Ouverture à Tokyo du sommet Asean-Japon sans la Chine

Le Premier ministre japonais Shinzo Abe. La Chine, bien qu'absente, est au coeur d'une réunion à Tokyo entre le Japon et l'Asean après la création unilatérale par Pékin d'une zone aérienne de défense en mer de Chine orientale. /Photo prise le 13 décembre 2013/REUTERS/Toru Hanai

par Elaine Lies TOKYO (Reuters) - La Chine, bien qu'absente, est au coeur d'une réunion à Tokyo entre le Japon et l'Asean après la création unilatérale par Pékin d'une zone aérienne de défense en mer de Chine orientale. Le sommet de l'Association des nations du Sud-Est asiatique et le Japon s'est ouvert vendredi sur un appel des Philippines à régler pacifiquement les litiges territoriaux. "Nous avons réaffirmé notre engagement à respecter le droit, à promouvoir le règlement pacifique des contentieux et à assurer la liberté de mouvement dans l'espace aérien international", a dit à la presse le président philippin, Benigno Aquino, après un entretien avec le Premier ministre japonais, Shinzo Abe. Le chef de l'Etat philippin n'a pas cité directement la Chine devant la presse en compagnie de son hôte nippon, qui a fait du renforcement de ses liens avec les dix Etats membres de l'Asean une priorité depuis son arrivée au pouvoir il y a un an. Officiellement, le sommet de Tokyo célèbre le 40e anniversaire de l'établissement de relations diplomatiques à part entière entre le Japon et les pays de l'Asean. Généralement, le sommet de l'Asean, fondée en 1967, est accompagné d'une réunion dite de l'Asean +3, c'est-à-dire la Chine, le Japon et la Corée du Sud. Mais cette année, Pékin et Séoul n'ont pas été invités, l'intention n'étant pas d'exclure la Chine, insiste le pays hôte. NOUVELLE FRÉGATE CHINOISE Toutefois, dit un diplomate philippin de haut rang, les litiges maritimes et la création, le 23 novembre, de la zone aérienne chinoise au-dessus d'îles administrées par les Japonais mais revendiquées par Pékin "seront assurément débattues", ces sujets ayant été inscrits à l'ordre du jour par le pays organisateur. Le communiqué final du sommet, attendu samedi, devrait affirmer le principe de la liberté de mouvement dans les airs et sur les mers, sans toutefois mentionner la Chine. Vendredi, les médias officiels chinois ont tiré à boulets rouges sur le Japon, l'agence de presse Chine nouvelle reprochant à l'avance à Shinzo Abe de "reprendre son petit jeu visant à accuser la Chine" lors du sommet de Tokyo. "Nous pensons que quiconque doté de la moitié d'un cerveau sait pertinemment que c'est le Japon qui a le premier mis délibérément le feu à la région", écrit Chine nouvelle. L'agence annonce en outre le lancement d'une frégate lance-missiles, baptisée "Sanya" et présentée comme faisant partie d'une nouvelle génération de navires de guerre "spécialement adaptés aux missions de surveillance à longue distance et au combat anti-aérien". FERMETÉ AMÉRICAINE Shinzo Abe, qui a visité tous les pays de l'Asean depuis son entrée en fonctions, ne s'est toujours pas rendu à Séoul ou à Pékin. L'instauration par la Chine de la zone aérienne d'identification et de défense a été condamnée par les Etats-Unis et ses deux plus proches alliés asiatiques, le Japon et la Corée du Sud. Depuis le 23 novembre, la Chine demande à tous les appareils entrant dans la zone de s'identifier au préalable. Cette zone englobe des îlots inhabités administrés par le Japon et revendiqués par la Chine, appelés Senkaku par Tokyo et Diaoyu par Pékin. En envoyant la semaine dernière deux bombardiers B-52 non armés dans cette zone sans en avertir Pékin, l'administration Obama, liée à Tokyo par des accords de défense, a affiché la même fermeté que le gouvernement japonais, tout en conseillant aux avions de ligne américains de se plier aux nouvelles exigences chinoises. Le différend territorial sur les cinq îles et trois rochers Senkaku/Diaoyu empoisonne depuis des mois les relations bilatérales. L'intérêt de ces îlots inhabités est avant tout économique en raison des ressources halieutiques et des indices d'importants gisements d'hydrocarbures. Ils présentent aussi un intérêt stratégique pour la marine chinoise ou américaine. Les autres dirigeants de l'Asean ont plaidé pour une amélioration des liens entre Pékin et Tokyo. "Il faut affirmer que l'établissement de bonnes relations entre le Japon et la Chine revêt une importance critique pour l'avenir de notre région", a ainsi déclaré à la tribune le président indonésien, Susilo Bamgbang Yudhoyono. Avec Ben Blanchard à Pékin, Jean-Loup Fiévet pour le service français, édité par Gilles Trequesser