Dans la Bible, la gauche est systématiquement présentée comme le mauvais côté : les bons croyants seront placés à la droite de Dieu, pour aller au paradis, tandis que les pécheurs iront à gauche, direction l’enfer ou le purgatoire. C’est la main droite qui fait l’aumône, bénit, symbolise la rectitude, alors que la gauche incarne le mal, le vice, la faute. Celle-ci ne peut donc être utilisée pour les tâches nobles.

En 1703, dans Les Règles de la bienséance et de la civilité chrétienne, l’ecclésiastique et pédagogue Jean-Baptiste de la Salle la réserve aux gestes indignes, comme se moucher… Seule la main droite écrit, salue, tient une fourchette.

Malgré cette stigmatisation, les gauchers ont vécu plutôt tranquilles jusqu’au XVIIe siècle. Mais lorsque l’instruction se généralise, avec l’écriture, il est difficile de cacher cette préférence. "Les discriminations envers les gauchers ont démarré, ils sont devenus des brebis galeuses", explique l’historien Pierre-Michel Bertrand, auteur de Histoire des gauchers (éd. Imago). Etre gaucher devient alors une infamie, une perversion, au point qu’au XIXe siècle les instituteurs forcent ceux qui représentent 15 % de la population à écrire de la main droite en leur attachant la gauche dans le dos ou en les frappant.

La Première Guerre mondiale va les sauver : des milliers d’hommes rentrent en effet du front amputés de la main droite et n’ont d’autre choix que d’utiliser celle qui leur reste. Elle devient d’un seul coup "le symbole de leur dignité (...)

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