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Pornographie : 90 % des scènes comportent de la violence, selon un rapport du Sénat

Un rapport sénatorial publié le 27 septembre 2022 étrille l’industrie du porno.
Getty Image Un rapport sénatorial publié le 27 septembre 2022 étrille l’industrie du porno.

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Un rapport sénatorial publié le 27 septembre 2022 étrille l’industrie du porno.

PORNOGRAPHIE - « Porno : l’enfer du décor. » Voici le nom du rapport sénatorial explosif rédigé par quatre élues sur l’industrie du porno après les révélations de l’affaire « French Bukkake », dans laquelle une dizaine de personnes sont poursuivies notamment pour traite d’êtres humains aggravée, viol en réunion ou proxénétisme aggravé.

« Les violences sexuelles, physiques et verbales sont massivement répandues dans le porno, revêtant un caractère systémique. Elles ne sont pas simulées mais bien réelles pour les femmes filmées », dénoncent les quatre co-autrices Annick Billon (UDI-UC), Alexandra Borchio Fontimp (LR), Laurence Cohen (CRCE) et Laurence Rossignol (PS, vice-présidente du Sénat).

Pire, « 90 % des scènes pornographiques comportent de la violence », écrivent-elles dans ce rapport obtenu par plusieurs médias dont l’AFP, France info et Le Monde ce mardi 27 septembre. Le rapport doit être rendu public officiellement mercredi.

« Provoquer un électrochoc »

Le travail des sénatrices a pris six mois et requis des dizaines d’heures d’auditions avec les acteurs du secteur, sur un sujet qui n’avait jamais vraiment retenu l’attention des parlementaires. « La résistance masculine à faire de ces sujets des sujets politiques est très grande », expliquent-elles pour justifier l’absence d’intérêt jusqu’à présent. Mais l’ère #MeToo a changé la donne.

Les autrices veulent « provoquer un électrochoc », et permettre à tous « d’ouvrir enfin les yeux de tous sur ce système de violences », ajoute Laurence Rossignol dans Le Monde. Car « deux tiers des enfants de moins de 15 ans et un tiers de ceux de moins de 12 ans ont déjà été exposés à des images pornographiques, volontairement ou involontairement. Près d’un tiers des garçons de moins de 15 ans se rend sur un site porno au moins une fois par mois », pointe le rapport.

Or, « la scénarisation du viol et l’érotisation de la violence sexuelle participent (…) de ce système de domination et de violences envers les femmes », jugent les sénatrices. « Il existe un porno ’éthique’, mais il représente 0,001 % du marché, ce n’est pas ce que recherchent les consommateurs », précise Laurence Rossignol, toujours dans le Monde.

Avec Pornhub ou Xvideos, la diffusion du porno est massive

Depuis l’apparition, au milieu des années 2000, des grandes plateformes internet comme Pornhub ou Xvideos, la diffusion du porno est devenue massive, ce qui a « contribué à la recrudescence de contenus de plus en plus ’trash’ et violents, sans aucun contrôle ni considération pour les conditions dans lesquelles ces contenus sont produits », poursuit le document.

Les témoignages glaçants récoltés dans le cadre de l’affaire « French Bukkake », du nom du site de « Pascal OP » spécialisé dans le porno dit amateur, illustrent le calvaire de femmes, qui décrivent des relations sexuelles à la chaîne parfois non consenties. « J’ai mangé la nourriture du chien », a même témoigné une victime, rapporte Public Sénat.

« Les producteurs ne craignent pas d’exploiter la vulnérabilité économique et psychologique de femmes jeunes, voire très jeunes, et de réaliser des tournages dans des conditions déplorables », déplorent encore les sénatrices. C’est le cas dans l’affaire « French Bukkake » mais aussi de l’affaire Jacquie et Michel, autre marque très connue dans le milieu et également visée par une enquête pour des faits de proxénétisme et de viols.

Face à des productions « qui atteignent le paroxysme de la violence », la société doit réagir en renforçant la répression pénale contre les responsables de cette industrie, en « favorisant l’émergence de plaintes des victimes », et en imposant aux plateformes de supprimer gratuitement les vidéos lorsque les femmes en font la demande, préconisent les élues.

Empêcher l’accès des sites pornos aux mineurs

Actuellement, lorsqu’une femme abusée demande la suppression d’une vidéo dans laquelle elle apparaît, les producteurs lui réclameraient entre 3 000 et 5 000 euros, « soit dix fois plus que la rémunération obtenue pour la scène tournée », pointe le rapport. Les autrices veulent « faire de la lutte contre les violences pornographiques et la marchandisation des corps une priorité de politique publique » et « d’augmenter les effectifs et les moyens matériels ».

Les sénatrices de la délégation aux droits des femmes formulent par ailleurs plusieurs propositions pour empêcher les mineurs d’accéder au porno sur internet, une protection qui s’impose en théorie aux diffuseurs mais qui, dans les faits, n’est pas appliquée.

L’Arcom (ex-CSA) doit voir ses pouvoirs renforcés pour imposer des amendes « dissuasives » aux sites porno accessibles aux mineurs, et le gouvernement doit imposer le « développement de dispositifs de vérification d’âge » et « mener une campagne de communication autour des dispositifs de contrôle parental ».

Alors que deux tiers des jeunes de moins 15 ans ont déjà eu accès à des images porno, la lutte doit aussi passer par l’éducation, estiment les parlementaires, pour qui la « marchandisation des corps » et la pornographie devraient être abordés dans les établissements scolaires, dans le cadre de séances d’éducation à la vie sexuelle et affective.

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