Orwell, empreint d’Espagne

Leur vie est un roman (1/6). Ecrivains célèbres, ils auraient pu inspirer d’autres auteurs tant leur vie fut riche d’aventures. Aujourd’hui, Eric Blair, alias George Orwell, marqué par la guerre civile espagnole.

Orwell a peine à y croire. Recroquevillé dans sa cabane de la montagne d’Aragon, affamé, serré dans une maigre couverture, il lit dans les journaux le récit de l’attaque fasciste qu’il vient d’arrêter avec ses camarades des milices républicaines. «Une offensive de grande envergure, avec cavalerie et tanks, a été magnifiquement repoussée par les héroïques Anglais.» Il éclate d’un rire amer. La fragile position qu’il tient sur la crête du Monte Oscuro, dans l’hiver coupant de l’Aragon, a subi un assaut hésitant deux nuits plus tôt. Après quelques tirs, les franquistes se sont retirés sur leurs lignes. Une escarmouche tout au plus que les journaux ont changée en «offensive de grande envergure ». Et dans cette fiction, l’apparition des tanks est franchement comique : le poste d’Orwell domine un versant à pic. Un char ne pourrait l’attaquer qu’en volant.

Le bourrage de crâne est monnaie courante en temps de guerre. Nulle surprise dans ces exagérations. Mais Orwell sait aussi que les journaux paraissent à Barcelone, où les Soviétiques ont pris l’ascendant. La fable qu’il vient de lire n’est pas seulement une pieuse propagande. Elle traduit le rapport lointain et pervers du communisme avec la vérité et qui lui semble chaque jour plus angoissant. «Tôt dans ma vie, écrira-t-il, j’ai remarqué qu’aucun événement n’avait jamais été relaté avec exactitude dans les journaux ; mais en Espagne, pour la première fois, j’ai lu des articles de journaux qui n’avaient aucun rapport avec les faits, ni même l’allure d’un mensonge ordinaire. J’ai vu l’histoire rédigée non pas conformément à ce qui s’était réellement passé, mais à ce qui était censé s’être passé selon les diverses "lignes de parti". Ce genre de choses me terrifie, parce qu’il me donne l’impression que la (...)

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