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Olivier de Germay archevêque de Lyon, un saint-cyrien pour remplacer Philippe Barbarin

Olivier de Germay - Pascal POCHARD-CASABIANCA
Olivier de Germay - Pascal POCHARD-CASABIANCA

L'ère de Philippe Barbarin s'est close définitivement le 6 mars 2020 dans l'archevêché de Lyon, avec l'acceptation de sa démission par le pape François, un an après s'être mis en retrait en marge des procédures déclenchées par l'affaire Preynat. Le diocèse rhodanien a appris ce jeudi le nom de son successeur et nouveau prélat: Olivier de Germay, 60 ans, évêque d'Ajaccio depuis 2012. Homme de réflexion trempé à l'origine dans l'action militaire, son arrivée à Lyon couronne une longue odyssée personnelle.

Une ascension rapide

Comme monseigneur Michel Aupetit, archevêque de Paris depuis la fin de l'année 2017, Olivier de Germay est entré tard au séminaire. Mais passé son ordination le 17 mai 1998 auprès de l'archidiocèse de Toulouse, il a connu une trajectoire météorique, comme le rappelle son C.V.: vicaire puis curé de Castanet entre 1999 et 2006, aumônier diocésain des Guides de France en parallèle entre 1999 et 2001, doyen de la zone "'Banlieues-Sud" de Toulouse entre 2003 et 2006, il est ensuite prêtre de Beauzelle jusqu'en 2012 et vicaire épiscopal.

Il y a huit ans, celui qui a aussi été désigné doyen de Blagnac quitte la Haute-Garonne pour Ajaccio et sa première mitre. À l'échelon national, il intègre la commission pour la catéchèse et le catéchuménat (la préparation à la confirmation pour les adultes déjà baptisés, NDLR) mais aussi le groupe de travail consacré aux réflexions bioéthiques.

Le choix des armes

Mais, de prime abord, c'est moins sa carrière ecclésiastique que les circonstances qui l'y ont poussé qui frappent les esprits. En effet, si dans l'entretien inaugural diffusé ce jeudi par l'archidiocèse de Lyon, il explique que sa foi est "enracinée dans l'expérience familiale", force est de constater que la vocation n'a pas été immédiate.

Ce fils de général, comme le souligne ici La Vie, niché au sein d'une fratrie de cinq enfants, avait lui aussi choisi les armes. Élève de Saint-Cyr à Coëtquidan, il en est sorti avec un diplôme d'ingénieur militaire. Olivier de Germay prend vite du galon et devient officier au sein du 1er régiment de hussards parachutistes de Tarbes. Déployé à plusieurs reprises, il sert notamment au Tchad et en Centrafrique.

Le désert et le "troisième jour"

C'est au coeur de l'Afrique qu'il perçoit en lui l'écho d'un appel. "J'ai vécu quelques jours dans le désert. J'y ai rencontré des gens qui vivaient avec trois fois rien et qui étaient plus heureux que moi. Des gens qui exhalaient une paix intérieure, alors que j'étais aux prises avec des sensations diffuses de mal-être", s'est-il souvenu en 2012 auprès de Corse Matin avant de poursuivre: "J'ai pris brutalement conscience qu'en menant une vie centrée sur moi-même, je m'éloignais de l'essentiel. À ce moment-là, je ne pensais pas devenir prêtre, j'avais seulement le désir irrépressible de changer de vie…"

Ce séjour dans le désert ne suffit donc pas à en faire un religieux mais dès son retour en France à la Toussaint 1990, il accomplit une retraite entre les murs de l'abbaye bénédictine de Fontgombault. Il tranche, ou plutôt qu'on l'aide à trancher. "C'est là que le Seigneur m'attendait. Le troisième jour, le moine avec qui j'avais beaucoup parlé m'a dit que j'avais la vocation", a-t-il encore raconté à Corse Matin.

Investi dans le débat public

Sur les grandes questions qui agitent la société, Olivier de Germay est naturellement sur la même ligne que l'Eglise, ce qui n'interdit pas de porter sa propre voix. En 2013, il participe à la Manif' Pour Tous tout en dénonçant la tentative de noyautage par les intégriste de Civitas, comme le note ici La Vie.

Trois ans plus tard, il s'investit pour la première fois dans le débat public en signant une tribune visant à protester contre l'absence de discussion autour de la suppression du délai de réflexion avant l'IVG dans la presse nationale, aux côtés de six autres évêques. "La dernière loi Santé n’est qu’une fuite en avant. La suppression de la notion de 'détresse', en 2014, et à présent du délai de réflexion avant de procéder à l’avortement revient à exercer une pression de plus sur les femmes", ont notamment écrit les prélats.

En 2018, il ne souhaite pas manifester contre l'extension de la PMA mais argumente son opposition à la loi auprès de La Croix. "La procréation ne peut rimer avec instrumentalisation ou marchandisation", a-t-il alors déclaré, ajoutant: "Nous pensons que l’enfant doit être voulu pour lui-même et non simplement pour satisfaire un désir d’adulte. Le priver volontairement de sa double référence paternelle et maternelle ne s’accorde pas avec 'les intérêts supérieurs de l’enfant' dont parle le Conseil d’État."

Une nomination "très biblique"

Au cours de cet échange, il a aussi évoqué succintement la pédophilie, soulignant la nécessité de "protéger la vulnérabilité". Le 20 décembre prochain, il sera installé, à travers une cérémonie à la cathédrale Saint-Jean-Baptiste, à la tête d'un archidiocèse particulièrement hanté par ces scandales qui collent l'appareil catholique depuis plusieurs décennies et l'assaillent encore régulièrement.

Au-delà, Olivier de Germay n'ignore pas la difficulté de sa tâche. Rapportant, durant la séance de questions-réponses menées avec l'Eglise de Lyon, la discussion lors de laquelle le nonce pontificale lui a annoncé, le 18 septembre dernier, le choix du pape François, il assure avoir voulu décliné, ne se sentant pas "à la hauteur de cette responsabilité". "Mais en échangeant avec lui, j’ai réalisé que cette nomination était très biblique ! Dans la Bible, en effet, Dieu choisit souvent celui auquel personne ne pense, le plus faible", fait-il valoir. Un aveu de faiblesse inattendu chez un parachutiste.

Article original publié sur BFMTV.com