Publicité

Porochenko accuse Poutine de vouloir annexer toute l'Ukraine

Le président ukrainien Petro Porochenko a accusé son homologue russe Vladimir Poutine de vouloir annexer toute l'Ukraine alors que la Russie a déployé de nouveaux missiles antiaériens en Crimée à la suite de l'incident dimanche entre marines russe et ukrainienne dans le détroit de Kertch. /Photo prise le 28 novembre 2018/REUTERS/Mykola Lazarenko

par Thomas Escritt et Andrew Osborn

BERLIN/MOSCOU (Reuters) - Le président ukrainien Petro Porochenko a accusé son homologue russe Vladimir Poutine de vouloir annexer toute l'Ukraine alors que la Russie a déployé de nouveaux missiles antiaériens en Crimée à la suite de l'incident dimanche entre marines russe et ukrainienne dans le détroit de Kertch.

Le ministre ukrainien des Infrastructures, Volodimir Omelian, a par ailleurs affirmé jeudi que les ports ukrainiens de Berdiansk et de Marioupol, sur la mer d'Azov, étaient de fait sous blocus russe. Le Kremlin a démenti, parlant de simples retards dans les liaisons maritimes dus au mauvais temps.

En raison de la tension, la Russie a déployé une nouvelle unité de missiles sol-air S-400 en Crimée, la quatrième de ce type, rapporte l'agence Tass qui cite un porte-parole de la Flotte de la mer Noire. Cette nouvelle batterie a été déployée à Djankoï, dans le nord de la péninsule.

La Russie a aussi l'intention de mettre en place en 2019 une nouvelle station radar d'alerte avancée en Crimée, rapporte l'agence de presse Interfax qui cite une source proche des services de sécurité russe.

Dans des entretiens accordés au quotidien allemand Bild et aux journaux du groupe Funke publiés jeudi, Petro Porochenko demande à la chancelière allemande Angela Merkel de venir au secours de Kiev.

LOI MARTIALE EN UKRAINE

Il réclame aussi l'envoi de navires de l'Otan dans la mer d'Azov, que le détroit de Kertch sépare de la mer Noire.

Les forces russes ont ouvert le feu et arraisonné dimanche trois bâtiments de guerre ukrainiens qu'elles accusent d'avoir franchi illégalement la frontière russe et de ne pas avoir obtempéré aux ordres de s'arrêter.

Petro Porochenko a annoncé jeudi sur Twitter que des mesures allaient être prises à l'encontre des Russes installés en Ukraine, sans en préciser la nature.

Kiev a ensuite fait savoir que seuls les citoyens ukrainiens seraient autorisés à se rendre en Crimée par voie terrestre. Le chef de la marine ukrainienne, quant à lui, a indiqué que son pays allait demander à la Turquie d'interdire aux navires russes de franchir le détroit du Bosphore.

Kiev a instauré la loi martiale pour une durée de trente jours dans les zones les plus vulnérables d'Ukraine à la suite de cet incident dans le détroit de Kertch.

Le président russe Vladimir Poutine, quant à lui, a accusé son homologue ukrainien d'avoir organisé une "provocation" dans l'espoir de faire remonter sa cote de popularité avant l'élection présidentielle du printemps prochain en Ukraine.

"Ne croyez pas aux mensonges de Poutine", a dit Petro Porochenko à Bild, soulignant que la Russie avait nié en 2014 la présence de soldats russes en Crimée alors qu'elle annexait la péninsule.

BERLIN PRÔNE L'APAISEMENT

"Poutine veut rétablir l'empire russe. La Crimée, le Donbass, le pays tout entier: l'empire de Poutine, qui se considère comme un tsar, ne peut fonctionner sans l'Ukraine. Il nous voit comme sa colonie", a ajouté le président ukrainien.

Les tensions entre Kiev et Moscou sont montées d'un cran depuis l'incident du détroit de Kertch, rappelant celles qui ont suivi l'annexion de la Crimée par la Russie en 2014. La Crimée était ukrainienne depuis 1954 à la suite d'une décision du dirigeant soviétique de l'époque, Nikita Khrouchtchev.

L'Allemagne, qui donne le ton de la politique européenne dans ce dossier, a appelé mardi à un apaisement tout en faisant preuve de fermeté à l'égard de la Russie.

Petro Porochenko demande à Berlin, principal importateur de gaz russe, de stopper la construction du gazoduc Nord Stream 2 devant permettre à la Russie de doubler ses livraisons de gaz vers l'Allemagne via la mer Baltique sans passer par l'Ukraine.

"Nous avons besoin d'une réaction ferme et limpide au comportement agressif de la Russie", dit-il dans l'entretien donné aux journaux du groupe Funke. "Cela veut notamment dire qu'il faut stopper le projet du gazoduc Nord Stream 2".

Mais à Berlin, le ministre allemand de l'Economie, Peter Altmaier, a paru exclure de stopper ce projet de gazoduc.

"Il s'agit de deux questions distinctes", a-t-il dit jeudi matin à la chaîne allemande ARD à propos de la crise dans le détroit de Kertch et de Nord Stream 2.

(Avec Tom Balmforth, Andrey Ostroukh, Michelle Martin, Pavel Polityuk et Gernot Heller; Jean Terzian, Eric Faye, Guy Kerivel et Jean-Philippe Lefief pour le service français)