Passe d'armes entre Schäuble et Gabriel sur la politique européenne

BERLIN (Reuters) - Le ministre allemand des Finances, le conservateur Wolfgang Schäuble, a déploré vendredi matin que son collègue chargé des Affaires étrangères, le social-démocrate Sigmar Gabriel, ait estimé que l'Allemagne devait accroître sa contribution financière à l'Union européenne en général et à la Grèce en particulier. Ce message, a-t-il dit sur l'antenne de la Deutschlandfunk, "va totalement dans la mauvaise direction". Le problème de l'Europe, a poursuivi Schäuble, n'est pas un problème d'argent, mais un problème d'utilisation de cet argent. "Cela m'a contrarié d'entendre M. Gabriel en déplacement en Grèce faire passer aux Grecs un message qui ne les aide pas mais qui au contraire rend plus difficiles les bonnes décisions qu'ils doivent prendre", a ajouté le ministre des Finances. Cette passe d'armes s'inscrit dans le contexte des élections législatives à venir en Allemagne. A six mois du scrutin, les instituts de sondage donnent le bloc chrétien démocrate CDU-CSU d'Angela Merkel et Wolfgang Schäuble et le Parti social-démocrate (SPD) de Martin Schulz et Sigmar Gabriel au coude à coude dans les intentions de vote. Sigmar Gabriel, qui était cette semaine en déplacement à Athènes, plaide depuis des mois pour un allègement de la dette de la Grèce et estime qu'il faut sortir le pays de sa situation actuelle, où le déblocage des tranches du plan de renflouement financier est conditionné à de nouvelles mesures d'austérité. Dans une tribune parue mercredi dans le quotidien Frankfurter Allgemeine Zeitung, il dénonce la vision déformée que les Allemande ont de leurs relations avec leurs partenaires européens selon laquelle la première puissance économique du continent serait la "bête de somme" de l'Union européenne payant pour les "Européens paresseux". Cette "vision faussée" de la réalité, poursuit-il, a conduit "pratiquement tous les gouvernements fédéraux (allemands) de ces trente dernières années à tenter lors des négociations financières au sein de l'Union européenne de réduire notre 'position de contributeur net'". "La vérité, ajoute-t-il, c'est que l'Allemagne n'est pas un contributeur net de l'Europe, mais un bénéficiaire net de l'Europe. Naturellement, nous contribuons davantage au budget européen que nous ne recevons de fonds des programmes européens de financement. Mais ce n'est qu'une petite partie de l'équation. Nous exportons près de 60% de nos biens et services vers l'Union européenne, et même pas 10% vers la Chine (et les USA)", argumente-t-il. (Michelle Martin et Gernot Heller; Henri-Pierre André pour le service français)