Paris a dénoncé des faits présumés de torture au Maroc

PARIS (Reuters) - Le parquet de Paris a dénoncé le 27 mars dernier à la justice marocaine des faits de torture présumés qui auraient été commis au Maroc à l'encontre d'un Franco-Marocain, sur ordre du patron du renseignement marocain, a-t-on appris mardi de source judiciaire. Le dépôt de plusieurs plaintes à Paris visant Abdellatif Hammouchi pour "torture" et "complicité de torture" avait poussé Rabat à suspendre sa coopération judiciaire avec la France le 27 février 2014. La demande, par un juge français, d'entendre le haut fonctionnaire lors d'un passage à Paris avait scellé la rupture, qui a duré près d'un an. Les faits dénoncés par le parquet de Paris sont relatifs à une plainte déposée par Zakaria Moumni, un ancien boxeur, en février 2014. Il dit avoir été torturé pendant quatre jours sur ordre d'Abdellatif Hammouchi. Au terme d'une enquête préliminaire, le parquet a jugé "opportun" de dénoncer les faits aux autorités marocaines, explique une source judiciaire, qui souligne que cette procédure est assez "classique" quand la personne visée se trouve à l'étranger. "Le parquet considère qu'il y a un certain nombre d'éléments qui ont été réunis dans le cadre de l'enquête", dit cette source. "A charge pour les autorités marocaines de poursuivre le dossier", ajoute-t-elle, soulignant qu'il ne s'agit pas d'un dessaisissement. Après une rupture qui a duré près d'un an, la coopération judiciaire entre Paris et Rabat n'a repris que le 31 janvier dernier, après que les autorités des deux pays se furent mises d'accord sur un texte amendant leur convention d'entraide judiciaire. Cet accord, qui devra être ratifié par les parlements des deux pays, suscite l'inquiétude de nombreux défenseurs des droits de l'Homme en France, où la Commission nationale consultative des droits de l'Homme (CNCDH) s'apprête à demander son rejet par les parlementaires. Cette autorité indépendante, dont les avis sont consultatifs, craint des risques de violation par la France de ses obligations internationales si cet accord entrait en vigueur. Le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve a annoncé début février qu'Abdellatif Hammouchi se verrait remettre "prochainement" les insignes d'officier de la Légion d'honneur. (Chine Labbé, édité par Sophie Louet)