Qui est Pavel Dourov, co-fondateur de Telegram controversé arrêté à Paris

Le fondateur et PDG de Telegram, Pavel Durov, photographié lors d’une conférence en Espagne, le 23 février 2016.
Manuel Blondeau - Corbis / Corbis via Getty Images Le fondateur et PDG de Telegram, Pavel Durov, photographié lors d’une conférence en Espagne, le 23 février 2016.

INTERNATIONAL - Une énigme parmi les géants de la tech. À peine arrivé sur le sol français, le milliardaire franco-russe Pavel Durov a été arrêté et placé en garde à vue ce samedi 24 août. Le mystérieux co-fondateur de la messagerie Telegram a été interpellé alors qu’il descendait d’avion, à l’aéroport du Bourget près de Paris. Il était visé par un mandat de recherche français émis par l’Office mineurs (OFMIN) de la direction nationale de la police judiciaire française.

Arrestation du patron de Telegram : pourquoi le Franco-Russe Pavel Durov intéresse la justice française

« Il a commis une boulette ce soir. On ne sait pas pourquoi… Est-ce que ce vol n’était qu’une étape ? En tout cas, il est coffré ! », s’est alors exclamée une source proche de l’enquête auprès de TF1. « L’arrestation du président de Telegram sur le territoire français a eu lieu dans le cadre d’une enquête judiciaire en cours. Ce n’est en rien une décision politique. Il revient aux juges de statuer », a de son côté assuré Emmanuel Macron sur son compte X ce lundi 26 août.

L’homme de 39 ans était recherché par les autorités françaises pour des infractions allant de l’escroquerie au trafic de stupéfiants, au cyberharcèlement et à la criminalité organisée en passant par l’apologie du terrorisme et la fraude.

Toutes ces accusations ont un point commun : elles découlent de la pensée libertarienne assumée de Pavel Durov que ce dernier applique strictement a son site de messagerie cryptée, Telegram, laissant courir tous types d’échanges entre les utilisateurs. Se propagent ainsi sur la plateforme des théories complotistes, des appels au meurtre, ou encore des contenus pédocriminels. Mais Telegram n’est pas la première création de Pavel Durov.

Le « Mark Zuckerberg russe »

C’est en 2006, tout juste diplômé de l’université de Saint-Pétersbourg (Russie), que Pavel Durov s’est fait connaître. Le jour de ses 22 ans, il lance le réseau social VKontakte (VK), qui devient rapidement premier en Russie devant Facebook, ce qui a valu au jeune homme le surnom de « Mark Zuckerberg russe ».

Mais le succès de VK provoque des frictions et Durov, après avoir vendu la plateforme - reprise en main par des proches du pouvoir -, quitte la Russie en 2014. Il est alors en délicatesse avec le Kremlin pour avoir refusé de remettre aux services de sécurité russes (FSB) les données personnelles d’utilisateurs, notamment de militants pro-européens ukrainiens.

Développant avec son frère Nikolaï la messagerie Telegram - lancée en 2013 - tout en voyageant de pays en pays, il s’installe à Dubaï et obtient la citoyenneté de l’île caribéenne Saint-Kitts-et-Nevis puis, en août 2021, la nationalité française grâce à une procédure rare sur laquelle Paris reste très discret.

Telegram, un second succès fulgurant

Entre-temps, Telegram enregistre un succès fulgurant, se posant en champion des libertés individuelles, du refus de la « censure » et de la confidentialité de ses utilisateurs. Cela gêne : en 2018, un tribunal moscovite ordonne le blocage de l’application. C’est un fiasco et trois jours plus tard, des manifestants bombardent ironiquement le siège du FSB d’avions en papier, le symbole de Telegram.

Depuis, la Russie a abandonné ses efforts et la messagerie est utilisée par le pouvoir comme par l’opposition, certaines « chaînes » comptant plusieurs centaines de milliers d’abonnés. Telegram joue notamment un rôle essentiel dans la guerre en Ukraine, documentée par les blogueurs des deux camps qui y postent leurs analyses et d’innombrables vidéos des combats.

« Je pense que nous faisons du bon travail avec Telegram, avec 900 millions d’utilisateurs qui dépasseront probablement le milliard d’utilisateurs mensuels actifs d’ici un an », déclarait Pavel Durov en avril. Si sa plateforme est de plus en plus critiquée pour ses dérives, Pavel Durov assure pourtant répondre à chaque demande de suppression de contenu appelant à la violence ou au meurtre.

Un look tout droit sorti de « Matrix »

Absent des médias traditionnels, Pavel Durov n’hésite pourtant pas à se mettre en scène sur sa page Telegram, revendiquant mener une vie solitaire, s’abstenant de viande et d’alcool. Toujours vêtu du noir, il cultive sa ressemblance avec l’acteur Keanu Reeves dans le film « Matrix ».

En juillet, il se vantait d’être le père biologique de plus de 100 enfants grâce à ses dons de sperme dans une dizaine de pays. Un « devoir civique », disait-il, le rapprochant de la mouvance pro-nataliste à laquelle adhèrent Elon Musk et plusieurs milliardaires de la tech.

Selon le magazine Forbes, la fortune de Pavel Durov est estimée en 2024 à 15,5 milliards de dollars (13,38 milliards d’euros) mais le toncoin, la cryptomonnaie qu’il a créée, a dévissé de plus de 15 % depuis l’annonce de son arrestation.

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