Pourquoi le pass sanitaire n'a rien réglé aux inégalités vaccinales

Contre le coronavirus, pourquoi le pass sanitaire n'a rien réglé aux inégalités vaccinales (Photo: Maxim Kiselev Maxim Kiselev/TASS)
Contre le coronavirus, pourquoi le pass sanitaire n'a rien réglé aux inégalités vaccinales (Photo: Maxim Kiselev Maxim Kiselev/TASS)

CORONAVIRUS - “Le pass sanitaire n’a pas réduit les inégalités vaccinales”: à l’heure où les débats font rage sur la transformation du pass sanitaire en pass vaccinal et où Emmanuel Macron se voit reprocher de vouloir “emmerder les non-vaccinés”, des chercheurs français dressent un bilan contrasté du système en vigueur depuis le mois de juillet 2021.

L’étude, prépubliée le jeudi 6 janvier sous la direction de la spécialiste en biologie évolutive Florence Débarre, décortique ainsi les chiffres de la vaccination sur tout le territoire à trois dates: début juillet, peu de temps après l’annonce d’un pass sanitaire nécessaire à la vie de tous les jours, début août, lorsqu’il est effectivement mis en place, et fin août, juste avant la rentrée des classes.

Les conclusions sont sans appel: malgré une élévation globale marquée du taux de vaccination, “les zones les plus démunies ont plus de dix fois plus de chances d’être parmi les moins vaccinées” après l’instauration de cette mesure, constate l’étude. “Que le taux de vaccination soit associé aux inégalités sociales, c’est la confirmation de quelque chose de connu”, explique Florence Débarre.“ Mais l’aspect nouveau, c’est que la contrainte du pass sanitaire n’a pas réduit ces inégalités vaccinales”.

“Les écarts se sont maintenus”

L’étude a pu associer pauvreté et taux de vaccination plus faible que la moyenne en triant une multitude de critères, comme le revenu, la taille de la famille, le niveau d’éducation, afin de trouver ceux qui correspondaient le plus à la carte des inégalités vaccinales. Les deux paramètres qui produisent le parallèle le plus net avec un taux de vaccination bas sont le mal-logement (plusieurs personnes dans un logement trop petit) et le taux de chômage. Deux indicateurs de pauvreté.

“Si l’on prend ces deux indicateurs, les écarts se sont maintenus” depuis l’arrivée du passe sanitaire, explique la chercheuse à l’Université Paris-Sorbonne. Pourquoi? Pour l’étude, cela tient à la définition même du pass. Ce dernier étant nécessaire pour des activités sociales payantes, comme aller au cinéma ou au restaurant, il n’a pas exercé la même contrainte dans les zones les plus pauvres.

Mais attention à ne point faire d’un parallèle une causalité: comme le rappelait dans d’autres travaux l’une des autrices de l’étude, Lucie Guimier, dans certaines régions, la réticence à la vaccination peut être liée à des résistances régionales historiques, comme dans le sud-est de la France. L’inégal accès aux soins peut également en être un, comme le faisait remarquer cet été le député communiste de Seine-Saint-Denis Stéphane Peu. Derrière ces causes multiples, le critère de la pauvreté est celui que l’on retrouve systématiquement.

Le taux de vaccination en France par département au 26 décembre 2021 (carte Assurance maladie) (Photo: Assurance maladie AMELI)
Le taux de vaccination en France par département au 26 décembre 2021 (carte Assurance maladie) (Photo: Assurance maladie AMELI)

Le taux de vaccination en France par département le 26 décembre 2021 (carte de l’Assurance maladie)

Le département de région parisienne fait en effet partie des zones où le décrochage vaccinal est le plus évident. Plus de 34% de la population n’y a encore reçu aucune dose de vaccin, soit 14% de plus que la moyenne vaccinale. Un écart comparable, voire légèrement supérieur, à ce qu’il était avant le pass sanitaire. “Le pass n’a pas été sans effet: il n’a juste pas résorbé les inégalités”, constate Florence Débarre.

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Cet article a été initialement publié sur Le HuffPost et a été actualisé.

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