“Et si mon père était un agent secret ?” : les révélations de Frédéric Beigbeder

Avec Un homme seul (éd. Grasset), Frédéric Beigbeder signe un livre à la fois enquête et confession, plongeant dans les mystères de la vie de son père, Jean-Michel Beigbeder. Dans une interview exclusive à décourvrir dans votre Point de Vue 3987, l’écrivain se livre avec une sincérité désarmante sur cette quête intime et l’impact qu’elle a eu sur lui.

Jean-Michel Beigbeder et Frédéric Beigbeder exceptionnellement réunis en 2011.

"Tout est parti d’un discours que j’ai dû prononcer pour son enterrement. J’ai senti qu’il y avait pas mal de zones d’ombre et de choses à creuser, j’ai commencé à fouiller..." Malgré ses réticences à écrire ce livre, cette enquête sur l’histoire de son père – entrepreneur à succès disparu en septembre 2023 – a permis au créateur du Prix de Flore de mieux comprendre sa propre trajectoire. "Même si mon père a toujours été assez absent, tant qu’il était vivant, sa figure paternelle me permettait de me comporter comme un enfant – ce dont je ne me suis pas privé jusqu’à mes 58 ans. Et brutalement, me voilà propulsé au statut d’adulte. Cette enquête était presque indispensable pour que je puisse devenir enfin moi-même ".

En fouillant les archives familiales, il a découvert des secrets inattendus : "Quand, dans un des tiroirs de son bureau et dans une enveloppe 'à ne pas ouvrir avant ma mort', j’ai trouvé deux passeports américains au nom de son ancêtre écrivain (William Harben), j’ai passé quelques coups de fil. (…) Mon père était-il un agent secret ? Je ne saurai jamais la vérité. Au moins avec ce livre en ai-je fait un héros de roman."

Au-delà des révélations, Beigbeder explore aussi le poids de l’héritage familial et la difficulté de briser les schémas du passé : "Quand on regarde tout ce que j’ai fait dans ma vie, c’est fou ce que j’ai été loyal à mon père, à ce mythe du play-boy, qui délaisse très vite femme et enfants, et ne pense qu’au sexe et à l’argent. J’ai parfois l’impression d’avoir vécu plusieurs décennies dans le même brouhaha permanent que lui, pour éviter de me regarder en face. Les nuits, les drogues, le sexe, l’alcool, tout ça pour ne pas être confronté à la solitude et à la vérité."

Au final, c’est dans son rôle de père que Beigbeder trouve une rédemption : "J’essuie les plâtres et je fais sans doute des tas d’erreurs, mais au moins je suis présent. J’ai trois enfants, dont un garçon de 6 ans. Dans vingt ou trente ans, peut-être mon fils écrira-t-il un livre pour se plaindre du père étouffant que j’étais..."

Retrouvez notre interview en intégralité ici : Frédéric Beigbeder : "Mon père, cet inconnu"