Ce que Philip Roth a dit à «Libé» «Le métier d’écrivain est usant ! Je ne le conseille à personne»

«Libération» a interviewé l’écrivain à plusieurs moments de sa carrière. Désabusé, volontiers provocateur, il évoquait les Etats-Unis, son métier, le poids des conventions, la vieillesse… Extraits.

«Je n’ai jamais voulu échapper à ma condition de juif, d’homme, d’Américain. La marque est indélébile. J’ai été élevé dans une société où on était italien, ou polonais, ou juif, ou autre. Dans mon quartier, à Newark, tout le monde a une origine, et ce n’était pas contradictoire avec le fait d’être américain. En plus, le sujet de la Contrevie, c’est celui de la multiplicité des identités juives : les juifs sont les seuls à s’auto-inventer. Les catholiques n’ont pas à se faire catholiques. Enfin, les juifs américains ont créé un style, ils ont créé New York, et ils ont inventé Hollywood. D’ailleurs, ils ont même inventé l’image de l’Amérique non juive : tous les films sur les petites villes américaines, sur ces gentils protestants, étaient écrits par Mr Goldberg, financés par Mr Ginsberg, produits par Mr Greenberg… Les studios étaient dirigés par des immigrants qui ne connaissaient rien à l’Amérique, et l’Amérique s’est identifiée à son image hollywoodienne. Elle y a cru ! (rires)…

«Cela fait trente-cinq ans que je suis assis sur une chaise, en face d’une feuille de papier et que j’écris. Sept jours par semaine. Démarrer un nouveau livre est un cauchemar. Le médecin qui arrive le matin dans son cabinet ne doit pas réinventer la médecine. Mais l’écrivain ne sait jamais quoi faire. Il part dans la confusion et l’ignorance. Ses livres précédents ne lui sont d’aucune utilité. Tout est à inventer. Je suis toujours terrifié à l’idée de terminer un livre, j’essaie de faire durer parce que je sais ce qui vient après : rien ! Le métier d’écrivain est usant ! Si c’était à refaire, dans une autre vie, je serais ravi de ne pas être écrivain. Je ne conseille à personne de devenir écrivain. Vous pouvez l’écrire dans votre journal.

«L’isolement est épouvantable. L’écrivain est un fou qui a (...)

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