Une petite sirène noire ? Pour ces parents, cette représentation est loin d’être anodine

« La représentation des personnages noirs évolue, c’est beau ! » s’exclame Jordan
« La représentation des personnages noirs évolue, c’est beau ! » s’exclame Jordan

PARENTALITÉ - Choisir l’artiste noire Halle Bailey pour interpréter la petite sirène dans le film éponyme de Disney a charrié son lot de polémiques dans la presse et les réseaux sociaux. Car en parallèle de cette décision artistique se pose la question de la représentation de la diversité à l’écran, et la manière dont elle influence la construction et la perception de soi.

Pour nombre de personnes noires, ce film est en effet l’occasion de se voir représentées positivement sous les traits d’une héroïne qui a marqué plusieurs générations, mais aussi de partager cette expérience avec leurs enfants. Le HuffPost est allé à la rencontre de parents noirs qui ont emmené leurs enfants voir La Petite Sirène pour cette raison, et leur a demandé ce que ça voulait dire pour eux.

« Je veux lui montrer que son identité peut être valorisée »

« Personnellement, La Petite Sirène n’a jamais été mon Disney préféré et en tant qu’adulte, je ne serais pas forcément allée voir le film en salles. Mais il était très important pour moi d’y emmener ma nièce ! Elle est née en Outre-mer et avant d’arriver en Hexagone, elle n’avait jamais été la seule petite fille noire de sa classe. Mais depuis que sa famille s’est installée dans une petite ville ici, elle souffre de beaucoup de moqueries vis-à-vis de sa couleur de peau, de la texture de ses cheveux, et je vois naître chez elle des complexes que j’ai connus aussi : elle veut se lisser les cheveux, elle aimerait ressembler à la reine des neiges…

Avoir une héroïne noire comme la petite sirène, aussi iconique et aussi valorisée, c’est une manière pour moi de lui montrer qu’elle est belle et que son identité, aussi bien physique que culturelle, peut être perçue comme positive par toute la société. Je pense qu’à son âge, ça m’aurait fait beaucoup de bien et je veux qu’on puisse célébrer ça ensemble !  » - Olivia et sa nièce.

« Avant, on était représentés par des clichés à la Kirikou »

« Chaque fois qu’un film avec un héros ou une héroïne noire sort, on est surpris et contents. C’était le cas avec Creed, avec Black Panther, et maintenant avec La Petite Sirène ! Avant, on était représentés par des clichés à la Kirikou, et même si j’ai aimé ce film, on est trop contents de voir autre chose, ça donne à voir une autre image. À l’école, on se moquait de nous en nous appelant Kirikou et aujourd’hui, quand on appellera la prochaine génération d’enfants noirs Black Panther ou Ariel, ce sera plus valorisant, ils y trouveront plus de fierté. » - Jordan Point et sa fille

« C’est un geste important pour les parents »

« Ma génération n’a pas eu droit à cette représentation, alors pouvoir offrir ça à ma fille, c’est essentiel, et c’est encore relativement rare au cinéma, alors on essaie de lui donner aussi par des livres, des dessins animés, et tout l’apport culturel que nous pouvons. Ce n’est pas que symbolique : c’est plus qu’important pour les enfants !

Ma fille n’a pas eu de réaction aussi marquée que sur les vidéos américaines en voyant une petite sirène noire, je pense qu’elle ne se pose pas la question. Les enfants prennent le film comme un pur divertissement mais quand je vois la composition de la salle, je me dis que ça reste un geste important pour les parents, de les emmener voir ce film.  » - Nicolas et sa fille

« Quand j’ai vu le personnage de la reine, j’ai souri »

« Je suis née en 86, et j’ai eu très peu de représentations positives de personnes noires dans les films ou les dessins animés quand j’étais enfant alors pour moi, c’est important d’en transmettre à mes enfants. Pour leur génération, les choses sont différentes : ils ont eu accès à plus de représentations positives, je les ai éduqués en leur montrant de nombreux films avec des personnages noirs. Alors voir une petite sirène noire, c’est presque normal ! Mais je sais que ma fille a tendance à plus s’identifier aux enfants noirs ou métis, je le vois par exemple quand on fait du shopping en ligne, donc je suis contente qu’elle puisse voir une princesse qui lui ressemble aussi.

De mon côté, parce que La Petite Sirène est un dessin animé que j’ai connu avec une héroïne différente, je n’ai pas été particulièrement emballée de la voir jouée par une femme noire. Par contre, quand j’ai vu le personnage de la reine à l’écran, elle aussi noire, là, j’ai souri parce que je me suis reconnue en elle ! Ça reste un bon remake et je suis contente que mes enfants aient pu le voir, c’était important. » - Gina et ses deux enfants

« La petite fille de 8 ans en moi a pleuré »

« Dans mon enfance, il n’y avait pas beaucoup de représentation de personnages noirs. Je suis une très grande fan de Disney et petite, j’adorais Ariel, c’était un personnage auquel je m’identifiais beaucoup alors quand j’ai appris qu’un live action allait sortir, j’ai été très enthousiaste. C’est en regardant le film que je me suis vraiment rendu compte de l’importance de la représentation : je pouvais enfin me voir en Ariel, et la Marie de 8 ans en moi en a un peu pleuré ! J’avais l’impression d’être une enfant émerveillée, et c’était vraiment un sentiment agréable. Cette nouvelle Ariel n’efface pas l’ancienne, elles coexistent encore, mais celle-ci permet à d’autres enfants (ou adultes, dans mon cas) de s’y retrouver.  » - Marie-Emanuelle

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