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Ottawa demande à Washington de ne pas politiser les cas d'extradition

OTTAWA (Reuters) - Le Canada a prévenu mercredi les Etats-Unis qu'il ne fallait pas politiser les affaires d'extradition, après que Donald Trump a dit mardi être disposé à intervenir dans la procédure judiciaire engagée contre une dirigeante du groupe chinois Huawei, arrêtée au Canada sur demande des autorités canadiennes.

La directrice financière du géant chinois des télécoms Huawei, Meng Wanzhou, fille du fondateur de la firme, a été arrêtée le 1er décembre à Vancouver alors qu'elle était en transit entre deux vols.

Elle est accusée par les Etats-Unis d'avoir dissimulé des liens existant entre l'équipementier télécoms chinois et une société qui essayait de contourner les sanctions américaines contre l'Iran. Meng est passible de poursuites pour conspiration en vue de frauder de multiples institutions financières, avec une peine pouvant aller jusqu'à 30 ans de prison pour chacun des chefs d'accusation qui la visent.

La Chine a rejeté les accusations visant la dirigeante de Huawei et a demandé sa libération immédiate.

Un juge canadien a autorisé mardi la remise en liberté sous caution de Meng Wanzhou, dans l'attente d'une audience d'extradition vers les Etats-Unis fixée à février prochain.

Plusieurs journaux chinois ont dit jeudi que le Canada devait prendre ses distances avec l'"hégémonie" des Etats-Unis et libérer Meng Wanzhou sans conditions.

"Washington se trompe s'il pense qu'il peut prendre Meng comme otage et l'utiliser comme rançon pour des concessions dans les discussions commerciales à venir", écrit le China Daily, voix officielle de Pékin en langue anglaise.

Dans un entretien qu'il a accordé à Reuters mardi dans le bureau Ovale de la Maison blanche, Donald Trump a déclaré qu'il pourrait intervenir auprès du département américain de la Justice si cela était nécessaire pour parvenir à un accord commercial avec la Chine.

Auditionné par le Sénat, l'Attorney General adjoint a déclaré mercredi que le département de la Justice n'était "pas un instrument commercial".

La ministre canadienne des Affaires étrangères a dit mercredi aux journalistes que les procédures judiciaires ne devaient pas être détournées au profit de desseins politiques.

Chrystia Freeland a par ailleurs déclaré qu'un deuxième ressortissant canadien était injoignable en Chine, après qu'un diplomate canadien y a été placé en détention lundi.

Les Etats-Unis n'ont pas encore formulé une demande officielle d'extradition pour Meng Wanzhou.

Une fois transmise au Canada, toute demande d'extradition est étudiée par un juge. Si celui-ci se prononce favorablement, le dossier est transmis au ministre de la Justice qui a le dernier mot.

Des représentants du gouvernement canadien avaient dit auparavant que Meng Wanzhou disposait de nombreux moyens légaux pour protester contre une extradition et que la procédure judiciaire pourrait prendre des années.

(David Ljunggren, avec Anna Mehler Paperny, Allison Martell et Denny Thomas à Toronto, Julie Gordon à Vancouver, Patricia Zengerle à Washington, David Stanway à Shanghai ; Jean Terzian pour le service français)