Ces pays avec lesquels la France est en crise diplomatique

Entre la pêche, le Brexit et les questions migratoires, plusieurs différends existent entre la France et le Royaume-Uni.

La divulgation d'un SMS d'Emmanuel Macron par la presse australienne a brutalement ravivé les tensions diplomatiques entre la France et l'Australie. Mais il ne s'agit pas du seul pays avec lequel la France est en froid. Tour d'horizon.

Chose très inhabituelle, c'est la divulgation d'un SMS envoyé par un chef d'État qui a ravivé les tensions diplomatiques entre deux pays. Il s'agit en l'occurence d'un message envoyé par Emmanuel Macron au Premier ministre australien Scott Morrison au mois de septembre dernier, deux jours avant la rupture du "contrat du siècle".

  • Australie

Pour rappel, à la mi-septembre, l'Australie a décidé de rompre un contrat de 55 milliards d’euros conclu en 2016 avec la France pour la fourniture de sous-marins conventionnels afin de construire des sous-marins à propulsion nucléaire à l'aide de technologies américaines et britanniques. Une décision qui a déclenché une importante brouille diplomatique entre les deux pays. Le ministère des affaires étrangères Jean-Yves Le Drian évoquait un "coup dans le dos" de la part de l'Australie et critiquait également les États-Unis pour avoir annoncé un partenariat de sécurité avec l'Australie et le Royaume-Uni, l'accord AUKUS, dans la zone indo-pacifique sans que la France n'ait été consultée. Si Joe Biden s'est excusé et a reconnu sa maladresse, "Scott Morrison ne s'est absolument pas excusé", regrette l'entourage du président français.

La divulgation par la presse australienne de ce SMS (ndlr : "Dois-je m’attendre à de bonnes ou de mauvaises nouvelles pour nos ambitions communes en matière de sous-marins ?") envoyé par Emmanuel Macron a ravivé les tensions entre les deux pays. Vraisemblablement organisée par le Premier ministre australien, cette fuite a fortement irrité l'Élysée qui a confirmé sa véracité. Grâce à ce SMS, Canberra affirme que Paris était bien au courant d'une menace sur le contrat avant l'annonce de sa rupture alors que selon l'entourage d'Emmanuel Macron, il "montre qu'au contraire le président ne savait pas qu'ils dénonceraient le contrat".

  • Grande-Bretagne

Ces dernières semaines, les relations entre la France et la Grande-Bretagne sont très tendues pour plusieurs raisons. Il y a d'abord la gestion de la traversée des migrants ainsi que les droits de pêche dans le cadre du Brexit. Le premier problème existe depuis longtemps, mais les tensions se sont accentuées au début du mois d'octobre. Les autorités britanniques ont dû secourir dans la Manche 1 115 migrants qui tentaient de rejoindre l'Angleterre entre vendredi 8 et dimanche 10 octobre. 17 000 migrants ont réussi à faire la traversée de la Manche jusqu'en Angleterre depuis le début de l'année 2021, soit plus de deux fois plus que sur l'ensemble de l'année 2020. Une hausse inacceptable selon le commandant Dan O'Mahoney, chargé de la "menace clandestine" en Manche.

Les autorités britanniques n'hésitent pas à pointer du doigt la responsabilité de la France, ce qui n'a pas plu à Gérald Darmanin qui a rappelé que le gouvernement britannique n'a toujours pas versé les 62,7 millions d'euros promis pour financer le renforcement des forces de l'ordre françaises sur les côtes. "Nous appelons les Anglais à tenir leur promesse de financement puisque nous tenons la frontière pour eux", a déclaré le ministre de l'Intérieur. La France a par la suite réclamé un traité avec ses voisins britanniques sur les questions migratoires.

