Pourquoi la rentrée s'annonce à haut risque pour les députés de la majorité

Pourquoi la rentrée s'annonce à haut risque pour les députés de la majorité

Le mois de septembre prend des allures de terrain miné pour la coalition présidentielle. Après des débuts compliqués, les députés Renaissance (ex La République en marche) prennent leur marque et veulent imposer leur ton. Voici ce qui les attend à la rentrée.

• Du terrain pour convaincre sur le pouvoir d'achat

Pour la première fois depuis 20 ans, la session à l'Assemblée nationale reprendra le 3 octobre prochain. Le temps, donc, de laisser aux députés l'occasion de faire le service après-vente des premiers projets de loi votés à l'Assemblée nationale. Tout en se montrant au travail.

"On a été beaucoup dans l'hémicycle depuis notre élection. L'objectif du mois de septembre, c'est de faire du terrain, de la pédagogie, d'expliquer ce qu'on a voté", avance Hadrien Ghomi, député de Seine-et-Marne, auprès de BFMTV.com.

Les élus comptent bien gagner des points auprès des électeurs en détaillant le contenu de la loi pouvoir d'achat, votée dans l'hémicycle et qui concrétise plusieurs promesses du candidat Macron comme la revalorisation des retraites.

Cela sera-t-il jugé à la hauteur, face à une inflation au plus haut depuis 1987? En macronie, le risque de ne jamais en faire assez - et que les mesures à peine décidées apparaissent déjà datées à la rentrée - est dans toutes les têtes.

"D'une certaine manière, ce sera toujours insuffisant, on sera toujours en réaction. C'est pour ça qu'on veut avancer sur la question du travail qui nous semble la seule façon de répondre en profondeur", décrypte Aurore Bergé, présidente du groupe Renaissance.

• Avancer sur l'assurance chômage

Second chantier donc de la majorité annoncé par Olivier Dussopt dans les colonnes du Parisien le 26 juillet dernier: lier "les règles d'indemnisation" du chômage à "la situation du marché de l'emploi".

"Quand ça va bien, on durcit les règles", traduit sans ambages le ministre du Travail qui devrait annoncer les contours de la future réforme à la rentrée aux partenaires sociaux.

"Nous devons être davantage incitatifs sur le retour au travail, d'autant plus que le chômage est au plus bas. Le plein emploi est le premier levier pour le pouvoir d'achat", assume la députée et porte-parole du groupe Maud Bregeon.

Mais certains en interne renâclent, s'inquiétant d'un tempo mal choisi et du message envoyé.

"On une hausse des prix sans précédent, des Français qui ont du mal à boucler leur porte-monnaie. Je ne trouve pas vraiment que le moment pour taper sur les chômeurs soit bien choisi", analyse, remonté, un élu de l'aile gauche qui doute que la coalition présidentielle vote à l'unanimité le texte.

Les syndicats eux-mêmes ont déjà dit non. "Ce n’est pas le moment", a ainsi prévenu Laurent Bergé, le secrétaire général de la CFDT, pourtant jugé comme le plus proche du gouvernement parmi les centrales, auprès de Libération.

• Convaincre les LR pour faire voter le budget

Le projet de loi de finances (PLF) de 2023 arrivera à l'automne dans l'hémicycle mais commencera à être étudié en commission dès septembre. Très technique, il a également une grande valeur politique, en fondant l'action du gouvernement pour l'année à venir.

"Traditionnellement, les oppositions votent contre", reconnaît Aurore Bergé.

En cas de rejet du PLF par l'Assemblée nationale, il semblera très compliqué de ne pas passer par la case dissolution. Autant dire que la coalition présidentielle va tout faire pour convaincre le maximum de députés, notamment de droite, de le voter.

"Je suis convaincu que des socialistes responsables et une très grande partie des LR voteront ce budget si on leur tend la main et qu'on donne des gages de bonne volonté", assume un conseiller ministériel.

Le mois de septembre devrait d'ailleurs être l'occasion de multiplier les consultations tous azimuts, à commencer par Élisabeth Borne qui pourrait recevoir les présidents de groupe. Avec une chance pour son gouvernement: celle que les LR, craignant une dissolution probablement très défavorable à groupe, votent sans encombre le texte.

• Améliorer la réplique face à la France insoumise et au RN

Depuis les débuts de la nouvelle mandature, les réseaux sociaux ont vu se multiplier les vidéos des parlementaires insoumis et RN partageant leurs interventions en séance, leur analyse en sortie d'hémicycle... Les députés Renaissance ont, eux, été beaucoup plus discrets. Même quand ils s'essaient à la bagarre sur Twitter ou Facebook, le match est rarement à leur avantage.

À la sortie de la séance le 26 juillet dernier, le député LFI David Guiraud fait presque 400.000 vues pour une vidéo dans laquelle il dénonce le second vote sur un amendement octroyant 500 millions d'euros de plus pour la revalorisation des retraites.

La réponse de Prisca Thévenot de Renaissance sur le même sujet fait, elle, 579 retweets. Côté RN, on se félicite de la densité médiatique du nouveau député Jean-Philippe Tanguy, qui, a lui, fait du bruit après une prise de parole très remarquée à la tribune. Sur les bancs de la majorité, aucun nouveau visage ne semble pour l'instant se dégager.

"On n'a pas cette culture-là de crier fort dans l'hémicycle et surtout, nous n'en avions pas besoin avant d'avoir la majorité relative. On doit progresser là-dessus en le faisant à notre façon, avec calme. On ne peut pas perdre la bataille de communication", reconnaît un député proche d'Emmanuel Macron.

Consigne avait pourtant été passée aux députés de faire profil bas aux députés de la coalition. Aurore Bergé avait par exemple demandé à ses troupes de garder le silence pendant les discours des chefs de groupe comme Mathilde Panot ou Marine Le Pen après le discours de politique générale de la Première ministre. De drôles d'images face à des oppositions remontées à bloc. L'ambiance devrait désormais changer.

Article original publié sur BFMTV.com