Le « Pass Rail » allemand bientôt imité en France ? Voici les avantages et ce qu’il manque à ce billet

En Allemagne, un billet unique permet d’emprunter transports en commun, trains régionaux et même parfois des ferries. Un modèle qui inspire l’exécutif français (photo d’illustration prise en gare de Stuttgart en août 2021).
THOMAS KIENZLE / AFP

TRANSPORTS - « Je suis favorable à créer un Pass Rail sur le modèle existant en Allemagne. Toutes les régions qui sont prêtes à le faire avec l’État, banco ! » Voici comment, au cours de son interview par le YouTubeur HugoDécrypte, Emmanuel Macron a inauguré en début de semaine le chantier d’un billet de train unique qui permettrait de sillonner la France à un tarif réduit.

Une idée inspirée du modèle allemand du « Deutschland-Ticket » sur lequel le ministre délégué aux Transports Clément Beaune a commencé à travailler, évoquant ce jeudi 7 septembre sur France 2 un billet servant à voyager sans limite et quel que soit son âge sur les trains Intercités et TER pour « autour de 49 euros ».

Mais à quoi les politiques français font-ils réellement référence quand ils évoquent ce modèle allemand, dont la gauche et notamment les écologistes réclament depuis des années que la France s’inspire ?

Un billet mensuel unique

Pensé comme une manière de pousser la population à prendre le train et à éviter la voiture à des fins écologiques, en Allemagne, le pass ferroviaire est vendu au prix de 49 euros par mois, ce qui revient à environ 1,60 euro par jour. Valable dans toutes les villes du pays, il permet d’y emprunter les transports en commun (bus, tram, métro), mais aussi les trains régionaux donc, et même occasionnellement les ferries (à Hambourg ou sur le lac de Wansee à Berlin notamment).

Si le modèle était retranscrit de la même manière en France, cela signifiera par exemple qu’un acheteur parisien du « Pass Rail » à la française pourrait se rendre au travail la semaine en métro, faire des courses en banlieue en RER le week-end et s’offrir un périple à travers la France en trains régionaux pendant ses vacances. Tout cela avec un seul ticket 40 % moins cher que le seul pass Navigo mensuel.

En Allemagne, c’est ce genre d’économies qui a fait le succès du « Deutschland-Ticket » : des millions d’usagers des transports se sont abonnés, divisant jusqu’à trois fois le prix de leur seul abonnement de transports du quotidien (la radio publique NDR avait estimé à 600 euros les économies annuelles réalisées par un habitant de Hanovre). Et donc de bénéficier de ristournes encore plus importantes si l’on prend en compte des déplacements interrégionaux, pour des week-ends ou des vacances par exemple.

C’est d’ailleurs une expérimentation menée à l’été 2022, et qui a rencontré un immense succès, qui a convaincu les autorités de le pérenniser. Alors qu’il était testé à 9 euros pendant trois mois, 52 millions de pass ont été vendus à l’époque. Passé à 49 euros une fois lancé définitivement le 1er mai dernier, le billet s’est écoulé à environ 11 millions d’unités depuis.

Inégalités et financement

Sauf qu’il y a un hic. Et même plusieurs. En effet, depuis que la mesure a été expérimentée, nombreuses sont les critiques qui ont émergé à l’encontre du « Deutschland-Ticket ». À commencer par les inégalités qu’il induit. Car si le billet unique a été pensé comme un outil de justice sociale permettant à tous de voyager à bas prix, il s’avère que dans certaines régions moins bien dotées en transports en commun, il se révèle superflu.

« Si vous avez l’habitude de rouler dans une région où il existe un seul bus, qui passe une seule fois par jour, cette offre n’a pas d’utilité », déplorait par exemple, dès novembre 2022, le président de la région de Bavière, comme le rapportaient à l’époque nos confrères de France Culture. Et certains responsables politiques de réclamer qu’au lieu de financer ce « Deutschland-Ticket », les pouvoirs publics renforcent plutôt l’offre de transports.

De plus, et c’est un problème qui pourrait se poser en France, l’abonnement ne comprend que l’accès aux lignes régionales. Avant même le lancement de l’offre, des associations de consommateurs s’inquiétaient d’assister à une flambée des prix causée par des compagnies ferroviaires désireuses de combler le manque à gagner. Et les défenseurs de la justice sociale regrettaient un prix déjà trop élevé pour garantir un accès à tous.

Dernière difficulté : la question du financement, qui a immédiatement surgi de notre côté du Rhin. En effet, en Allemagne comme en France, les collectivités locales financent largement les trains régionaux. Et avec un coût annuel de trois milliards d’euros chez nos voisins (50 % pour l’État et autant pour les régions), les négociations concernant le budget du renouvellement patinent déjà. Même chose chez nous où plusieurs régions ont d’ores et déjà fait connaître leurs réticences à financer ce nouvel outil. Et elles ne sont pas les seules avec lesquelles il y aura débat puisqu’il faudra également travailler avec les différents opérateurs de transports en commun, partout en France et dans les métropoles. Avec le risque, peut-être, in fine, de voir le prix de ce ticket « magique »  flamber. Si tant est qu’il voie le jour.

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