Pathétique”, “irresponsable” : les médecins en colère après le message de Nicolas Bedos sur le coronavirus

“Pathétique”, “irresponsable”, “manque de respect”... Le message anti-masque de Nicolas Bedos suscite la colère de nombreux médecins, qui appellent à la responsabilité collective.

“Arrêtez tout. Les masques. Les confinements (...) “Vivons à fond, embrassons-nous, crevons, ayons de la fièvre”... Nicolas Bedos en a ras-le-bol des restrictions face au Covid-19, et l’a fait savoir sur les réseaux sociaux.

Un texte largement commenté par le corps médical, en première ligne face au Covid-19. “Je ne m’occupe pas des films qu’il réalise, je ne vois pas pourquoi il commente des décisions sanitaires d’une telle façon, sans argumenter”, s’indigne Michaël Rochoy, médecin généraliste dans le Pas-de-Calais.

“C’est contre-productif”

“S’il a un problème avec les gens qui prônent le port du masque, on est tous joignables. Mais écrire ceci, quand on est influent comme lui, c’est contre-productif”, ajoute le médecin, fondateur de stop-postillons, qui prônait le port du masque dès le 22 mars.

“Il a décidé qu’il pouvait vivre et laisser mourir les autres. Mais on a tous besoin de vivre normalement mais il faut faire des compromis, et penser aux plus fragiles. Qu’il ne pense pas que les gens qui prônent le port du masque sont aigris et vivent dans le noir” ajoute encore le médecin.

“Un manque de respect envers les malades et les soignants”

Si Stéphane Gaudry, professeur de médecine intensive à l’hôpital Avicenne de Bobigny, explique “comprendre” que Nicolas Bedos, “comme nous tous”, veuille un retour à la vie normale, il déplore ses propos. “Il ne dit pas ‘je suis contre la fermeture des bars’. Il dit ‘faites comme si ça n’existait pas’. C’est totalement irresponsable”, nous explique le médecin.

Pour lui, qui exerce en réanimation, les propos de Nicolas Bedos sont “un dérapage total”, et un double manque de respect : “à la fois envers le personnel soignant, qui s’occupe des malades et qui a subi la première vague de plein fouet, et envers les personnes hospitalisées et leurs proches, notamment en réanimation”, déplore le médecin, qui invite l’humoriste à “venir voir comment on travaille dans les hôpitaux. On subit doublement la situation actuelle. À titre professionnel, on vit des choses très difficiles, et à titre personnel, comme tout le monde, en raison des restrictions”.

Un point de vue partagé par d’autres médecins sur Twitter, qui dénoncent des propos “pathétiques et irresponsables”.

Une “perte du bon sens”

Si les propos sont unanimement condamnés par la sphère médicale, certains médecins y voient un révélateur de la situation actuelle. “Evidemment je ne suis pas d’accord avec le fond de son propos. Mais il illustre l’hystérisation du débat, avec d’un côté, des mesures excessives des autorités, et de l’autre, des personnes qui font un rejet global de ces mesures, comme Nicolas Bedos”, estime le docteur Gérald Kierzek, qui déplore depuis plusieurs semaines l’absence de discours de modération et la “perte du bon sens”.

Le médecin urgentiste à l'hôpital Hôtel-Dieu à Paris craint que l’influence de Nicolas Bedos n’influence le comportement de certains : “Le risque c’est la désobéissance civile, la révolte. La prise de mesures trop drastiques comme à Marseille contribue à cliver la population et renforce les discours comme celui de Nicolas Bedos”, redoute Gérald Kierzek.

Même son de cloche chez le docteur Jérôme Marty : “Ces propos-là, ça veut dire ‘je mets en péril l’autre qui n’a rien demandé’. Ce n’est pas possible”, déplore le patron de l'UFML-S qui admet pouvoir comprendre ces propos. “Cela fait plus de 6 mois qu’on est impactés, que nos vies sont changées. Je comprends que cela engendre de la colère, d’autant que les décisions prises manquent de concertation. Mais c’est une somme de combats individuels qui fera la victoire collective, donc il faut continuer à se protéger, malgré le ras-le-bol”, conclut Jérôme Marty.