Peut-on encore être galant en 2024 ? Oui, si l’on en croit cette autrice spécialiste du XVIIe siècle

IDÉES - Sexiste, la galanterie ? Cette notion bien française a beaucoup été remise en question depuis le mouvement MeToo. Isabelle Adjani le soulignait en 2017, « en France, il y a les trois G : galanterie, grivoiserie, goujaterie » et « glisser de l’une à l’autre en prétextant le jeu de la séduction » est l’une des « armes de l’arsenal de défense des prédateurs et des harceleurs ». Une instrumentalisation de la galanterie qui dénature pourtant ses origines bien plus subversives, selon la spécialiste de l’Ancien Régime Jennifer Tamas.

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« La galanterie, c’est un champ de bataille », résume dans la vidéo ci-dessus celle qui enseigne la littérature française aux États-Unis à Rutgers University (New Jersey).

Dans son essai de 60 pages, Peut-on encore être galant ?, publié dans la collection Libelle du Seuil, elle montre que ce débat est en réalité ancien et apparaît dès le XVIIe siècle. Et que la galanterie fut avant tout investie par les femmes, pour penser les rapports de genre, le consentement sexuel et le refus du mariage.

« Elles imaginent des femmes très puissantes »

« Il y a vraiment une philosophie du lien humain qui est pensé par des femmes et qui a été oublié, qui a été réduit à des formules de politesse… », estime Jennifer Tamas, qui a notamment publié Au NON des femmes. Libérer nos classiques du regard masculin (Seuil, 2023). « Évidemment, c’est sympa, la politesse, ça permet de ne pas s’agresser, mais ce n’est pas ce qui résout les problèmes de fond. »

Les autrices du XVIIe, comme Madeleine de Scudéry, que l’on appelait de manière péjorative des « précieuses », interrogeaient alors déjà les problématiques de genre et de représentations. « Elles imaginent des femmes très puissantes, qui n’ont pas besoin d’hommes pour se défendre… explique-t-elle. Elles inventent 1 000 façons de changer les scripts, de montrer qu’il y a plusieurs masculinités possibles. Qu’être doux et être tendre, ce n’est pas forcément un signe de faiblesse. » Repenser la galanterie et ne pas la réduire à l’ouverture d’une porte pourrait donc, selon l’autrice, permettre d’initier un nouveau dialogue entre les sexes.

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