singes dactylos, décrypte The Guardian.

“Pour faire ses calculs, l’équipe s’est fondée sur l’hypothèse selon laquelle un singe passerait environ trente ans à taper une touche par seconde sur un clavier comportant trente touches – les lettres de la langue anglaise et quelques signes de ponctuation courants”, explique le quotidien britannique “The Guardian”.. PHOTO New York Zoological Society/WIKIMEDIA

“Dans le scénario des deux chercheurs, la population mondiale actuelle de 200 000 chimpanzés environ taperait une touche par seconde, jusqu’à la fin de l’univers, dans environ 10100 ans (un 1 suivi de cent 0)”, résume le magazine scientifique britannique New Scientist.

“Ils estiment qu’il faudrait
à un seul chimpanzé
300 millions de frappes
aléatoires sur un clavier
pour écrire le mot ‘bananes’,
et la probabilité qu’un
de ces 200 000 singes
parvienne réellement
à ce modeste exploit
au cours de sa vie
ne serait que de 5 %.”

Le magazine scientifique britannique “New Scientist”

Une machine à écrire aux puces de Brooklyn, à New York, le 12 février 2011. 
“On a supposé que la ‘mort thermique’ de l’univers se produirait dans environ un gogol d’années – c’est-à-dire un 1 suivi de cent 0”, rappelle le quotidien britannique “The Guardian”.. PHOTO MARCUS YAM/THE NEW YORK TIMES
Une machine à écrire aux puces de Brooklyn, à New York, le 12 février 2011. “On a supposé que la ‘mort thermique’ de l’univers se produirait dans environ un gogol d’années – c’est-à-dire un 1 suivi de cent 0”, rappelle le quotidien britannique “The Guardian”.. PHOTO MARCUS YAM/THE NEW YORK TIMES

En outre, à mesure que la tâche se complexifie, les chances deviennent infinitésimales. Ainsi, “la probabilité qu’un seul chimpanzé écrive au hasard ‘Je chimpanzé donc je suis’ n’est que de 1 sur 10 millions de milliards de milliards”, étaye New Scientist.

Les œuvres complètes de Shakespeare (pièces, sonnets et poèmes) comprennent près de 885 000 mots. Il faudrait donc 107448366 frappes aléatoires des singes, ce qui nécessiterait bien plus de temps que la durée de vie prévue de l’univers, renchérit le magazine scientifique.

“Après avoir fait le calcul, aussi bien avec un seul singe qu’avec un nombre infini de primates, nous pouvons affirmer de manière catégorique que c’est impossible, poursuit Stephen Woodcock. Et même si chaque atome de l’univers était un univers en soi, cela n’arriverait pas.” Alors autant continuer à manger des bananes.—

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