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Perquisitionné, Mélenchon dénonce la "police politique" de Macron

Jean-Luc Mélenchon a accusé mardi le gouvernement de manoeuvrer une "police politique" après les perquisitions à son domicile et dans une quinzaine de sites liés à La France insoumise, des accusations balayées par le Premier ministre Edouard Philippe. /Photo prise le 24 septembre 2018/REUTERS/Phil Noble

PARIS (Reuters) - Jean-Luc Mélenchon a accusé mardi le gouvernement de manoeuvrer une "police politique" après les perquisitions à son domicile et dans une quinzaine de sites liés à La France insoumise, des accusations balayées par le Premier ministre Edouard Philippe.

Une source proche de l'enquête a précisé à Reuters que ces perquisitions étaient conduites par l'Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF) dans une quinzaine de sites au total.

Elles s'inscrivent dans le cadre de deux enquêtes préliminaires ouvertes par le parquet de Paris : l'une à la suite d'une dénonciation relative à l'emploi des assistants parlementaires européens de LFI, l'autre après un signalement du président de la Commission nationale des comptes de campagne relatif à la campagne présidentielle de Jean-Luc Mélenchon.

"Est-ce encore l'État de droit ?", a lancé le chef de file de LFI, lors des questions au gouvernement à l'Assemblée, décrivant une opération ordonnée par un "procureur de circonstance (...) nommé après un entretien d'embauche".

"Je suis président d'un groupe d'opposition, sept heures de perquisition chez mon chef de cabinet, vous avez tous mes rendez-vous depuis deux ans, vous avez aspiré tous les fichiers du mouvement LFI", a-t-il poursuivi sous les applaudissement des députés LFI ainsi que du Rassemblement national (RN).

Edouard Philippe a rejeté devant les députés toute remise en cause de l'indépendance de la justice.

"Dans l'accomplissement des procédures judiciaires, la justice est évidemment indépendante et il nous appartient de faire prévaloir ce principe d'indépendance", a-t-il poursuivi.

"JE NE ME LAISSERAI PAS FAIRE"

La président du RN, Marine Le Pen, elle aussi visée par des enquêtes, a proposé à Jean-Luc Mélenchon les services de ses avocats, fustigé une remise en cause des droits de l'opposition et comparé son sort à ceux des "dissidents" de l'ex-URSS.

"Je pense qu'un régime dans lequel il n'y a plus de séparation des pouvoirs est un régime totalitaire", a-t-elle dit à la presse, accusant le gouvernement de pomper "l'intégralité des échanges, des notes, des mails, des coups de téléphone, des contacts téléphoniques des deux grands partis d'opposition".

Dans une vidéo publiée sur son compte Facebook, le chef de file de LFI s'est filmé chez lui mardi matin, entouré de huit policiers procédant à des fouilles. Selon lui, les domiciles de neuf personnes liées à LFI et au Parti de gauche, en plus des sièges de ces mouvements, ont été visés par ces perquisitions.

L'ex-candidat à la présidentielle, qui se pose en principal opposant au chef de l'Etat, dit ne rien avoir à craindre concernant ses comptes de campagne et affirme n'avoir "peur de personne" en passant son écharpe tricolore de député.

Jean-Luc Mélenchon a ensuite dénoncé une "énorme opération de police politique" devant ses partisans appelés à se rassembler devant le siège de La France insoumise à Paris.

"C'est une volonté de leur part de nous intimider, de criminaliser notre action politique, je ne me laisserai pas faire", a-t-il lancé de manière véhémente sous les cris de "résistance" des ses soutiens. "Monsieur Macron est un petit personnage, et sa bande de ministre de la même nature."

ENQUÊTES SUR D'AUTRES PARTIS

L'immunité parlementaire, assouplie en 1995, interdit toute poursuite pour des actes accomplis en mission mais permet en dehors de ce champ la poursuite et la mise en examen d'un élu. Le bureau de l'Assemblée doit cependant autoriser toute mesure de privation de liberté.

Pour ce qui est du volet européen, la mise en cause de Jean-Luc Mélenchon a débuté par une dénonciation, en mars 2017, de Sophie Montel, eurodéputée du Front national, dénonciation qui impliquait en outre le MoDem et avait précipité la sortie du gouvernement de trois ministres issus des rangs centristes.

Soupçonnés d'avoir mis en place un système frauduleux pour rémunérer leurs permanents avec des deniers européens, plusieurs responsables du Rassemblement national (ex-FN), dont Marine Le Pen, ont déjà été mis en examen dans ce dossier.

Il y a un an, le siège du MoDem, à Paris, avait lui aussi fait l'objet d'une perquisition dans le cadre de cette enquête.

En matière de financement de la campagne présidentielle, le parquet de Paris a classé sans suite une plainte de l'association anticorruption Anticor visant les comptes d'Emmanuel Macron, Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon et Benoît Hamon en 2017.

Mais deux enquêtes préliminaires continuent de suivre leur cours, la première dirigée par le parquet de Lyon sur la campagne du candidat Macron dans cette ville, sur plainte du chef de file de l'opposition de droite lyonnaise, Stéphane Guilland (Les Républicains).

La seconde sur des soupçons de surfacturation concernant les comptes de campagne de Jean-Luc Mélenchon à la suite d'un signalement en mars de la Commission nationale, qui avait validé avec des corrections les comptes des onze grands candidats à l'élection présidentielle.

(Julie Carriat, Emmanuel Jarry et Elizabeth Pineau, avec service France, édité par Yves Clarisse)