Une plainte déposée contre Dupond-Moretti devant la CJR pour "prise illégale d'intérêts"

Eric Dupond-Moretti le 24 septembre 2020. - Alain JOCARD © 2019 AFP
Eric Dupond-Moretti le 24 septembre 2020. - Alain JOCARD © 2019 AFP

Le ciel ne s'éclaircit pas pour Éric Dupond-Moretti. Une plainte pour "prise illégale d’intérêts" le visant personnellement a été déposée ce mercredi devant la Cour de justice de la République (CJR), rapporte la Cour de cassation à BFMTV.com, confirmant des informations de Mediapart. Elle a été déposée par Raymond Avrillier, un militant historique contre la corruption et intervient en plein conflit ouvert avec les magistrats concernant l'enquête sur trois membres du Parquet national financier (PNF).

L'affaire des "fadettes"

Le plaignant, qui a déjà lancé des procédures contre le ministre (RPR) Alain Carignon ou dans l'affaire des sondages de l'Élysée sous le quinquennat Nicolas Sarkozy par le passé, estime que le garde des Sceaux est au cœur d'un conflit d'intérêt concernant l'enquête administrative visant trois procureurs du PNF désignés par le ministère.

Cette enquête a été ordonnée le 18 septembre après la remise d'un rapport de l'Inspection générale de la justice sur le fonctionnement du PNF, mis en cause pour avoir épluché en 2014 les relevés téléphoniques détaillés ("fadettes") de ténors du barreau, dont Éric Dupond-Moretti lui-même.

Cette mesure avait été ordonnée par le PNF pour tenter d'identifier la "taupe" qui aurait pu informer Nicolas Sarkozy et son avocat Thierry Herzog, ami de l'actuel garde des Sceaux, qu'ils étaient sur écoute dans une enquête pour des soupçons de corruption d'un magistrat. Raymond Avrillier reproche par ailleurs à Éric Dupond-Moretti ses liens étroits avec Thierry Herzog, qui doit être jugé aux côtés de l'ancien président à partir du 23 novembre dans ce dossier.

5 ans de prison et 75.000€ d'amende

L'action repose sur l'article 40 du code de procédure pénale qui dispose que "le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public ou par une personne investie d'un mandat électif public, de prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt quelconque dans une entreprise ou dans une opération dont elle a, au moment de l'acte, en tout ou partie, la charge d'assurer la surveillance, l'administration, la liquidation ou le paiement, est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75.000 euros d'amende."

La CJR est la seule instance compétente pour juger les crimes ou délits commis par des membres du gouvernement dans l’exercice de leurs fonctions. La plainte va maintenant être étudiée par la commission des requêtes de la CJR, qui se prononcera sur la recevabilité ou non de la plainte.

Si elle estime qu'il faut poursuivre la procédure, elle rendra un arrêt à destination du procureur général près de la Cour de cassation. La commission d'instruction procédera ensuite à l'audition des présumées victimes, comme c'est le cas actuellement dans la procédure liée au coronavirus. Enfin, le garde des Sceaux pourrait alors être jugé, comme cela a déjà été le cas pour sept anciens ministres.

Article original publié sur BFMTV.com