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Pourquoi les émissions de CO2 de la France n’ont presque pas baissé en 2022

Un pylône de lignes électriques à haute tension devant une cheminée de la centrale électrique au charbon EDF de Bouée (Loire-Atlantique), France, le 25 février 2022.
Stephane Mahe via Reuters Un pylône de lignes électriques à haute tension devant une cheminée de la centrale électrique au charbon EDF de Bouée (Loire-Atlantique), France, le 25 février 2022.

Les émissions de gaz à effet de serre de la France sur l’année ont quasiment stagné par rapport à la même période de 2021.

ENVIRONNEMENT - Le bilan des émissions de CO2 de la France sur l’année 2022 n’est pas bon. Selon des données provisoires du Citepa, l’organisme mandaté pour réaliser l’inventaire des émissions du pays, la France a peiné à les faire baisser. Sur les neuf premiers mois de l’année, elles ont quasiment stagné, avec une baisse de 0,3 % par rapport à la même période de 2021.

Une tendance bien loin de la baisse nécessaire pour que le pays reste dans les clous de ses engagements, mais qui n’étonne guère.

« Ces chiffres nous inquiètent forcément, mais on s’y attendait. Il n’y a pas de miracle », a réagi auprès de l’AFP Jérémie Suissa, délégué général de l’ONG Notre affaire à tous, qui a fait condamner l’État pour inaction climatique l’an dernier.

Evolution des émissions mensuelles de GES depuis 2020 par le Citepa
Evolution des émissions mensuelles de GES depuis 2020 par le Citepa

26 réacteurs à l’arrêt

Quand on regarde en détail la facture, les émissions ont notamment augmenté de 12 % dans la production d’énergie. La France a connu une année d’indisponibilité exceptionnelle de son parc de 56 réacteurs nucléaires, en raison notamment de problèmes de microfissures. Pour compenser ce manque, le pays n’a ainsi jamais autant consommé de gaz pour sa production d’électricité que cette année.

Sauf qu’avec la crise énergétique, notamment causé par l’invasion russe en Ukraine, le gouvernement a renoncé à fermer cet hiver la centrale à charbon de Saint-Avold, en Moselle.

Le Citepa pointe aussi une hausse de 4 % des émissions des transports, avec une évolution en dent de scie selon les mois. « On revient sur le mode de fonctionnement d’avant la crise Covid dans le secteur des transports, qui continue à être tendanciellement à la hausse et pour l’instant on ne voit pas changement structurel réel », considère Michel Colombier, membre du Haut conseil pour le climat (HCC).

Comparaison des émissions de transports en France par le Citepa
Comparaison des émissions de transports en France par le Citepa

Faire le tri entre données conjoncturelles et tendances de fond

Une tendance très éloignée des efforts nécessaires pour que la France respecte son objectif d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050. D’ici 2030, elle s’est engagée à réduire ses émissions de 40 %. Or selon le HCC, le pays devrait doubler le rythme de baisse de ses émissions à environ -4,7 % par an sur la période 2022-2030 pour tenir compte des nouveaux objectifs européens qui visent une réduction nette d’« au moins 55 % » des émissions de gaz à effet de serre de l’UE d’ici 2030.

Néanmoins, Michel Colombier appelle à faire le tri entre les données conjoncturelles -avec les problèmes de corrosion des réacteurs nucléaires ainsi que le contexte énergétique mondial- et les tendances de fond. « On ne peut pas tirer de cette stagnation des conclusions sur notre capacité à atteindre les objectifs », dit-il.

Et de pointer tout de même des défis importants dans les domaines des transports et de l’énergie. Concernant ce dernier, il y a « urgence à ce qu’on développe les renouvelables parce qu’on a un parc nucléaire qui est fragile, dont on en est hyper dépendants » et qui pourrait encore réserver des mauvaises « surprises », remarque-t-il.

Jérémie Suissa quant à lui regrette l’absence de politique ambitieuse en matière de transports en commun ou d’énergies renouvelables et estime que « tout n’a pas été fait pour diminuer les émissions. » Tant et si bien que les ONG se déclarent désormais prêtes à retourner en justice en 2023 pour redemander des pénalités financières, estimant que l’État n’a pas assez agi. « L’étape suivante est de demander des astreintes pour une application réelle par l’État de la décision du juge », souligne le délégué de Notre affaire à tous.

« Le gouvernement est pleinement engagé pour tenir ses engagements climatiques », assure de son côté le ministère de la Transition énergétique, mettant en avant une série de mesures en faveur de la rénovation énergétique, de la sobriété, du vélo électrique, du covoiturage, ou encore la prochaine interdiction de location des passoires thermiques.

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