Polar Pod : une "grande oreille" à l'écoute de l'océan Austral
À partir de 2027, la plateforme dérivante Polar Pod, imaginée par l'explorateur Jean-Louis Étienne, auscultera cet écosystème essentiel pour le climat.
Cet article est issu du magazine Les Dossiers de Sciences et Avenir n°218 daté juillet/ septembre 2024.
Imaginez un ludion flottant sur l'océan. Mais un ludion aux dimensions inédites : 30 mètres au-dessus de la surface (un immeuble de dix étages), 80 mètres au-dessous, 42 mètres de long pour 33 de large en comptant les ailes supportant six éoliennes… et 1100 tonnes. C'est le Polar Pod, ce navire pas comme les autres, "vertical, et non horizontal", ainsi que le souligne son responsable technique à l'Ifremer, Marc Nokin. Une conception qui va lui permettre de se laisser porter par les courants dans les cinquantièmes hurlants. Un pari technique fou au service d'un grand projet scientifique : mieux comprendre comment fonctionne l'océan Antarctique.
Douze ans déjà que Jean-Louis Étienne développe l'idée. L'explorateur est connu pour cogiter sur les moyens d'explorer les pôles. La goélette Antarctica, en 1991, fut le premier de ces navires capables d'affronter les courants et les vents au-delà des quarantièmes sud. Polar Pod en est une sorte d'héritier. "Les climatologues se plaignent du manque de données sur cet océan qui fait le tour de la Terre sans rencontrer de continent, avec une vitesse de courant de 150 millions de mètres cubes par seconde, expose Jean-Louis Étienne. Il est lointain et dangereux, si bien qu'on le connaît mal. C'est un défi qui m'a toujours passionné."
La conception du projet ne tombe pas du ciel. Ce type d'embarcation, progressant au gré des courants, il en existe un exemplaire, aux États-Unis. Le Flip est une immense quille qui s'enfonce dans l'eau à grande profondeur, là où les flots sont stables. "Les bateaux horizontaux sont constamment agités par les vagues car ils manœuvrent à la surface, souligne Marc Nokin. Si l'essentiel de la masse se trouve en dessous de la ligne de flottaison et plonge à des profondeurs où l'agitation de surface n'agit plus, on obtient un objet stable quelle que soit la violence des tempêtes." Ce gros flotteur déjà an[...]