Depuis le Brexit, la crise de la pêche est devenu un sujet très sensible entre les deux pays. Paris reproche à Londres d'accorder en trop petit nombre des licences post-Brexit à ses pêcheurs dans les eaux britanniques. Alors que la France s'est vue accorder 200 licences pour ses pêcheurs, elle en réclame 244 de plus mais ne semble pas en mesure de les obtenir. Pourtant, la Grande-Bretagne affirme que des licences de pêche ont été accordées à 98% des pêcheurs européens ayant fait la demande. La France a donc menacé de renforcer des contrôles et d'interdire aux bateaux britanniques l'accès aux ports français dès le 2 novembre, avant de finalement renoncer. Une décision saluée par Londres, mais le problème n'est à ce jour toujours pas réglé.

VIDÉO - Crise de la pêche : les tensions se poursuivent entre Londres et Paris

  • Algérie et Maroc

Autres pays avec lesquels la France entretien des relations compliquées ces dernières semaines : l'Algérie et le Maroc. À la fin du mois de septembre, le gouvernement français a décidé de durcir les conditions d'obtention des visas à l'égard des pays du Maghreb. Une réduction annoncée de l'ordre de 50% qui a passablement agacé le Maroc, mais également l'Algérie qui a convoqué dès le lendemain l'ambassadeur de France à Alger et dénoncé "une décision unilatérale du gouvernement français".

Quelques jours plus tard, le quoitidien Le Monde a retranscrit des déclarations du président français tenues lors d'un échange avec des descendants de protagonistes de la Guerre d'Algérie qui n'ont fait qu'envenimer la situation. Emmanuel Macron a sévèrement critiqué la politique d’Alger estimant que le gouvernement algérien propageait un "discours qui repose sur une haine de la France". Suite à cela, le gouvernement algérien a rappelé son ambassadeur à Paris puis interdit le survol du territoire algérien aux avions militaires français en partance pour la bande sahélo-saharienne.

  • Biélorussie

Récemment, la France a affirmé son soutien à la leader de l'opposition biélorusse, Svetlana Tikhanovskaïa. Comme de nombreux autres pays de l'Union européenne, la France n'a pas reconnu les résultats de la présidentielle du mois d'août dernier qui ont accordé un sixième mandat à Alexandre Loukachenko. Une prise de position qui n'a fait qu'augmenter les tensions diplomatiques entre les deux pays et poussé la Biélorussie à expulser l'ambassadeur de France au mois d'octobre.

Officiellement, selon Minsk, cette décision a été prise en raison de l'absence de présentation des lettres de créance de l'ambassadeur au président Bélarus. Déjà au mois de mai dernier, la Biélorussie accusait la France de "piraterie aérienne", après que Paris a refusé son espace aérien à un avion biélorusse effectuant une liaison Minsk-Barcelone, rappelle Le Parisien.

  • Mali

Rien ne va plus entre le Mali et son principal allier militaire. À la base de ces tensions, l'annonce par Emmanuel Macron de la fin de l'opération militaire Barkhane au Sahel, où les troupes françaises sont engagées depuis 2014. Le Premier ministre malien Choguel Maïga ne digère pas cette décision qu'il considère comme un abandon : "Pendant qu'al-Qaida multiplie ses attaques, notre principal allié, en tout cas celui que nous croyions l'être, décide de quitter sa zone d'influence pour se concentrer sur les trois frontières. N'est-ce pas de l'abandon en plein vol ? Nous sommes en train de chercher des solutions".

Le gouvernement malien a par la suite annoncé explorer d'autres voies pour sa sécurité. Sergueï Lavrov, le chef de la diplomatie russe, a déclaré en conférence de presse que "les autorités maliennes se sont tournées vers une société militaire privée russe". Le Mali serait en passe d'entrer en collaboration avec la controversée société militaire privée russe Wagner pour remplacer la force Barkhane. La ministre des armées, Florence Parly a annoncé une "grave incompatibilité" entre le recours à ces mercenaires et le soutien occidental, et indiqué que le Mali pourrait perdre soutien de la communauté européenne. "Je ne connais pas de groupe Wagner. Le jour où le gouvernement malien va signer un accord [...], on le rendra public", a pourtant assuré de son côté Choguel Maïga.

VIDÉO - Mali : Macron qualifie de "honte" les propos du Premier ministre sur un "abandon" par la France