Opération militaire, civils tués: situation critique au Haut-Karabakh entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan
L'Azerbaïdjan a lancé mardi 19 septembre une opération militaire au Haut-Karabakh et demandé le retrait "total et inconditionnel" de son adversaire arménien, avec lequel il se dispute cette région depuis des décennies. Une intervention qui vient à nouveau raviver les fortes tensions entre les deux pays.
Au moins 2 civils tués et 23 blessés dans une opération militaire
Le ministère azerbaïdjanais de la Défense a évoqué mardi matin le lancement d'"opérations antiterroristes" pour mettre hors d'état de nuire "les positions des forces armées arméniennes".
Les séparatistes arméniens présents dans cette enclave du Haut-Karabakh ont affirmé que la capitale Stepanakert, et d'autres villes étaient ciblées par des "tirs intensifs", accusant l'Azerbaïdjan de mener "une opération militaire de grande envergure".
Les séparatistes ont annoncé que les combats ont fait au moins 5 morts et 80 blessés.
Des tensions qui font resurgir le conflit de 2020
Bakou a justifié son opération par la mort de quatre policiers et deux civils azerbaïdjanais dans l'explosion de mines sur le site d'un tunnel en construction entre Choucha et Fizouli, deux villes du Nagorny Karabakh sous contrôle de l'Azerbaïdjan. Les services de sécurité azerbaïdjanais pensent qu'un groupe de "saboteurs" des séparatistes arméniens a posé ces mines, commettant un acte de "terrorisme".
Les autorités azerbaïdjanaises ont aussi accusé l'armée arménienne d'avoir blessé deux militaires azerbaïdjanais lors de tirs de mortier et d'armes légères dans le nord-est du Karabakh, et d'avoir tiré dans la nuit avec des armes légères vers des positions de l'Azerbaïdjan dans le district de Gadabay, à la frontière entre les deux pays.
L'Azerbaïdjan accuse aussi les séparatistes arméniens d'avoir visé - via des interférences radioélectriques - le système GPS d'un avion de ligne azerbaïdjanais.
Le précédent conflit, en 2020, avait débouché sur une déroute militaire arménienne, Erevan ayant dû céder à Bakou des territoires dans et autour du Haut-Karabakh. Un cessez-le-feu négocié par la Russie avait été signé, impliquant le déploiement sur place de soldats de la paix russes, mais les belligérants ne sont jamais parvenus à un accord de paix.
L'Arménie dénonce des appels à un "coup d'État"
Le Premier ministre arménien Nikol Pachinan, qui a réuni son Conseil de sécurité, a par ailleurs dénoncé des appels à un "coup d'État" en Arménie, alors que la télévision faisait état de centaines de manifestants massés devant le siège du gouvernement.
Erevan accuse Bakou de provoquer une crise humanitaire à des fins d'épuration ethnique en bloquant le corridor de Latchine, seule route reliant le Haut-Karabakh à l'Arménie, ce qui a provoqué de graves pénuries de nourriture et de médicaments. Les tensions avaient pourtant diminué d'un cran lundi avec l'arrivée d'aide humanitaire dans l'enclave.
L'Azerbaïdjan, qui a promis mardi après-midi de respecter les "droits et la sécurité" des Arméniens du Haut-Karabakh, a apppelé les forces séparatistes à "rendre les armes" en vue de proposer des pourparlers.
Paris veut une réunion d'urgence du Conseil de sécurité de l'ONU
L'Azerbaïdjan a précisé avoir informé la Russie et la Turquie de ses opérations dans l'enclave, et Moscou a ensuite dit n'avoir été prévenue que "quelques minutes" avant leur début. Le Kremlin, "préoccupé", a dit par la voix de son porte-parole essayer de convaincre l'Arménie et l'Azerbaïdjan de revenir "à la table des négociations".
La France, par la voix de Catherine Colonna, a demandé "la convocation d'urgence d'une réunion du Conseil de sécurité des Nations unies", en condamnant l'opération militaire de l'Azerbaïdjan, tenu pour "responsable du sort des populations.
"Cette offensive doit cesser immédiatement", a écrit la ministre des Affaires étrangères sur X, ex-Twitter.
Dans le même temps le Premier ministre arménien a évoqué au téléphone avec Emmanuel Macron l'opération militaire lancée par l'Azerbaïdjan, appelant à la "désescalade".
Le secrétaire d'Etat américain, Antony Blinken, a dit qu'il allait prendre contact avec les deux parties. Le président du Conseil européen, Charles Michel, qui a mené une médiation par le passé entre les deux pays, a lui jugé que l'Azerbaïdjan devait "immédiatement" cesser son opération.