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«Patagonia», méfaits d’hiver

Dans un premier film subtil, l’Argentin Emiliano Torres sublime l’affrontement de deux fermiers aux confins d’une terre hostile.

Désigner l’absence et condamner le prétendu vide. «Il n’y a rien là-bas», sanctionne Evans (Alejandro Sieveking), l’aîné aux origines anglo-saxonnes qui vient d’être remercié, après avoir sacrifié quarante années de sa vie comme contremaître d’une estancia (vaste exploitation agricole en Patagonie, zone de production de laine et viande ovine). Evans est un poids à demi mort pour sa profession, on l’a bazardé là, au croisement d’une route qui se dessine comme l’ardoise de son destin maintenant incertain.

Ce «rien» sonne le bilan d’un homme pétri de déception et d’aigreur. Mais aussi la formule abusivement humaine qui consiste à évoquer un paysage aride, monotone, un lieu qui, déserté de la compagnie de l’homme, n’a apparemment plus de raison d’être perçu comme fructueux.

Rosier tenace. Pourtant, au beau milieu de ce paysage hostile situé au sud-ouest de Santa Cruz, dans le premier long métrage mesuré et subtil du réalisateur argentin Emiliano Torres, Patagonia, El Invierno, ce n’est aucunement le néant qui préside. Evans, chaperon de l’élevage des moutons, se trouve évincé par la relève, le jeune saisonnier Jara (Cristian Salguero), élu pour prendre sa place. Réservé et discipliné, ce dernier doit acquérir l’autorité d’un chef et accepter le dur labeur hérité. La rafale hivernale accoste et avec celle-ci un cheptel de dangers : le bétail et l’infrastructure semblent constamment menacés par les pilleurs, la sévérité glaciale du domaine gèle les mouvements et les espoirs, la solitude ronge la force.

Face à la triste résolution d’Evans, personnage bouté hors du territoire, qui se montre écrasé sous le poids d’un tournant injuste, nu et affaibli sous sa douche - en somme disloqué -, on ne s’attend pas au drame-thriller-western contemporain qui se dessine peu à peu. Une menace plane dans l’estancia et ses hauteurs aux contours escarpés…

Destin (...)

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