Sur les pesticides, Gabriel Attal cède à une revendication des syndicats agricoles contre les ONG écologistes

AGRICULTURE - Bien qu’attendue, l’annonce ne va pas faire que des heureux. L’abandon du Nodu, l’indicateur français de mesure de l’usage des pesticides, annoncé ce mercredi 21 février par le Premier ministre Gabriel Attal pour satisfaire l’une des revendications du monde agricole, ne passe pas inaperçu.

Crise agricole : Attal multiplie les « engagements » pour lever les doutes avant le Salon de l’agriculture

« Je vous annonce que l’indicateur de référence pour suivre notre objectif de réduction des produits phytosanitaires ne sera plus le Nodu franco-français mais bien l’indicateur européen. C’est conforme à notre volonté d’éviter toute surtransposition. C’était la demande des agriculteurs », a ainsi déclaré Gabriel Attal lors d’une conférence de presse pour accélérer la sortie de crise du monde agricole, très mobilisé depuis le début de l’année.

Le Premier ministre a toutefois affirmé son intention de ne pas « renoncer à l’ambition de réduire de 50 % l’usage des pesticides d’ici 2030 », comme vous pouvez le voir dans la vidéo en tête d’article. Mais pour le chef de l’exécutif, la priorité est ailleurs pour l’instant : « s’assurer qu’aucune interdiction (de pesticide) ne se fasse sans solution », tout en évoquant des « moyens sans précédent pour trouver des alternatives au phytosanitaire ».

Ces annonces sur les pesticides, dévoilées quelques jours avant le coup d’envoi du Salon de l’Agriculture sont pourtant loin de faire l’unanimité. Notamment du côté des ONG écologistes, premières à défendre ce dispositif national, à l’inverse de l’industrie des pesticides et de la FNSEA, syndicat agricole majoritaire.

Attal, « champion de l’agrochimie »

Lors de la crise agricole, le gouvernement avait choisi de mettre « sur pause » le plan Ecophyto de réduction des produits phytosanitaires, dont le principal indicateur, le Nodu, est accusé par les agriculteurs de ne pas refléter les efforts déjà consentis par la profession. La FNSEA se satisfait donc de son remplacement par l’indicateur européen, le HRI1, comme nouvel outil de référence.

Un avis que ne partagent pas les ONG qui voient la relégation du Nodu comme une volonté du gouvernement de camoufler « 15 ans d’échecs ». Selon François Veillerette de Générations futures, « changer le Nodu » reviendrait à « changer la nature du plan » Ecophyto puisqu’abandonner cet outil de mesure ne permettrait plus d’évaluer de façon cohérente la trajectoire de réduction des pesticides, censés diminuer de moitié d’ici 2030 par rapport à 2015-2017. Un objectif pourtant réaffirmé par Gabriel Attal ce mercredi.

Le HRI1, récent outil européen, est « un très mauvais indicateur » car il « suit la dangerosité des substances actives estimée ’a priori’ » et « ne documente pas du tout les effets de cette substance une fois qu’elle est sous forme de pesticide mise dans la nature », abonde Jean Burkard, directeur du plaidoyer chez WWF France. Ce que partage également François Veillerette dans un tweet outré après les annonces du Premier ministre, renommé au passage par Générations Futures « le champion de l’agrochimie ». « Le gouvernement a décidé d’écouter exclusivement les demandes de la FNSEA, ignorant les voix de la société civile et les autres voix du monde paysan », dénonce aussi Greenpeace dans un communiqué.

Une réaction partagée par de nombreux élus écologistes, à l’instar de Marine Tondelier qui a dénoncé le sacrifice de Nodu et d’Ecophyto, « victime expiatoire du gouvernement, proposée en offrande aux agriculteurs alors que ce n’était pas leur demande ».

Cette colère est également partagée par la Confédération paysanne, troisième force syndicale du secteur agricole. Pour elle, les modifications d’indicateurs vont « à l’inverse du principe de simplification » et visent à réduire « artificiellement » l’usage des pesticides, sans réels « changement de pratiques » agricoles. Il faut dire que ce mouvement né des luttes paysannes altermondialistes prône un modèle agroécologique. Tout l’inverse de la FNSEA.

À voir également sur Le HuffPost :

Colère des agriculteurs : comment le surendettement est devenu un fléau dans la profession

Plan Ecophyto : huit associations écologistes claquent la porte d’une réunion avec le gouvernement