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Pourquoi Emmanuel Macron utilise régulièrement le terme "emmerder"

Le président français Emmanuel Macron le 9 décembre 2021 - Ludovic MARIN © 2019 AFP
Le président français Emmanuel Macron le 9 décembre 2021 - Ludovic MARIN © 2019 AFP

Emmanuel Macron n'en est pas à son coup d'essai. Si "son envie" d'"emmerder" les non-vaccinés fait polémique ce mercredi matin, le président est coutumier de cette familiarité.

Reprenant à son compte la formule de Georges Pompidou qui appelait en 1966 à "ne pas emmerder les Français" face à l'inflation législative, le futur locataire de l'Élysée l'utilise une première fois en mars 2017, en pleine campagne présidentielle.

Parler franc pour casser son image

En visite devant la Fédération nationale des chasseurs, le candidat assure ne pas vouloir ouvrir le chantier du bien-être animal ou interdire les chasses traditionnelles.

"Il faut laisser respirer les gens, arrêter d’emmerder les Français. Vu l’état du pays, j’ai beaucoup d’autres choses à faire", explique-t-il devant des chasseurs conquis, rapporte France info.

La phrase a le mérite de la clarté et permet à Emmanuel Macron, qui n'a jamais été élu local, de se montrer proche des préoccupations de la ruralité. Alors que le candidat cherche à se défaire de son image élitiste, le parler populaire a l'avantage de montrer un autre visage.

Onze mois plus tard, en février 2018, désormais élu, le président reprend à son compte la formule pompidolienne pour clore un débat au sein du gouvernement.

Incarner la liberté

Didier Guillaume, alors ministre de l'Agriculture, a provoqué un tollé quelques semaines plus tôt, après avoir estimé qu'un "jeune qui sort de boîte de nuit, et qui est saoul, ce n'est jamais parce qu'il a bu du Côtes-du-Rhône". Agnès Buzyn, sa collègue au ministère de la Santé, estime quant à elle quelques jours plus tard que "le vin est un alcool comme les autres".

Le président tranche en faveur du secteur vinicole. "S'il y a des jeunes qui se saoulent, ils ne se saoulent pas au vin français. ll faut qu'on arrête d'emmerder les Français", déclare-t-il alors.

"Il est dans l'idée de ne pas aller sur le terrain de la contrainte. On est encore dans les débuts du mandat avec des accents assez libéraux", remarque Emilie Zapalski, experte en communication politique, après de BFMTV.com.

Rebelote sept mois plus tard. Alors que certains au sein de la majorité le pressent d'alourdir les droits de succession, Emmanuel Macron ferme le ban. "On a demandé des efforts aux retraités. Mais maintenant, arrêtez de les emmerder", explique-t-il à ses collaborateurs, comme le raconte Paris Match.

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Une expression proche du "en même temps"

L'expression semble un temps disparaître du registre de langage du président de la République sur la scène publique. En privé, elle continue cependant de faire florès. En pleine crise des gilets jaunes et alors que François Bayrou s'imagine Premier ministre à la place d'Édouard Philippe, Emmanuel Macron lui demande d'arrêter de "l'emmerder", rapporte le Journal du dimanche.

"Le terme plaît à Emmanuel Macron parce qu'il a des airs d''en même temps'. D'un côté, c'est une insulte assez grossière mais de l'autre, c'est un mot qu'on retrouve beaucoup au cinéma ou dans la littérature. Finalement, il est un président comme tout le monde, se dit-il, en parlant comme les Français", décrypte encore Philippe Moreau-Chevrolet, professeur associé à Sciences-Po Paris pour BFMTV.com.

Jusqu'à l'entretien aux lecteurs du Parisien ce mardi dans lequel le président déclare: "Les non-vaccinés, j'ai très envie de les emmerder".

Une sortie très calculée

"On n'est plus dans un usage présidentiel du mot mais bien dans une démarche de candidat qui cherche à occuper le terrain en attaquant une partie des Français", décrypte encore Philippe Moreau-Chevrolet.

C'est que la sortie d'Emmanuel Macron ne doit rien au hasard. Alors qu'une partie des députés LR semble hésiter sur le pass vaccinal, le président s'appuie sur les sondages qui montrent l'hostilité grandissante des Français vis-à-vis des personnes non-vaccinées.

"Chercher à cliver"

20% d'entre eux auraient ainsi été prêts à refuser des passer les fêtes de Noël avec une personne non-vaccinée, d'après un sondage Elabe pour BFMTV et L'Express.

"D'une certaine façon, il se met au même niveau qu'Éric Zemmour et son doigt d'honneur à Marseille en allant sur le terrain de l'insulte et en cherchant à cliver", juge sévèrement Émilie Zapalski.

La stratégie semble pour l'instant réussir à Emmanuel Macron. Il fait la course en tête dans le dernier sondage Elabe pour BFMTV et L'Express en récoltant 26% des intentions de vote.

Article original publié sur BFMTV.com